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Citations sur Une histoire des abeilles (64)

Pour des millions de personnes, sa bouille ronde, ses grands yeux levés au ciel, un ciel d'un bleu intense, seraient associés à un seul mot. Un seul sentiment fédérateur : l'espoir.
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Je vomis jusqu'à ce que je n'aie plus rien dans le ventre. Puis j'hésitai. Je devais y retourner. Leur donner à manger, à boire. Les faire sortir de là. Ou trouver quelqu'un qui puisse m'aider. Je devais agir comme un être humain. Quelqu'un pouvait sûrement faire quelque chose. C'était peut-être moi, ce quelqu'un. (p.248)
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J'avais l'impression d'être de retour à l'école, lors des interminables cours de sciences naturelles assurés par un professeur si soporifique qu'on avait rebaptisé sa matière " sciences du sommeil" . Nous étions trop jeunes pour comprendre l'intérêt de son enseignement.
(p 321)
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Rien ne ressemblait au souvenir que je gardais de cette ville autrefois bruyante et grouillante d'activité. La plupart des maisons étaient à l'abandon, les rues, désertes. Il ne semblait plus y avoir ici aucun moyen de subsistance. Tout cela était sans doute dû au fait qu'on avait forcé une grande partie de la population à s'installer dans des régions où l'agriculture requérait une main-d'œuvre importante. A présent, telle une personne âgée s'acheminant vers la mort, Beijing déclinait un peu plus chaque jour.
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Partout autour de nous, le plus grand silence, exception faite du vent qui cinglait les bâtisses aux tuiles et aux fenêtres mal fixées - le bruit des muscles de la Terre, qui, lentement mais sûrement, prenait sa revanche sur la civilisation et cherchait à exterminer les hommes.
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Nous possédions trois cent vingt-quatre ruches. Trois cent vingt-quatre reines et leurs colonies respectives réparties dans l’exploitation, chaque endroit abritant rarement plus de vingt ruches. Dans un autre État, nous aurions pu en installer jusqu’à soixante-dix au même emplacement. Je connaissais un apiculteur dans le Montana qui en avait parqué près d’une centaine ensemble. La végétation là-bas était tellement luxuriante que les abeilles n’avaient que quelques mètres à parcourir pour trouver leur bonheur. Mais chez nous, dans l’Ohio, l’agriculture manquait de diversité. Le maïs et le soja s’étendaient sur des dizaines et des dizaines de kilomètres, limitant les sources de nectar.
Au fil des années, Emma avait peint chacune des ruches d’une couleur acidulée. Rose, turquoise, jaune citron, vert pistache : des coloris aussi artificiels que des bonbons aux colorants, édulcorants et autres additifs en E quelque chose. Elle trouvait ça rigolo. Pour ma part, ça ne m’aurait pas dérangé qu’elles restent comme avant : mon père avait toujours peint ses ruches en blanc, comme son père et son grand-père avant lui. Ils avaient coutume de dire que, l’important, c’était ce qui se passait à l’intérieur. Mais Emma soutenait que les abeilles aimaient ces couleurs, que ça rendait notre lien avec elles plus personnel. Elle avait peut-être raison, qui sait… Et puis, je dois avouer que la vue de ces cubes colorés éparpillés dans la nature comme des sucreries égarées de la poche d’un géant me faisait toujours chaud au cœur.
J’avais décidé de commencer par le pré, entre la ferme de Menton, la grand-route et l’étroite Alabast River – guère plus que le lit d’un ruisseau, malgré son nom. C’est ici que j’avais le plus de colonies. Vingt-six en tout. Je me dirigeai d’abord vers une ruche rose pétard. Être deux présentait un avantage : Tom tenait la caisse pendant que je remplaçais l’ancien plancher, sale et jonché d’abeilles mortes au cours de l’hiver. L’année précédente, nous avions investi dans des modèles grillagés munis d’une plaque. Ça nous avait coûté cher, mais ce n’était pas de l’argent perdu : mieux ventilée, la ruche était plus facile à nettoyer. La plupart des apiculteurs à la tête d’exploitations de la même envergure que la mienne ne prenaient pas la peine de changer le fond de la ruche à cette époque de l’année ; moi, j’étais contre le laisser-aller, et je voulais que mes abeilles vivent dans les meilleures conditions.
Les ruches fonctionnaient. Nous avions de la chance : les abeilles, calmes, furent peu nombreuses à s’envoler. Et quel plaisir de voir Tom travailler à l’air libre, vite et bien, comme dans son élément ! Je lui donnai des conseils pour positionner son corps.
– Fléchis les genoux au lieu de plier le dos, et pousse avec les jambes pour soulever.
