AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,66

sur 131 notes
5
6 avis
4
7 avis
3
9 avis
2
2 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'habite en Galicie, nom donné par les Autrichiens aux territoires de l'ancienne Pologne qu'ils ont annexés.
Je suis vieille, très vieille. En effet, j'ai côtoyé plusieurs générations.
Je m'amuse et je me tourmente, je lis dans les pensées, je frôle les drames. J'assiste aux sursauts de l'Histoire, j'aime et je déteste.
Mais toujours je rends compte, je vois les pensées, je lis dans les coeurs.
Je suis une maison de maître, un « dwor » comme on dit en Pologne. Et c'est moi la narratrice de cette histoire.

...
Oui, c'est une maison qui raconte l'histoire de cette famille polonaise, depuis la fin du 18e siècle jusqu'au début du 20e. A vrai dire, ce procédé m'a semblé quelque peu artificiel et m'a ennuyée au début du récit. Pourquoi ne pas, tout simplement, adopter un point de vue omniscient, sans passer par la maison qui voit tout, entend tout, même l'intérieur des gens ?
A part cela, et à part aussi quelques faits politiques (dont, je reconnais, on ne peut se passer, mais je déteste la politique), j'ai beaucoup aimé suivre les méandres plus ou moins tortueux de cette famille de confiseurs qui se veut d'ascendance aristocratique.
La psychologie extrêmement fouillée et bien rendue par un style l'épousant parfaitement m'a enchantée. L'évocation poétique de la nature sert de toile de fond aux joies et aux catastrophes humaines de tout ordre.
J'ai aimé calquer mes pas sur ceux de Clara, une femme posée, peu gâtée par la vie, mais pourtant entièrement dévouée à sa famille, et qui, sur le tard, connaitra une passion dévorante.
J'ai suivi avec intérêt les errements et les évidences de ses filles, qui ont chacune connu un destin particulier. Et puis les générations suivantes, aussi, m'ont fait sursauter plus d'une fois, et m'ont indignée.

En filigrane, le statut des femmes...Et là je peux vous dire qu'une immense vague de révolte me submerge, quand je vois comment les femmes de toutes les époques, de toutes les conditions étaient considérées et traitées.

Je quitte cette Maison pleine de sagesse, ancrée dans une Pologne qui se cherche, se construit par soubresauts, au rythme d'une famille attachante.

« La face du monde bouleversée ! J'ai toujours trouvé un peu risible l'importance que la plupart des humains attachent à ces choses. Selon que la terre est à eux ou à d'autres, ils ont une façon toute différente de la regarder et même de s'y mouvoir.
Et pourtant, dans les faits, à qui est-elle vraiment ? Si on me le demandait, je dirais : au vent, qui brasse bien plus d'arpents que n'en possédèrent jamais les Radziwill ou les Zamoyski, courbe les blés en longues ondes dans la plaine, renverse des arbres, prélève sa dîme d'ardoises. Qui, de tout homme, fait un manant obligé de se découvrir sur son passage, de toute femme une serve dont il dénude les jambes et fouit les cheveux à son caprice. »

Encore une fois, la littérature belge a prouvé sa valeur à travers « Les vivants et les ombres », de Diane Meur.


Commenter  J’apprécie          530
Alors là, c'est le cas de le dire, les murs ont des oreilles! A l'affût de tout, la moindre conversation entre humains ou entre casseroles.
C'est donc une saga familiale , racontée uniquement à travers ce que cette maison peut saisir des évènements extérieurs d'une histoire très riche en évènements, celle de cette région au départ Pologne devenue Galicie, pendant une centaine d'années. Et surtout , bien sûr, de la vie familiale qu'elle abrite, très mouvementée elle aussi. le chef de famille , fils de confiseur, a réussi à épouser la fille d'un comte , "quartiers de noblesse irréprochables et profil de mouton" , et , dans la propriété, construit aussi une petite usine de confiserie qui semble ne fabriquer qu'une sorte de bonbons , les pastilles de la Vierge, qui deviendront plus tard les pastilles de Sissi , les opérations de marketing étant déjà d'actualité à l'époque..
Révolutions, émeutes, et fin de la féodalité , mais aussi antisémitisme marqué pour la vie extérieure, amours contre son rang et enfants illégitimes à l'intérieur.
Bref, une vie chargée... et on ne peut en vouloir à cette maison d'avoir ...déménagé.
Très agréable à lire, très bien documenté, et moi qui connaissais très peu l'histoire de ces pays, j'ai appris beaucoup de choses!
Je me lève aussi la nuit pour essayer d'entendre ce que mes casseroles ont à se dire, mais je pense que cela va vite s'arranger?

