Des bateaux de pêche, hissant leurs voiles, s’éloignaient vers le large. Et, comme si elles étaient conscientes des regards qui se posaient sur elles, les voiles que le vent ne gonflait pas assez, se rabattaient sur les mâts qu’elles enveloppaient d’une langoureuse séduction.
Une femme n'est jamais autant grisée de bonheur que lorsqu'elle découvre le désir dans le regard d'un homme.
Laissant reposer sa tête sur le dossier du siège, il observa de coté la tête de Yasuko qui ballotait. Ne pouvait-il pas imaginer que c'était un garçon ? Ces sourcils ? Ces yeux ? Ce nez ? Ces lèvres ? Il fit claquer sa langue comme un peintre qui aurait raté plusieurs croquis successifs. Il finit par fermer les yeux et par tenter de se persuader que Yasuko était un homme. Mais cette immoralité de l'imagination transformait la belle jeune fille devant lui en quelque chose de plus difficile à aimer qu'une femme : une image grotesque perdant à mesure tout attrait.
- Il y a des jours comme ça, quand on est jeune. Des jours où l’on a l’impression que tous les hommes vivent comme des rats. Et où l’on n’a aucune envie de leur ressembler.
- Que faut-il faire dans de tels jours ?
- Il faut absolument ronger le temps comme un rat. Vous finirez par y faire un trou et si vous ne pouvez pas vous échapper, vous pourrez du moins y glisser le museau.
Le corps d'un homme est comme le moutonnement d'une plainte lumineuse sur laquelle on a une perspective parfaite. A la différence du corps de la femme , il n'offre pas l'étonnement de découvrir une petite source à chaque promenade, pas plus qu'une mine où, à mesure que l'on s' y enfonce, on aperçoit des cristallisations.
Quand on pense au bonheur d'autrui, on rêve sans le savoir à une forme d'accomplissement de son propre bonheur, ce qui, tout compte fait, rend plus egoïste que si l'on se souciait de son propre bonheur.
Il faut savoir parfois abandonner son travail.
Le vice qui a perdu son éclat est cent fois plus ennuyeux que la vertu qui s’est ternie. Probablement la raison pour laquelle le vice est considéré comme une faute tient-elle à cet ennui de la répétition, qui ne tolère même pas un instant de répit et contentement. Si le diable s’ennuie, c’est précisément parce qu’il est lassé de l’originalité éternelle qu’exige le mal.
Bien qu'il y ait une indéniable gradation dans l'univers homosexuel, aucun homme ne résiste totalement à la force mystérieuse qui l'entraîne malgré lui dans la fange de la sensualité. Personne ne peut rompre avec la proximité de la confrérie. D'autres ont parfois tenté de la fuir. Mais ils finissent à en revenir à ces poignées de mains gluantes, à ces clins d'œil visqueux. Ces hommes qui n'ont fondamentalement aucune des qualités requises pour fondre un foyer doivent, s'ils veulent capter une infime lueur qui évoque ce foyer, la rechercher dans ces regards troubles en disant : " toi aussi, tu es des nôtres. "
Par exemple, le responsable le plus caractéristique qui met en mouvement et domine la réalité c'est le "peuple". Or, quand il s'agit d'expression, on ne peut pas la mettre rapidement en mouvement. C'est aux artistes que la charge en revient.