AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Simon Corthay (Traducteur)
EAN : 9782330144319
300 pages
Actes Sud (06/01/2021)
3.97/5   15 notes
Résumé :
Le narrateur est un jeune homme de 26 ans, apathique, dépressif, qui se sent totalement étranger dans son milieu familial comme parmi ses collègues de la Compagnie pétrochimique qui l'emploie depuis qu'il a obtenu sans enthousiasme son diplôme universitaire. Lecteur assidu, il s'isole avec ses livres, s'identifiant aux personnages de Kafka, Hemingway, Knut Hamsun, Tanizaki et bien d'autres. La lecture du Journal de Kafka l'incite à consigner ses sensations et ses ré... >Voir plus
Que lire après Le cas critique du dénommé KVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Le narrateur est un jeune homme apathique et dépressif : un peu écrasé par sa famille, un travail inintéressant au possible, sa routine consiste à en faire le moins possible, éviter tout le monde, et se réfugier dans la lecture. Il n'a finalement qu'un seul rêve : produire un jour une oeuvre aussi intéressante que les grands auteurs qu'il admire (Kafka, Hemingway…). Seulement voilà : sa vie est morne et sans intérêt, et il désespère de pouvoir vivre quelque chose de grand, ou de dramatique, qui pourrait lui donner l'inspiration dont il a tant besoin.

Aussi, quand on lui diagnostique une leucémie, c'est presque la joie qui domine : la maladie lui donne déjà l'occasion de remettre à leur place famille et collègues, obligés de faire profil bas devant un grand malade ; et enfin, enfin ! Il va pouvoir puiser dans ses souffrances pour produire un texte littéraire de qualité.

Ses espoirs (si on ose les qualifier ainsi) sont cependant vite douchés, car la maladie n'a pas l'intention de jouer les faire-valoir artistiques. Plutôt que l'inspiration libératrice, ce qui s'installe, c'est la faiblesse, la dépendance envers les autres, la déshumanisation progressive en ne devenant qu'un corps à soigner dans les yeux d'autrui, qui savent très bien qu'un retour à une vie normale n'est de toute façon plus à l'ordre du jour.

Le livre n'est toutefois pas si sombre. Si la description de l'évolution de la maladie paraît terriblement réaliste, le roman est servi par un humour noir assez fin, et un goût pour l'absurde assez plaisant. Les références à Kafka comme auteur favori du narrateur, le K. dans le titre, prennent tout leur sens quand l'auteur décrit les aberrations bureaucratiques des grandes entreprises ou des services d'oncologie.

J'étais très loin de m'attendre à ce type de roman en m'aventurant dans la littérature saoudienne ! Très moderne, très frais : une vraie belle découverte !
Commenter  J’apprécie          150
En un journal intime, égrenant d'abord, semaine après semaine, puis de manière de plus en plus espacée, un quotidien morne fait d'un travail alimentaire aliénant, d'un manque de considération familiale, d'une maladie brutale, mais, heureusement aussi, d'une vie faite de lectures et d'écriture, le narrateur, K, bien sûr en référence à Kafka - tout comme le reste de son quotidien d'ailleurs - vingt-six ans, décrit donc, de manière parfois clinique, avec souvent beaucoup d'humour, bien que cinglant, son existence, mais aussi, à travers elle, celle de l'Arabie Saoudite.

Beaucoup de dérision envers la société saoudienne, beaucoup d'autodérision également, beaucoup de questionnements sur le sens de la vie, sur son intérêt, sur la mort, sur le pouvoir de la lecture, de l'écriture, en un peu plus de 350 pages, très riches, qui se lisent avec facilité et plaisir, malgré la gravité et la tension des sujets souvent évoqués - où l'on comprend mieux pourquoi notre narrateur est un grand lecteur des auteurs russes du XIXème siècle et, plus encore, du plus célèbre auteur tchécoslovaque encore actuellement.