Un extrait:

Ce ne fut pas la gestion de Wioletta qui coula la sucrerie, bien qu'on prédit dans la région qu'il ne pouvait rien arriver de mieux à une affaire ainsi tombée en quenouille. Ce ne furent pas non plus les modestes revendications de ses employés, ni le boom du sucre russe, qui restait cher à importer. Ce qui perdit l'entreprise si florissante de Jozef fut la décision de l'archiduc Rodolphe , en janvier 1889 , de mettre fin à ses jours dans son pavillon de chasse de Mayerling , avec sa très jeune maîtresse la baronne Vetsera.
J'appris ce drame, comme de juste, dans les cuisines . J'arrivai là un matin, avide de papotages fleurant bon, eux, le monde des vivants; et quel ne fut pas mon étonnement en découvrant , autour de la grande table, notre personnel féminin changé en assemblée de pleureuses!...
A l'étage des maîtresses, on ne pleurait pas; c'était pourtant là qu'il y aurait eu le plus de quoi pleurer. Elles l'ignoraient encore, les deux demoiselles, mais c'était, à terme, la fin de leur fortune.
Les "Délices de Sissi"? Ce nom, décidément, sonnait comme une mauvaise blague. En fait de délices, la mère du suicidé avait eu, en vingt ans: un beau-frère, Maximilien, fusillé au Mexique; une belle-soeur, veuve du précédent, devenue folle de chagrin; un cousin, l'extravagant Louis II de Bavière, retrouvé noyé dans des circonstances obscures; sans compter des autres parents et amis, qui , autour d'elle, sombraient dans la démence ou mouraient atrocement. Mayerling était le drame de trop. Dès la semaine suivante affluèrent ici des courriers de pharmaciens annulant leurs commandes, il fallut suspendre la production, faire dessiner de nouvelles boîtes portant la sombre mention " Pastilles Incarnadines" et les mettre hâtivement en vente pour éponger le manque à gagner........"



Commenter  J’apprécie          201
J'ai enfin découvert la plume de Diane Meur, romancière belge qui est également traductrice. J'ai choisi ce roman historique pour commencer, un roman qui s'étend des années 1830 à la fin du 19è siècle environ. Il met en scène la famille Zemka, avec Jozef, fils de confiseur, qui parvient à devenir le régisseur d'un domaine de Galicie (une partie de l'actuelle Pologne) et, se glissant dans le lit de la fille de la maison, Clara von Kotz, va en devenir le propriétaire, rétablissant en cela le lien de la maison avec ses ancêtres aristocratiques. Grâce à ses liens familiaux (un frère exilé à Paris, un neveu très engagé), Jozef vit les révolutions et les mouvements d'indépendance qui secouent l'Europe autour de 1848. Plus tard, à la fin du siècle, on sent monter les crispations, les nationalismes qui conduiront à la première guerre mondiale. Même si tous les faits ne sont pas expliqués dans leur contexte, le roman est assez passionnant de ce point de vue historique.

Jozef, à son grand dam, n'aura que des filles. Et c'est un autre point de vue intéressant du livre : la place des femmes dans cette maison et dans la société d'alors. Clara, marquée dès le départ par cette liaison scandaleuse avec Jozef, devra se dévouer à son mari et à ses filles, à la maison. Les filles, après le temps précieux de l'enfance, seront d'abord des filles à marier et, même si certaines d'entre elles – comme leur mère – s'écartent de la voie tracée, elles restent sous la coupe de leur père ou de leur mari. Sauf Zofia, dont j'aurais aimé connaître le destin. Mais le lecteur ne peut y avoir accès car Diane Meur a choisi un point de vue narratif original : c'est la maison elle-même qui raconte la vie du domaine et de ses habitants. Ne reculant devant aucun indiscrétion, elle est particulièrement énergique pendant les années fastes et s'engourdit au fil des années, avec la mort de Clara et le départ des premières filles, se réveillant plus ou moins quand la génération des petits-enfants de Jozef revient au pays.

