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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
A travers la courte vie de Branwell, Daphne du Maurier nous raconte la vie singulière et tragique des Brontê, dans leur presbytère isolé du Yorkshire.

Branwell, le seul garçon des six enfants du couple Brontë, est très tôt marqué par la mort : d'abord celle de sa mère, puis celle de ses soeurs aînées, Maria et Elizabeth. Des pertes tragiques qui le feront s'interroger sur sa foi, lui, fils de pasteur.

Enfant, il fut le pygmalion, le dieu vivant de ses soeurs : c'est lui qui insuffla ce vent de la création littéraire, dans leur petite salle d'étude. Ils créent ensemble ce monde infernal, peuplé de personnages inspirés de la réalité, flamboyants et passionnés.

Enfant brillant, fils unique sur qui repose tous les espoirs du père, Patrick Brontë, Branwell adulte ne parviendra jamais à concrétiser une quelconque réussite : il échoue à la Royal Academy, en tant que portraitiste, il ne sera jamais publié, il sera renvoyé de ses postes de précepteur et de chef de gare.
Il se perdra dans l'alcool et le laudanum et mourra à 31 ans de la tuberculose. Officiellement, il ne saura jamais que ses trois soeurs ont chacune publié un roman, et que Charlotte est le célèbre auteur de Jane Eyre.

Pendant ma lecture, je suis tombée par hasard sur une représentation du fils prodigue : son départ douloureux loin de sa famille, et son retour, riche et important. Je n'ai pu m'empêcher de penser à Branwell : chaque retour au presbytère est pour lui synonyme d'échec.

Daphne du Maurier a accompli un travail titanesque : l'ouvrage est très documenté, on sent à chaque page l'amour et l'intérêt qu'elle porte à cette famille.
Une biographie très intéressante et indispensable pour les admirateurs des Brontë.

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Etant une adepte de  littérature anglaise et aimant découvrir ce qui fait l'environnement des écrivains, ayant vu il y a quelques temps un documentaire sur le presbytère de Haworth où vivait toute la famille, j'étais très attirée par cette biographie de Daphné du Maurier consacrée à l'élément masculin des enfants Brontë  et je me suis plongée dans l'existence de ce frère méconnu et mal-aimé et à travers sa vie l'existence et les rapports des trois jeunes femmes avec celui-ci.

Maudit : oui sûrement. Dès l'enfance il souffre de  la disparition de sa mère et de ses soeurs Maria et Elizabeth. Elevé par sa tante maternelle, Elizabeth,  celle-ci perçut à tort ou à raison chez le jeune enfant un potentiel artistique : peinture, écriture, poésie, et lui promettait un bel avenir. Pourtant à la différence de ses soeurs, il ne suivit jamais d'études dans un collège et fut instruit par sa tante. Habituellement ce sont les garçons des familles qui bénéficient de l'enseignement extérieur. Branwell resta au presbytère et les filles furent envoyées dans un premier pensionnat dont certaines ne revinrent que pour mourir.

Branwell, petit, roux (cette couleur de cheveux était parfois très mal vu), épileptique, myope, gaucher (on lui enjoignit d'écrire de la main droite et il développa la capacité d'écrire des deux mains), grandit entouré de ses trois soeurs, si complices avec elles dans leur jeunesse mais se sentant de plus en plus exclu de leurs confidences, lui qui avait été leur compagnon d'écriture, de création, de jeux.

On suit les espoirs puis la lente déchéance de ce jeune homme maladroit dans ses rapports aux éditeurs, aux artistes, cherchant un moyen de subsistance (il a même travaillé comme préposé de gare de chemins de fer), lui dont le talent n'équivalait pas celui de ses soeurs.

Il ira jusqu'à se créer un double à travers le personnage d'Alexander Percy, héros de son "monde infernal" où tout était possible. Ne devient-il pas schizophrénique ?

Il est très intéressant de suivre le processus de création de cette famille : jeux de rôles, création d'un monde imaginaire : Angria et les différentes vies de ses habitants qui ont inspiré ensuite nombre de personnages dans les récits écrits ensuite, jeux d'écriture en lettres minuscules (vu également chez Jane Austen) pour ne pas être lu par l'entourage ou pour ne pas savoir qui écrivait, observation des personnes et situations qui les entouraient, leur imagination était très féconde et en ébullition. Pour son malheur et son psychisme, il fut refusé à l'entrée de la Royale Academy et également par un célèbre éditeur.

