Lecture Jeune, n°130 - juin 2009 - Comment, dans les pratiques culturelles et ludiques du quotidien, se construit l'identité sexuée des petites filles d'aujourd'hui ? Comment un apprentissage, que l'auteur qualifie d'« insensible » et d'« invisible », est-il à l'oeuvre, conduisant à un processus d'intériorisation des dispositions féminines ? L'enquête de Catherine Monnot, doctorante en anthropologie à l'EHESS, « se fonde sur des observations et des entretiens réalisés depuis 2002 dans la cour de récréation, mais aussi en milieu extrascolaire et domestique, auprès d'une dizaine de filles de CM2 entre 9 et 11 ans. Différents milieux sociaux sont étudiés, mais le terrain principal est celui de l'école primaire d'une petite station balnéaire du Sud de la France, d'origine populaire et relativement enclavée au sein d'un environnement semi-rural ». Ces enfants rejettent le qualificatif de « petites filles » et souhaitent se vivre comme des préadolescentes. Elles construisent autour d'activités partagées - danse, maquillage, papotage... - une culture commune, éloignée de celle des garçons, des petits et des adultes, qui doit les faire accéder au statut de « grande ». Car la culture médiatique, mais également leur environnement social - notamment leur mère - semble les amener à une quête constante de l'apparence, du « joli », conduisant parfois à une érotisation précoce. La télévision - plus regardée par les filles - mais surtout la musique et ses jeunes starlettes, leur offre des modèles d'identification allant en ce sens. L'ouvrage n'apporte pas d'éléments d'analyse réellement nouveaux quant à la construction de l'identité des jeunes à l'heure des industries culturelles de masse et de l'influence des pairs. Il constitue une bonne synthèse et ses conclusions interpellent et inquiètent, amenant chacun à s'interroger sur ses propres représentations et comportements... L'apport sur la musique est riche et intéressant - c'est l'objet de la thèse de doctorat de l'auteur par ailleurs - mais on aurait aimé une analyse aussi poussée des programmes télévisuels, de la presse ou des débuts de ces petites filles sur Internet - simplement évoqués. Hélène Sagnet
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