Diane Meur creuse la psychologie de ses personnages, nous attachant à eux malgré ou avec leurs défauts, leur caractère parfois imbuvable, leurs comportements odieux ou confinant à la folie. Elle sait jouer aussi avec le temps, maniant les retours en arrière et les effets de prolepse avec art. C'est aussi la grande force de ce roman que je ne peut que vous recommander.
Lien : https://desmotsetdesnotes.wo..
Commenter  J’apprécie          150
En 1821 en Galicie l'obscure famille Zemka reconquiert le domaine fondé par un ancêtre issu de la noblesse et s'engage fiévreusement dans la lutte d'indépendance de la Pologne. Pour retracer son ascension puis sa décadence, l'auteur convoque une singulière narratrice:la maison elle même qui derrière sa façade blanche et son fronton néo-classique, épie ses habitants. Indiscrète et manipulatrice, elle attise les passions , entremêle les destins, guette l'écho des événements qui font l'histoire de l'Europe. Les femmes surtout, condamnées à la réclusion dans la sphère domestique, la fascinent.L'une d'elles, enfin, va réussir à s'en aller...

Si vous êtes amateur de grandes et belles saga, ce livre est pour vous. On sent le vent de l'histoire traverser ce livre. C'est très bien écrit et l'idée de raconter cette histoire par une maison est non seulement original mais apporte beaucoup de sens . Seul bémol : une histoire sans grande surprise et une fin un peu incongrue.

Un très bon moment de lecture. Un livre qui se lit d'une traite. Ma note sera de 7.5/10.