J’en connaissais plus d’un qui avait fini avec un prolapsus, un lumbago ou ce genre de saloperies en forçant sur le dos. Or Tom, qui allait exécuter ce même mouvement des milliers de fois, en aurait besoin de nombreuses années encore, de son dos.
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TAO
District 242, Shirong, Sichuan, 2098

Tels des oiseaux disproportionnés, nous nous tenions en équilibre chacune sur notre branche, un bac en plastique dans une main, un plumeau dans l’autre. Je progressais lentement, avec le plus de précaution possible. Je n’avais aucune disposition pour l’escalade, contrairement à beaucoup d’autres femmes de l’équipe. Mes mouvements étaient souvent trop brusques, ma motricité fine pas assez développée, je manquais d’habileté. Je n’étais pas faite pour cette tâche, et pourtant chaque jour je devais passer ici plus de douze heures d’affilée.
Les arbres avaient atteint leur maturité de production, mais étaient encore jeunes. Leurs branches, aussi fragiles que du verre, craquaient sous notre poids. Je grimpai avec prudence pour ne surtout rien abîmer. Je posai mon pied droit sur une branche plus élevée encore puis hissai avec circonspection mon pied gauche. J’avais enfin trouvé une position sûre pour travailler, inconfortable mais stable. De là, je pouvais même atteindre les fleurs les plus hautes.
Le petit récipient en plastique était rempli d’un or vaporeux minutieusement pesé et distribué également à chacune d’entre nous tous les matins. Je plongeai le plumeau dans le bas et disséminai cette précieuse poudre autour de moi. Chaque fleur devait être pollinisée à l’aide de la balayette en plumes de poule, des poules de laboratoire conçues spécifiquement pour cet usage, car l’efficacité de leur plumage était supérieure à celle de n’importe quelle fibre artificielle. Une multitude de tests avaient été menés au fil du temps : dans mon district, ce savoir-faire remontait à plus d’un siècle. Les abeilles avaient disparu dès les années 1980, bien avant l’Effondrement, tuées par les insecticides. Quelques années plus tard, quand les substances en cause avaient cessé d’être utilisées, les abeilles étaient réapparues, mais la pollinisation manuelle avait déjà commencé et fournissait de meilleurs résultats, même si elle requérait un nombre de personnes – de mains – incroyable, colossal. Ainsi, lorsque survint l’Effondrement, mon district avait une longueur d’avance sur ses concurrents. Notre pays avait été le plus touché par les dégradations environnementales : pionniers en matière de pollution, nous étions devenus pionniers en matière de pollinisation manuelle. Ce paradoxe nous sauva.
J’avais beau m’étirer au maximum, la fleur demeurait hors de ma portée. J’étais à deux doigts d’abandonner, mais la crainte d’une sanction me poussa à persévérer. Un bac de pollen vidé trop vite pouvait nous valoir une retenue sur salaire. Tout comme un bac encore trop plein après des heures de labeur. Notre travail était invisible. Quand, à la fin de la journée, nous redescendions au sol, seules des croix rouges tracées à la craie sur le tronc des arbres – jusqu’à quarante, idéalement – indiquaient où nous avions pollinisé. Il fallait attendre l’automne, quand les arbres ployaient sous les fruits, pour savoir qui avait bien oeuvré. Mais souvent nous avions déjà oublié qui était passé par là.
Ce jour-là, on m’avait affectée à la parcelle 748. Sept cent quarante-huit sur combien ? Je l’ignorais. Nous n’étions qu’un groupe parmi des centaines d’autres. Dans nos uniformes beiges, nous nous ressemblions toutes, comme les arbres. Et nous étions aussi proches les unes des autres que l’étaient les fleurs. Toujours en groupe, perchées sur les branches ou marchant le long des ornières lors des changements de verger. La solitude, nous ne la trouvions qu’entre les murs de nos appartements exigus, à peine quelque heures par jour. Sinon, toute notre vie se déroulait à l’extérieur.
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Mais l'Effondrement toucha aussi les réseaux numériques. En l'espace de trois ans, ils furent anéantis. Il ne resta plus alors aux gens que les livres, les vieux DVD, les bandes magnétiques usées, les CD rayés contenant des logiciels dépassés, et le réseau hors d'âge de téléphonie fixe, qui ne tarderait pas lui-même à se désagréger.
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C'est pourquoi la première visite des ruches au printemps revêtait un caractère si particulier: revoir les abeilles, entendre à nouveau leur bourdonnement... Nous avions l'impression de fêter des retrouvailles.
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L'histoire était la même chaque fois. Des ruches en bonne santé, un stock de nourriture suffisant, un couvain et tout ce qu'il fallait. Et puis, en l'espace de quelques jours, de quelques heures même, les abeilles disparaissaient, abandonnant leur reine et tout le reste. Et ne revenaient jamais.
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