Une grand complicité unissait Charlotte et Branwell, complicité qui s'effrita au fur et à mesure que Charlotte connut le succès, pas par désamour  mais peut être pour préserver l'orgueil de ce frère buveur, addicte au laudanum, victime de crises récurrentes d'épilepsie, mal soigné car ses crises étaient mises sur le compte de ses excès..... Mais certains pensent qu'une partie des Hauts de Hurlevent est l'oeuvre de Branwell.

A travers Branwell on découvre le travail des trois soeurs dans ce presbytère isolé dans le Yorshire, vivant repliés sur eux-mêmes, au milieu de la lande, avec peu de contacts extérieurs et trouvant entre eux une émulation à l'écriture. Aucun ne connut l'amour partagé, leurs vies étaient austères, très marquées par les disparitions des êtres chers, la maladie.  Ce qu'ils ne pouvaient vivre, ils l'ont inventé dans leurs romans.

C'était un clan, Charlotte, Emily et Anne en ont fait une force, Branwell lui s'est senti comme le "vilain petit canard". Elles ont tenté de le protéger les derniers mois de sa vie en refusant de lui avouer qu'elles commençaient à être publiées (sous le nom de Bell) mais lui le vécut comme une mise à l'écart définitive. Il mourut à 31 ans de tuberculose mais aussi de ses excès, de sa folie.

Enorme travail de documentation et de recherches de la part de Daphné du Maurier pour reconstituer la vie de cet étrange petit homme, qui tenta à travers la franc-maçonnerie de se constituer un réseau d'influence, une existence mais comme pour la peinture et l'écriture rien ne fonctionna. Elle tente de replacer dans le contexte de l'époque sans parti pris, l'existence de cet homme sensible, fragile, n'ayant vécu pratiquement que par procuration à travers ses soeurs, ses rêves, ses marionnettes en bois, ses personnages d'un monde imaginaire et qui ne trouva ni l'amour et la reconnaissance espérés , juxtaposant ses recherches à celles de Mrs Gaskell,

Il fit vivre à sa famille l'enfer de sa vie, il vécut sûrement l'enfer pour ne pas avoir été reconnu, aidé, encouragé, soigné, pour une fois ce fut un homme qui a vécu à l'ombre de Grandes Dames de l'écriture.

Il y a de nombreuses lettres, poèmes, des différentes personnes gravitant autour de lui ainsi que de ses amis, peu nombreux (principal ami le sculpteur Leyland, qui l'aida à régler de nombreuses dettes) insérées dans la biographie avec des annexes explicatives en fin d'ouvrage qui permettent de mieux comprendre les propos avancées par l'auteure.

Lecture enrichissante pour mieux appréhender la littérature de cette famille, pour mieux cerner les différentes personnalités mais aussi découvrir un pan de leur vie dont on parle peu.....
Lien : http://mumudanslebocage.word..
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C'est avec un immense talent que Daphné du Maurier saisie avec une grande justesse ce portrait de Branwell. Elle montre très bien l'amour jaloux que ses soeurs ont pour leur frère maudit. Heathcliff c'est lui Branwell. C'est un homme de l'ombre de cette famille. et se sont ses soeurs qui sont dans la lumière.
Un ouvrage passionnant sur une époque phare de la littérature anglo-saxone à l'aube de l'industrialisation. Un réel régal pour moi qui a une passion dévorante pour les soeurs Brontë.
Lien : http://livresdemalice.blogsp..
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Branwell Brontë seul garçon d'une fratrie de six était un enfant à l'esprit fragile. Confronté à la maladie et la mort de ses proches (mère et 2 soeurs) dés sa petite enfance.
Un foyer presbytérien où a régné un silence et une ambiance morbide pendant de longues périodes, forcément source d'angoisse et de terribles cauchemars pour un enfant.
Une chambre parentale hantée par la présence de sa mère dans laquelle il passera toutes ses nuits auprès de son père suite au décès de celle ci.
Un garçon éduqué par son père pasteur de son état, et dans lequel celui ci avait placé tous ces espoirs de réussite sociale et qui faisait sa fierté.
Un enfant très tôt doué d'une intelligence créatrice pour inventer poèmes, contes et histoires qu'il couchera sur le papier avec l'aide de ses soeurs dans l'intimité de leur salle d'étude. Des heures passées a créer des mondes où rien ne leur était interdit et qui ont longtemps étaient leurs seules joies d'enfant. Des mondes dont eux seuls avaient connaissance.