Une très belle découverte, plus qu'inattendue.
Commenter  J’apprécie          160
Le cas critique du dénommé K ne répond pas précisément à l'idée que l'on se fait de la littérature saoudienne, si tant est que l'on puisse émettre un avis, vu le peu de traductions disponibles en français, en provenance des Pays du Golfe. le livre d'Aziz Mohammed, auteur né en 1987, est d'emblée surprenant par sa tonalité désinvolte et cynique, avec un narrateur qui ne cesse d'évoquer Dostoïevski, Hemingway et surtout Kafka, n'éprouvant dans sa vie quotidienne qu'ennui et mépris pour ses contemporains. Quand le roman décrit le monde du travail, c'est un pur délice de mauvaise foi, avec des comportements pas si différents de ceux que l'on connait en Occident. le dénommé K. (toujours la référence à Kafka) est un type de 26 ans que l'on peut qualifier d'asocial et de vaguement dépressif, en tous cas en proie à un spleen continuel. Et ce n'est pas les relations familiales qui le rendront heureux, eu égard à ses rapports conflictuels avec sa mère, son frère et sa soeur. K. est un vilain petit canard, sans beaucoup de goût pour la vie. Toutes les pensées plus ou moins philosophiques de ce sombre héros sont très drôles, la plupart du temps, l'auto-dérision faisant partie de ses caractéristiques. A partir du moment où une grave maladie frappe K., une leucémie, ce n'est pas rien, le ton du livre n'évolue pas tant que cela mais s'enrichit de nouvelles facettes, à commencer par une lucidité impressionnante. Et c'est avec un luxe de détails concernant l'évolution du mal que Mohammed étonne encore, comme s'il avait véritablement vécu cette épreuve. le cas critique du dénommé K. est le premier roman d'Aziz Mohammed, publié en 2017 en arabe. Sa biographie indique qu'il est poète, nouvelliste et critique cinématographique. Espérons qu'il persévérera dans le roman, un domaine où son talent est indubitable.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
Commenter  J’apprécie          160
Tour de force réussi pour cet auteur qui dissèque avec élégance et précision l'état d'esprit d'un jeune homme asocial pour qui l'enfer c'est les autres mais aussi les ravages sur l'esprit que produit la maladie mortelle que certains ont tirée dans les cartes qui leurs sont attribuées. La langue est belle et la traduction sans aucune doute de très haut niveau. Il me semble que pour des raisons purement éditoriales nous avons un "happy end", mais deux cents pages de plus sur le même ton ne m'auraient pas dérangé. Cette lecture est plutôt éprouvante. Je suggère d'y aller à petites doses mais la récompense est au bout: lorsqu'on appuie où ça fait mal on touche à l'universel. (simple opinion)
Commenter  J’apprécie          140
Un jeune homme taciturne que tout semble oppresser, son travail et sa famille inclus, passe ses journées à lire de grands écrivains occidentaux et à rédiger des nouvelles sur son ordinateur, jusqu'au jour où il apprend que ses faiblesses récurrentes passagères sont en réalité dues à un cancer.

Doté d'une ironie subtile et d'un caractère épouvantable, le narrateur tente tour à tour d'encaisser le choc de cette nouvelle, puis d'en jouer pour mettre mal à l'aise ceux qui le prenaient de haut jusque-là ; mais cette illusoire liberté s'estompe lorsque les chimiothérapies s'enchaînent.

Au-delà des réflexions personnelles du narrateur et l'amusant trio que forment la narration en tant que telle, les sources littéraire auquel le narrateur fait abondamment référence, et les nouvelles qu'il écrit et dont il nous livre parfois le contenu, le cas critique du dénommé K décortique la descente aux enfers d'un homme qui doit d'une part supporter le monde médical et l'environnement hospitalier, où médecins, infirmières et patients se succèdent sans qu'on y trouve beaucoup d'humanité, et de l'autre une famille saoudienne oppressante qui attend de lui une dignité conforme aux normes sociétales, et ce jusque dans sa maladie. Tant et si bien que l'on se demande parfois ce qui emprisonne le plus le narrateur : sa maladie, ou sa famille...

Un beau roman qui porte un regard acéré et ironique sur la maladie, mais qui émeut par l'impuissance qu'il décrit. On glane également ça et là des informations sur la société saoudienne qui semble, à la lecture d'Aziz Mohammed, finalement pas si éloignée de la nôtre.