Ce livre a eu le prix Rossel 2007 (équivalent de notre prix Goncourt en Belgique), prix du meilleur roman adaptable au cinéma 2008(???), prix du roman historique 2008.
Lien : http://www.desgoutsetdeslivr..
Commenter  J’apprécie          60
Si les maisons pouvaient parler ! Justement dans ce magnifique roman, Diane Meur donne la parole à une ancienne demeure située en Galicie.
Comme elle, ses habitants, Polonais, Austro-Hongois, nobles, roturiers, parvenus et finalement ruinés ont traversé les siècles. En 1820, Joseph, le chef de famille a épousé une jeune héritière pour devenir le maître de ce domaine ayant appartenu à ses ancêtres. Clara, mère de leurs cinq filles, déçu par l'égoïsme de son mari, a trouvé l'amitié, voir davantage, dans les bras d'un jeune amant. Joseph a découragé chacune de ses filles de s'épanouir. On s'attache particulièrement à Wioletta, la dernière maîtresse de cette maison qui a dû abandonner son enfant et vivre recluse, dans la honte du déshonneur, elle n'est plus que l'ombre d'elle-même, alors qu'elle avait tant d'atouts. Lorsqu'elle décide d'étudier l'histoire de sa famille, elle découvre les secrets. Toutes ces vies que la maison a abritées, sont aussi des ombres qui frôlent les vivants.
Ce roman est un tourbillon qui m'a enchantée. Pour prolonger le plaisir de l'écriture de Diane Meur, je vais relire « La carte des Mendelssohn » que j'avais apprécié.
Commenter  J’apprécie          30
L'histoire de cette famille polonaise –galicienne très exactement- nous est contée par celle qui a pu discrètement l'observer pendant près de deux siècles (18 et 19èmes) : la maison. Cela donne un roman feutré, où même les événements violents sont narrés avec détachement. Mais cela donne une force particulière au roman : on est vite pris dans l'ambiance de cette maison où les filles se retrouvent largement majoritaires. C'est que le patriarche Josef, modeste intendant qui a réussi à hériter ce domaine et ne rêve que de paraître « de la haute », n'a pas réussi par contre à avoir un héritier mâle . Et pour le contrarier davantage, une seule de ses cinq filles aura une vie « classique ». L'auteur s'attarde sur les drames que vivent ces personnages, drames souvent intériorisés. Elle le fait avec talent –l'écriture, très classique, est néanmoins prenante- et l'histoire mouvementée de la Pologne, qui sert de toile de fond au roman, rajoute encore de l'intérêt. Dommage quelques longueurs , mais cela se lit avec grand plaisir… et avec de nombreux retours à la page initiale qui présente l'arbre généalogique de la famille !
Commenter  J’apprécie          30
Que diriez-vous aujourd'hui d'une escapade au XIXème siècle, dans la province polonaise de Galicie, faisant alors partie de l'Autriche-Hongrie ? Les Vivants et les Ombres de Diane Meur nous dépeint avec brio l'ascension et la chute d'une famille polonaise, les Zemka, avec en fond historique les soubresauts de l'Histoire.
La première chose qui surprend en lisant ce livre, c'est le choix du narrateur (presque) omniscient : c'est en effet la maison, lieu de vie et de naissance de plusieurs générations de la famille Zemka, qui nous raconte l'histoire de la famille, avec souvent une liberté de ton, car ses murs capturent non seulement les discussions des maîtres, mais aussi leur non-dits et leur solitude, tout comme les coulisses du personnel.
Quand s'ouvre le récit, en 1820, nous faisons la connaissance de Joseph Zemka, fils d'un confiseur, qui reprend le poste d'intendant du domaine de la famille von Kotz, alors propriétaire. « Fameux laideron », se dit alors Joseph quand il fait connaissance de Clara, l'héritière du domaine… mais son côté énergique et opportuniste lui fait tout de suite comprendre l'intérêt de séduire la jeune femme. Ce serait pour lui l'occasion de récupérer le domaine qui, un temps, avait appartenu à un de ses ancêtres, le comte Ponarski. La jeune femme tombe rapidement sous le charme puis enceinte, et le jeune homme l'épouse.
Sous l'impulsion de Jozef, le domaine prospère ; une sucrerie voit le jour. Son seul souci : ne pas avoir d'héritier mâle. Les grossesses successives de Clara se soldent à son grand désespoir par la naissance de cinq filles. Des filles dont la vie occupent une large place dans le livre. Jozef ne pense qu'à leur trouver un bon mari, riche, qui les épouse le plus rapidement possible. Mais tout ne se passe pas comme prévu et de plus, la majorité d'entre elles ne peut choisir son destin.
Comme le révèle Olivia de Lamberterie sur la quatrième de couverture, « tous les ingrédients d'une saga familiale sont là : amours contre son rang, enfants illégitimes, liaisons fatales, grandes passions et basses manoeuvres ». Oui, ami(e)s lecteurs et lectrices, tout cela vous attend dans ce livre, mais pas seulement ! Il nous permet de revisiter l'histoire de cette région. La Pologne est alors découpée en trois parties (dont l'une est reliée à l'Autriche-Hongrie), des mouvements de lutte pour l'indépendance existent ; c'est la voie choisie par le frère de Jozef et son neveu. Même si l'action se passe souvent autour du domaine, on entend parler de l'occupation de Cracovie par les Autrichiens, Les mouvements sociaux se multiplient, et les paysans ruthènes s'en prennent à l'aristocratie polonaise. Il faudra attendre la seconde partie du siècle pour voir l'abolition des corvées. Enfin, à la fin du roman, il est fait mention de Jakob Frank, qui convertit les Juifs au christianisme, et qui servit de base au récent livre d'Olga Tokarczuk, Les livres de Jakob.
Excellente lecture donc ! Un seule mise en garde : au début du livre figure un arbre généalogique complet couvrant toute la période du récit. C'est une bonne aide, mais ne faites pas comme moi, qui commençai à l'éplucher un peu tôt, ce qui me fit découvrir des choses avant l'heure !

Lien : https://etsionbouquinait.com..
Commenter  J’apprécie          10


Lecteurs (285) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3230 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}