En grandissant Branwell a développé des troubles du comportement puis une ou des maladies psychiatriques. Lesquelles à l'époque ne laissaient malheureusement aucune chance d'avenir à celle ou celui qui en souffrait.

Une lecture hyper intéressante, bien écrite et riche de détail.
Je n'ai aucune formation littéraire, je conseillerais pourtant à ceux qui n'ont pas encore découvert les romans des soeurs Brontë et qui souhaite le faire, de commencer par cette biographie de Daphné du Maurier. Elle apporte un éclairage, un regard et une vision différent sur leurs romans.

Avec des "si" on refait le monde, c'est bien connu ! Je ne terminerais donc pas mon petit avis par, la question mainte fois posée : Si Branwell...
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De la biographie des soeurs Brontë, j'avais retenu que Branwell était le frère terrible instable, alcoolique qui venait troubler ses soeurs. Si ce livre ne reporte pas une image complètement différente de Branwell, il nous livre un homme immiscé par ses soeurs qui va d'échec en échec alors qu'il avait été protégé et adulé par son père mais également par ses soeurs durant l'enfance.

Il a initié un jeu avec ses soeurs, créant un monde ses soeurs ont su exploiter pour leurs oeuvres, lui s'est enfermé dans un monde très sombre avec ses démons et ses échecs. Un monde dans lequel il se réfugie après les échecs et l'absence de réponse à ses propositions de publications. On en apprend enfin plus sur Branwell. L'auteur recoupe sa vie avec son oeuvre, des poèmes qu'elle fait coïncider avec ses expériences.

C'est un homme frustré qui à 20 ans  ne gagne pas sa vie. Ni à 28 ans puisqu'il retourne au presbytère  et voit sa santé décliner.

Il s'essaie en tant que portraitiste, abandonne, reprend la plume, devient employé de chemin de fer mais ne réalise pas la carrière qu'il veut puis trouve un poste de précepteur.


Le livre offre beaucoup d'informations et l'auteur cite méticuleusement ses sources, beaucoup de correspondance, notamment celle de Charlotte. J'ai parfois eu l'impression de lire un reportage très précis mais la lecture reste fluide grâce à la plume.  C'est un livre riche dans lequel je retournerai de temps en temps car je pense ne pas avoir retenu la moitié des informations. Les références en annexe dont la présentation des nombreuses personnes autour des Brontë sont bien utiles. 

Et mention spéciale pour l'objet lui-même. J'aime beaucoup ma liseuse mais j'ai trouvé cette édition très belle avec une touche de violet. le papier et la manipulation de ce livre m'ont rendu le contacte très agréable.

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Si vous me suivez, vous savez que je ne suis pas lectrice de biographies, mais j'aime sortir de ma zone de confort. J'ai eu envie de lire cette biographie du frère Brontë pour différentes raisons.

La première va en faire bondir certains, longtemps j'ai ignoré l'existence de ce garçon dans la fratrie des Brontë, puis il a pris dans mon esprit l'image d'un être étrange coupé du monde. Presque un personnage des romans gothiques.

J'ai vite laissé ce fantasme et mes à priori grâce à la plume de Daphnée du Maurier. le nom de l'écrivaine a joué un rôle très important, car le Branwell de mes « fantasmes » aurait pu être un de ses personnages torturés.

Je voulais aussi préciser que mes connaissances sur les soeurs Brontë et leurs écrits sont assez succincts. Je plaide coupable.

Quel titre aux tonalités dramatiques, de quoi tenter les lecteurs curieux.

Pourquoi je vous raconte tout cela ? Pour dire aux néophytes dans mon genre que cette bio se lit presque comme une fiction tant le sujet étudié est singulier. C'est un livre très abordable et une mine d'information. En fin de volume il y a des annexes qui montrent que Daphnée du Maurier s'est beaucoup documentée.

Daphné du Maurier fait référence aux spécialistes qui ont déjà travaillé sur la famille Brontë. Elle nous restitue dans son contexte qui était cet enfant, ce jeune homme, cet homme que ce soit au niveau familial, local ou plus général. Elle nous retrace les grandes lignes de la vie familiale pour comprendre qui vit/ ou pas dans cette maison. Ce que j'ai apprécié, c'est de savoir où étaient les soeurs Brontë à tel ou tel moment.

Dans cette biographie on découvre aussi comment était constituée la société dans laquelle évoluait (ou pas) Branwell.

