Elle vivait dans l'angoisse des événements, et en même temps dans l'espoir de nous retrouver.
Déjà plusieurs mois s'étaient écoulés depuis notre arrestation. De ce qui avait été avant, tout me paraissait lointain et comme un rêve...
Rien de plus navrant que de voir des enfants souffrir. Par les temps qui courent on ne peut, hélas, faire autre chose pour soulager les souffrances que d'exprimer des souhaits...
Tout le monde fut réveillé, sauf nous, qui dormions profondément, comme seuls les enfants dorment.
Ce fut comme une fête, c'était la fête d'être encore tous ensemble.
Ma mère, qui attendait alors la naissance de ma petite sœur, était épuisée.
Il en était ainsi de presque tous les enfants qui étaient internés, comme les quatre mille qui, en deux semaines, sur l'initiative du gouvernement français de Vichy, et en particulier de son président Pierre Laval, étaient arrivés avant nous, arrachés à leurs parents, simplement parce qu'ils étaient juifs. (p.81)
Elle vint trois fois au cours de notre internement, et eut la possibilité de nous vous voir une fois, vision pénible dont sa mémoire et celle de sa fille, à peine pus âgée que moi, et qui l'accompagnait, ont gardé le souvenir de la tristesse de nos regards et de notre état de dénutrition et de misère. (p.83)
On se jeta sous un vieux tapis, serrés l'un contre l'autre. J'avais l'impression d'entendre des camions dont le moteur tournait sans cesse près de nous. Comme le camion qui avait emmené mon père et mes oncles.[...] qui fouillaient les moindres recoins et les violents coups de bottes qui faisaient vibrer le plancher, les coups de bottes dans tout...jusqu'à ce qu'ils me touchent et que je crie.
On parlait souvent d’un endroit où nous irions peut-être après Drancy, qui s’appelait Pitchipoï. Peut-être y retrouverions-nous nos parents ? C’était un lieu mystérieux où certains étaient déjà partis, mais personne ne semblait en avoir de nouvelles. C’était à la fois la promesse de la liberté et l’angoisse de l’inconnu. Pitchipoï revenait souvent dans les conversations. On était toujours un peu en partance pour Pitchipoï.