Projet ambitieux, que cette saga des émigrants écrite par l'auteur suédois
Vilhelm Moberg. Après avoir dépeint le misérable mode de vie des paysans du Smaland au milieu du 19e siècle, qui a poussé à vouloir tenter leur chance aux États-Unis, le voici qui décrit la pénible traversée de l'océan. le brick Charlotta, commandée par le capitaine Lorentz, transporte 78 passagers partant pour l'Amérique du Nord. Des pauvres gens qui n'ont jamais mis le pied sur un navire ni vu le grand océan. Tout un choc !
Marcher sur un bâtiment qui tangue ; surpasser le mal de mer ; survivre avec de maigres rations ; viter de penser aux regrets de tout abandonner derrière soi... Ouf ! Karl Oskar Nilsson, son épouse Kristina, son frère Robert et tous leurs amis ne l'ont pas facile dans ce deuxième tome, justement intitulé «La traversée». Les premiers jours sont marqués par ces difficultés et la nouveauté, mais l'ennui se faire sentir très, très rapidement. « Quarante pas de long sur huit de large. » Et cela pendant au moins huit semaines, si les vents … Plafond bas, air poussiéreux qui prend à la gorge, saletés.
Certains essaient d'apprendre l'anglais, essaient de se divertir alors qu'ils sont confinés dans l'entrepont. Avec une telle promiscuité, pas étonnant qu'on se chamaille. Les poux font leur apparition… puis le scorbut… Certains passagers en sont très malades, d'autres meurent. Pas tout le monde arrivait à destination. Kristina est fort malade : le scorbut. On craint pour sa vie, s'en sortira-t-elle ? Un roman qui se veut aussi près de la réalité ne peut se terminer trop bellement, des personnages important doivent périr… Même si près du but.
La plume de
Moberg est très réaliste. Pas d'envolée lyrique ni d'embellissement poétique de la vie sur un navire. Que du vrai ! C'est pourquoi vers le milieu du roman que commençais à m'ennuyer légèrement, à l'image des personnages qui devaient se désespérer. Ainsi, quand le moral des voyageurs est au plus bas, qu'il n'y a plus à faire outre que fixer l'horizon toujours identitque, un oiseau fait son apparition. « La soudaine apparition de cet animal sur le pont leur fit l'effet d'un miracle de la Bible. » (p. 214) C'était la lumière que, moi aussi, j'attendais.
Puis, tout déboule. « La veille de la Saint-Jean de l'an 1850, le brick la Charlotta, port d'attache Karlshamn, vint s'amarrer dans le port de New York, après exactement dix semaines de traversée. » (p. 267). Ainsi se termine un passage difficile mais aussi ainsi s'ouvre un nouveau chapitre de leur vie. J'ai hâte de découvrir leurs nouvelles aventures sur cette américaine à laquelle ils rêve depuis longtemps et pour laquelle ils ont tant sacrifié.