Lorsqu'elle nous parle des écrits de Branwell et de ses soeurs, elle nous signale ce qui les inspirait. le lecteur non averti ne verrait pas la réalité derrière la fiction qu'ils créaient. Il y a aussi des extraits en VO et traduits, pour moi qui ne suis pas anglophone j'ai été soulagée. J'ai trouvé agréable que les traductions ne soient pas en note en bas de page ou en fin de volume, mais bien à la suite du texte original.

Pour les tableaux aussi on a des informations que le simple spectateur ne pourrait déceler.

Cette biographie montre aussi comment les relations dysfonctionnelles pouvaient modifier le parcours d'un être. Branwell maintenu dans un cocon pour diverses rasions (que je vous laisse découvrir) alors que les soeurs ont été poussées à travailler, à entrer dans l'enseignement ou devenir gouvernantes pour pouvoir subvenir à leurs besoins présents et futurs.

Je trouve que tout le monde était trop indulgent envers Branwell même hors de la maison. Il avait l'art de se faire aimer.
[...]
J'ai beaucoup aimé dans cette biographie le fait que Daphné du Maurier conteste quelques faits racontés dans les biographies précédentes avec preuve à l'appui.[...]
Lien : http://ramettes.canalblog.co..
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Traduit par Jane Fillion

Qui était vraiment Branwell Brontë ? Si nous connaissons beaucoup de choses sur ses trois célèbres soeurs, nous ne savons finalement pas grand chose sur l'unique fils du révérend Patrick Brontë. La postérité nous a renvoyé l'image d'un homme orgueilleux, vaniteux, imbu de lui-même, alcoolique, drogué, fou et celui d'un raté. Pas vraiment de quoi avoir envie de le connaître davantage, a priori. Pourtant, la première à s'intéresser au jeune homme est Elizabeth Gaskell, qui a donné le "virus" à Daphné du Maurier.

La célèbre Anglaise livre ici un documentaire dense, riche en références que l'on trouve en annexe du récit.
Etant atteinte de brontemania depuis mes plus jeunes années, ayant dévoré également une bonne partie des romans de Daphné du Maurier, voir le nom des Brontë associé au sien n'a fait qu'aiguiser ma curiosité ! Quant à Branwell à proprement parler, j'avoue que j'en gardais l'image négative véhiculée par la postérité, mais aussi le portrait un peu agacé qu'en fait Charlotte dans ses lettres, d'un frère qu'elle a pourtant toujours aimé, mais qu'elle ne comprenait pas. Je vous invite d'ailleurs à lire l'excellent ouvrage, Lettres choisies de la famille Brontë par Constance Lacroix, chroniqué ici même en mai 2017, qui est très instructif pour qui s'intéresse à cette famille devenue mythique.

Mais qu'est-ce que donc que cette histoire de "monde infernal" ? En fait, Charlotte, Emily, Anne et Branwell, enfants, puis adolescents écrivaient en secret sur les personnes de leur entourage, qu'ils transforment en personnages d'un univers fantasmagorique d'un pays imaginaire nommé Angria, qui se situerait en Afrique. Sachant qu'ils commettent quelque chose de répréhensible, ils appellent leur création "Le monde infernal". Ils s'y projettent eux-mêmes. le petit personnage que vous voyez sur la couverture, c'est Sneaky, un petit de soldat de bois que Branwell reçu en cadeau de la part de son père. Sneaky, ce compagnon d'enfance à qui il va insuffler la vie et qui reposera sur sa tombe, à sa mort en 1848, à l'âge de 31 ans. Sneaky et les autres petits soldats de bois que Branwell va offrir à ses soeurs vont enflammer leur imagination. Les chroniques d'Angria voient le jour. Un bon moyen de s'évader de l'univers confiné dans lequel vit la fratrie. En particulier Branwell, qui, contrairement à ses soeurs, ne sera pas envoyé en pensionnat, en raison de sa santé délicate (tout laisse à penser qu'il souffre de crise d'épilepsie) .
Branwell est complexé et insuffle en Sneaky tout ce qu'il aurait aimé être : "En réalité, ce personnage n'est autre que l'incarnation du héros idéal que Branwell rêvait d'être. Un Branwell qui ne pêcherait pas par sa petite taille; ne porterait pas de lunettes ; ne serait pas instruit à la maison ; ne griffonnerait pas, de la main gauche, poèmes et récits mais serait un homme de plus de six pieds de haut, brun et beau, formentant des révolutions et assommant ses rivaux d'un revers de sa puissante main droite."

