Rituel de chair

« Quand je connaîtrai l’amour… ce sera pour toujours… ou je ne connaîtrai jamais l’amour… »

"Pourquoi serait-ce si différent de la chair humaine ? Surtout quand on pense que ces bœufs, ces moutons et ces porcs que vous mangez – vous n’êtes pas juif, n’est-ce pas ? – sont tous assassinés , pour ainsi dire. Aucun d’entre eux ne se porterait volontaire pour être mangé, si on lui donnait le choix. Alors que les êtres humains qui sont mangés ici le sont parce qu’ils veulent l’être, de leur propre volonté. N’est-ce pas bien plus moral ?"

" - Barbare ? Non. C’est l’acte de dévotion religieuse le plus exalté que je connaisse. Il exige une dévotion à l’égard de Dieu dont vous ne pouvez imaginer la force. Il montre de façon concrète comment l’esprit peut triompher de la chair. Dévorer le corps même que Dieu vous a donné est la façon la plus sûre d’approcher une authentique sainteté."

Le seul rapport que la restauration avait avec la religion, c'étaient les prières que faisaient les chefs pour implorer le pardon du ciel chaque fois qu'ils inscrivaient "Frais" ou "Cuisiné Maison" sur leurs menus.

Velma se trouvait là, ou plutôt ce qui restait de Velma. Elle avait tranché ses deux seins, puis ouvert une large plaie dans le ventre afin d’en extraire son foie et ses reins.

Allons, Martin, il n'y a aucune raison pour se tracasser à ce point. Cet endroit est un restaurant. Et laisse-moi te dire une chose au sujet des gens qui tiennent des restaurants : même les pires d'entre eux savent faire preuve de sensibilité. Ils sont obligés d'être sensibles, que leur établissement soit un quatre étoiles ou une gargote. Ils sont au service de l'estomac des gens, et il n'y a rien qui soit plus sensible que ça.
A ce moment-là, tout à fait soudainement, une voix grave et cultivée déclara:
Vous avez tout à fait raison, mon ami. Le tube digestif est le fleuve où coule la vie humaine.

- J'ai déjà vu cet endroit dans un cauchemar, dit Charlie.
Ses jambes refusaient de faire un seul pas en avant.
- Nous avons tous des cauchemars, dit M. Musette. La seule façon de rompre le charme qu'ils exercent, c'est de les affronter dans la réalité.
- Mais j'ai vu ces mêmes portes dans mon rêve, ces portes en acier inoxydable avec ces fenêtres circulaires.
M. Musette haussa les épaules.
- Dans ce cas, vous devez avoir de considérables pouvoirs de clairvoyance.

Éric se redressa. Son ventre pendait comme une tomate géante au-dessus de son caleçon long.
- J'ai une meilleure idée, dit-il. Laissez-moi lâcher mon chien Gumbo. Il les fera sortir de leur cachette. Il est à moitié doberman, à moitié allemand et à moitié chien d'arrêt.
- Ça fait un chien et demi, remarqua Charlie.
- Bien sûr, et c'est exactement ce qu'est Gumbo. : un chien et demi.
- Tu ferais mieux d'aller t'habiller, dit Charlie à Robyn. Si ce sont vraiment les Célestins, ça risque de barder.

Robyn posa une main sur son épaule et le regarda dans les yeux, et il pensa: C'est toujours grâce aux yeux qu'on sait si on va tomber amoureux de quelqu'un. L'amour est une question de rétine.

Bob leva la tête et ce fut à ce moment là que Charlie vit ce qui lui est arrivé. Le verre brisé avait accroché son front lorsqu'il était passé à travers le pare-brise, et il lui avait arraché la peau du visage, depuis les sourcils jusqu'au menton. Il regardait Charlie avec un oeil blanc et révulsé enchâssé dans un ovale de viande écarlate. Ses dents sanguinolentes étaient nues, sans lèvres ni gencives pour les protéger. Ce qui restait de son visage pendouillait à sa mâchoire en plis graisseux - ses joues, son nez, son menton - comme si ses traits n'avaient été qu'un masque de carnaval en Lastex qu'on venait brusquement d'arracher sa tête.