Je traverse la pièce d'un bond et j'attrape les bottes du garçon. Il perd l'équilibre et se fracasse la tête sur le bord du bureau. Sans hésitation, je lui saute dessus et je lui déchire la gorge. Puis j'enfonce mes doigts dans la fêlure de son crâne et je lui ouvre la tête comme une coquille d'oeuf. Son cerveau palpite à l'intérieur, chaud et rose. J'y mords à belles dents et ...
Savoir c'est souffrir, et je veux ressentir cette souffrance, je veux mieux les connaître et, par extension mieux ME connaître. Savoir qui et ce que je suis vraiment. Peut-être qu'à l'aide de ce scalpel, chauffé au rouge et stérilisé dans les larmes, je peux commencer à gratter la pourriture en moi.
Il n'y a pas de règle pour la façon dont est censée se dérouler une vie. Pas de monde idéal à attendre. Le monde est toujours ce qu'il est sur le moment, et c'est à toi de décider comment tu comptes t'y adapter.
Caché dans l'obscurité sous un ciel rouge vespéral, je pénètre dans le monde des Vivants.
Ma mère disait toujours que c'était pour ça qu'on était dotés de mémoire. Et du contraire de la mémoire : l'espoir.
Un truc bizarre tiens. Une question destinée aux philosophes zombies. Pourquoi le passé m'apparait-il comme un brouillard, alors que le présent est brillant, riche en sons et en couleurs ? Depuis que je suis mort, j'ai enregistré de nouveaux souvenirs, avec la fidélité d'un ancien mégaphone à cassettes, aussi vagues et aussi ternes que peu mémorables. Mais je suis capable de me rappeler chaque heure de ces derniers jours avec un niveau de détails incroyable et je suis terrifié à l'idée d'en perdre une partie. D'où me vient cette netteté ? Cette clarté ? (R)
Je n'en suis qu'aux premiers stades de la décomposition. Ce se limite à une peau grise, une odeur désagréable et des cernes noires sous les yeux. Je pourrais presque passer pour un vivant qui a besoin de vacances.
Peut-être que nous sommes éternels, je ne sais pas. Pour moi l'avenir est aussi flou que le passé. Seul le présent semble m'intéresser, et encore.
Suis-je issu des fondations de mon ancienne vie ou me suis-je levé d'entre les morts avec une ardoise vierge ? De quoi ai-je hérité et qu'est-ce qui est ma propre création ? Ces questions, longtemps restées à l'état de rêvasseries, semblent avoir pris un caractère plus pressant. Suis-je fermement enraciné dans le monde d'avant ? Ou puis-je choisir de m'en écarter ?
Que reste-t-il de nous ? gémissent les fantômes, dans l'ombre de mon subconscient. Pas de pays, pas de culture, pas de guerre, mais toujours pas la paix. Qu'est-ce qui constitue l'essentiel alors ? Qu'est-ce qui se tortille encore dans nos os quand on a enlevé tout le reste ?