Malgré ce physique qu'il n'aime pas, à cette époque, Branwell est un jeune homme plein d'ambition et d'espérance. Tout cela va s'amplifier quand il rencontre l'oeuvre d'un jeune sculpteur, Joseph Bentley Leyland, devenu célèbre à 23 ans.
"Puisque Joseph Leyland était célèbre à 23 ans, pourquoi Branwell ne le serait-il pas aussi ?"
Les deux jeunes hommes deviennent amis. "Branwell rentra à Haworth bouillonnant de projets d'avenir. Il ne parlait plus que de Leyland, d'art et de Londres." Branwell décide de poser sa candidature à la Royal Academy mais ce fut un projet non réalisé dont on ignore la raison, "J'ignore si ce fut sa conduite ou le manque d'argent qui empêcha Branwell d'entrer à la Royal Academy. Peut-être de l'un et de l'autre", déclara Ellen Nussey à Elizabeth Gaskell.
Bref, ça commence mal ! C'est pas grave, Branwell décide de poser sa candidature comme rédacteur au Blackwood's Magazine. Sauf qu'on ne veut pas de lui comme collaborateur ! Il se laisse embarquer par la Franc Maçonnerie, écrit des poèmes qu'il veut soumettre à l'avis du plus grand poète anglais de l'époque : Wordsworth, qui vit non loin de là, dans la région des lacs. Celui-ci ne prend même pas la peine de lui répondre. Wordsworth apparaît ici comme un vieux poète bourru : quand Charlotte lui envoie quasi-anonymement un extrait de ses histoires d'Angria en les transposant dans le Yorkshire, il répondit qu'"il n'avait pu discerner si l'auteur était un clerc de notaire ou une modiste grande dévoreuse de roman" ! :)

Branwell décide alors de partir à Bradford pour gagner sa vie comme portraitiste. Cela fonctionne pendant un an puis nouvel échec (les tableaux qu'il a réalisé sont au presbytère et à la National Galery de Londres).
Il tente alors d'être précepteur et échoue une nouvelle fois. Il s'engage dans la compagnie des chemins de fer de Leeds, histoire au moins de gagner sa vie et de s'assurer une certaine sécurité matérielle. "Le fait est qu'il fut engagé (...). A la fin du mois de septembre 1840, Branwell devint préposé au guichet de Sowerby Bridge". Sans doute aurait-il réussi s'il n'avait pas été quelqu'un d'influençable, mais ce fut bien dommage qu'il ait un chef de gare alcoolique qui l'entraîna dans son vice alcoolisé ! Muté à Liverpool, il rencontre les Irlandais qui ont une grosse partie de la population de la ville. "Oui, il était le frère de ces innombrables Irlandais, des hommes certes doués, pourtant des ratés, qui dans leur pays natal se contentait de rêver leur vie sans arriver à rien, et qui, transplantés, se perdent corps et âmes". Ses frères de sang (la grand-mère maternelle des enfants Brontë était irlandaise et catholique) ne l'aident pas à trouver le chemin de la réussite...
Il finit par se faire renvoyer de la compagnie des chemins de fer car il manque de l'argent dans la caisse.

Je ne vais pas vous raconter toutes les mésaventures de Branwell, qui au-delà de sa malchance, s'enferme tout seul dans une vie infernale en faisant les mauvais choix. le Branwell que décrit Daphné du Maurier m'a fait mal au coeur. On découvre un être hypersensible, mal dans sa peau, traumatisé par la mort de sa soeur Maria, qui hantera ses nuits tel un fantôme, lui provoquant d'horribles cauchemars. C'est quelqu'un qui perd la foi, en les autres et en dieu à partir du moment où il voit sa tante (qui lui a servi de mère) mourir après d'atroces souffrances.

Branwell Brontë est un être accablé par l'échec, les dettes, la réussite de ses soeurs. Il souffre aussi du regard que son père et Charlotte portent sur lui : un regard plein de déception, quand Emily et Anne sont beaucoup plus discrètes sur ce qu'elles pensent de ce frère qui leur mène une vie infernale quand il est ivre et a pris du laudanum.
Sans doute, Branwell était-il schizophrène, une maladie dont la consommation toujours plus importante d'alcool et de laudanum "ne pouvait que multiplier d'alarmante façon les visions terrifiantes ou paradisiaques qui [le] hantaient". Cette maladie n'était pas connue comme telle à l'époque.

Daphné du Maurier montre comment il a en partie inspiré et sans doute contribué aux Hauts de Hurlevent. C'est juste incroyable ! le début du roman, dans sa toute première version, aurait été écrit conjointement par Emily et Branwell. En tout état de cause, c'est Branwell qui a inspiré l'idée des deux familles de l'histoire. Plus tard, il a affirmé avoir écrit lui-même une partie du roman.