Une belle découverte.
Commenter  J’apprécie          80

Citations et extraits (84) Voir plus Ajouter une citation
Je suis né réservé, et puis, armé de mes instincts défensifs, je me suis battu, année après année, pour m'isoler toujours plus. Je me suis exercé à me passer des autres, je me suis exilé derrière un mur d'acrimonie, dans l'idée sans doute, de me rendre moins vulnérable. J'ignore quelle force j'ai cru pouvoir en tirer tout au long de ces années car la vie n'a jamais été simple ni ne m'a ménagé, eu égard à mes faiblesses, tout pesait chaque jour davantage sur mon coeur comme une lourde chape, et en particulier ce qu'il y avait de plus insignifiant.
Je me mets soudain à remonter le fil de ces événements qui, peu à peu, ont posé les jalons de ma fragilité; de cette nature qui ne pouvait que me conduire sur la voie de l'infirmité. Il n'en faut pas plus pour que je fonde en larmes à nouveau.
Commenter  J’apprécie          90
Le pire dans tout ça, je le sais à présent, n’est pas la nuit de l’exécution, mais cette attente longue et pesante non dénuée d’espoir. Avant sa mise à mort, le condamné reste enfermé au moins six mois, durée suffisante pour imaginer qu’une grâce ou un allègement de peine puisse intervenir. Mais c’est bien là le pire espoir qui soit, celui dont vous savez qu’il ne se réalisera vraisemblablement pas et qui vous interdit en même temps toute résignation. Vous vous laissez alors aller à des comportements violents et irresponsables, pour tenter de mettre autant de distance que possible entre vous et le sort qui vous attend. Cette attente ne vous confère pas de clairvoyance particulière ni d’acuité intellectuelle accrue, elle ne fait pas jaillir en vous des flots d’aphorismes impérissables, il n’y a pas de révélations fulgurantes à l’approche de la mort, rien qu’une expectation angoissée qui vous ronge l’esprit et vous le laisse à vif, vide. 
Commenter  J’apprécie          60
[L'oncologue] m'a présenté des documents qu'il m'a demandé de signer. Certains contenaient une longue liste de risques et de complications liés au traitement qu'il me fallait accepter et qui venaient s'ajouter aux effets secondaires classiques ; le champ de ces risques était très vaste, il comprenait altération de la fonction hépatique, insuffisance rénale, troubles cardiaques, impuissance, stérilité – engageant, n'est-ce pas ? –, mais aussi pertes de mémoire, troubles cognitifs ou encore diminution de l'acuité auditive et visuelle, mais la palme revenait à ce dernier point : probabilité de développer un autre cancer, généralement un autre type de leucémie, conséquence des effets toxiques des agents chimiques.

Donc, le principe de l'opération est de vous empoisonner en espérant que les substances toxiques tueront les cellules cancéreuses avant de vous tuer, vous. Et dans le cas où ce "traitement" vous guérirait de votre cancer, il y a des chances, précisément à cause de la toxicité de ses composants, qu'il vous amène à en avoir un nouveau. Fabuleux, j'ai signé sans même terminer la lecture. Il s'est mis alors à me passer document sur document, l'un l'autorisant à faire ce qu'il jugerait bon si, en situation d'urgence, je n'étais pas en mesure de prendre moi-même les décisions, l'autre le déchargeant de sa responsabilité dans lesdites décisions, des feuilles roses, puis des jaunes ou encore des bleues, à peine en avais-je signé une qu'il me passait déjà la suivante, relative à tel ou tel examen ou aux éventuelles interventions d'urgence ; il me disait de quoi il retournait et je signais tout de suite, pour en finir au plus vite, comme si, ce faisant, je me débarrassais de l'examen ou de l'intervention en question.
Commenter  J’apprécie          20
[Le médecin] me demande de résumer mes longues descriptions par un chiffre sur une échelle d'évaluation de la douleur. Il m'indique la feuille affichée sous la lampe du lit : "A quel point avez-vous mal ?"

Pour répondre, il faut choisir un chiffre entre zéro et dix. Je n'ai aucune expérience sur laquelle m'appuyer pour l'évaluer, mais il y a des smileys censés aider à le faire. Pour le numéro 8, le visage arbore une moue chagrine, pour le 10, la bouche est encore plus tombante et des larmes coulent des yeux. L'idée d'être associé à l'une de ces expressions m'inspire le dégoût, ce dégoût constant de l'exagération. J'opte pour le 6, un visage un peu maussade, pour en garder sous le coude en prévision de souffrances à venir. Je comprends à la réaction du médecin que j'aurais dû choisir un numéro plus élevé : le visage maussade n'est pas incompatible avec un début de chimiothérapie à la fin de la semaine.
Commenter  J’apprécie          30
On se surprend soi-même par ses capacités à endurer, à passer de longues années, que dis-je, des décennies entières, dans le même état provisoire, dans la même situation inconfortable; tout ça pour s'apercevoir au bout du compte, que si vous en avez effectivement fini avec tout ça, c'est uniquement pour mourir. Et qu'est-ce qu'on pourrait bien faire d'autre?
Commenter  J’apprécie          70

autres livres classés : littérature saoudienneVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Lecteurs (47) Voir plus



Quiz Voir plus

Compléter les titres

Orgueil et ..., de Jane Austen ?

Modestie
Vantardise
Innocence
Préjugé

10 questions
20235 lecteurs ont répondu
Thèmes : humourCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..