Ce jeune homme succombera un désespoir : "William Brown le découvrit à mi-chemin de la petite pente qui menait de l'église au presbytère. Il était à bout de forces et incapable d'accomplir seul les quelques pas qui le séparaient de sa demeure (...) Branwell ne devait plus quitter le presbytère. Il mourut deux jours plus tard."
"Sur le permis d'inhumer, la mort de Branwell est attribué à une bronchite chronique et au marasme (cachexie)."

Je me suis régalée avec ce livre documentaire qui se lit comme un roman. Il date de 1960 et plaira à tous les fans des Brontë. Je n'ai qu'une envie : retourner à Haworth et chercher Branwell ! On peut remercier Daphné du Maurier de réhabiliter sa mémoire avec ce magnifique roman biographique.

C'était un ouvrage épuisé et c'est une chouette idée de l'avoir rééditée dans la très belle collection "Petit Quai Voltaire", vendu avec un marque-page assorti !
Lien : http://milleetunelecturesdem..
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L'univers des Brontë raconté par Daphné du Maurier, j'avoue que l'association de ces deux univers m'a séduite avant même d'ouvrir le livre.
Les éditions de la Table Ronde rééditent, dans la collection Petit Quai Voltaire, une ouvre parue en 1960. le livre est superbe avec sa belle couverture et son papier velin très soigné.
Pour le contenu, j'ai découvert la vie du frère des trois célèbres soeurs Brontë, dans ce livre très complet et rempli d'extraits des écrits de Branwell.
Doté d'une imagination débordante, il invente un « monde infernal », l'histoire d'un royaume, quelque part entre le Ghana et le Nigeria, une grande épopée militaire et politique. Ce mélange de récit et de poèmes, composés avec ses soeurs, ne seront pas acceptés par les éditeurs.
Branwell s'essaye à la peinture, sans plus de succès.
Daphné du Maurier nous déroule sa vie remplie de difficultés et d'échecs. D'autant plus difficile à accepter que ses soeurs connaissent un destin plus heureux.
Branwell décline, souffrant d'épilepsie et de n'avoir pas réussi sa vie.
Un triste destin pour le seul garçon de cette famille d'écrivains surdoués.
Ce livre très documenté nous livre une nouvelle facette de la famille Brontë et un autre regard sur les héros masculins des grands romans de Charlotte et Emily probablement inspirés des histoires extraordinaires de Branwell.
Une pépite à découvrir.

Lien : http://www.despagesetdesiles..
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Petit à petit, je découvre l'oeuvre de Daphné du Maurier. J'ai déjà lu quelques uns de ses romans et une autobiographie. Maintenant, je découvre sa plume dans un nouveau genre : l'essai. En effet, ce livre n'est pas seulement une biographie. L'auteur va beaucoup plus loin. Il faut savoir que Patrick Branwell Brontë, frère des trois soeurs Brontë, est un personnage méconnu et parfois raillé. Il a finalement laissé peu de traces derrière lui ou alors très incomplètes et difficilement interprétables. Daphné du Maurier donne donc sa version toute personnelle et assez subjective de ce qu'a été sa vie. Elle s'appuie sur les écrits du jeune homme, des témoignages, de multiples correspondances et des études déjà réalisées. C'est un véritable travail de fourmi qui a été réalisé.

Très vite, j'ai compris pourquoi Branwell Brontë a pu fasciner Daphné du Maurier. C'est une figure incomprise, sombre, tourmentée dont la vie n'est qu'une succession de déception. Nous suivons sa chute dans des abimes d'alcool et de laudanum. C'est le destin terrible d'un homme tout de même attachant par sa nature profonde. Les passages concernant le monde d'Angria, récit rédigé toute sa vie durant, sont ceux qui m'ont le plus déplues. C'est assez difficile à appréhender même si cela reste intéressant à découvrir car Branwell a mis beaucoup de sa personne et de ses expériences dans ces textes. Bien sûr, on découvre la vie difficile à Haworth. Charlotte, Emily et Anne sont très présentes comme le reste de la famille et de leur entourage.

C'est donc un livre très intéressant sur Branwell Brontë mais aussi sur toute sa famille et toute une époque. Daphné du Maurier a réalisé un travail énorme pour écrire ce livre et cela transparait nettement dans ces pages. J'ai découvert un personnage torturé, méconnu et éclipsé par ses célèbres soeurs.
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