Elle s'approcha doucement, posa sa main au creux de mon coup et avec la lenteur d'une caresse, déposa un baiser sur mes lèvres. Sa bouche était fraîche et sucrée. Je frissonais sous l'effet de la surprise et marquai un imperceptible recul. Puis je sentis mon coeur s'emballer, réveillant en moi des sentiments éteints depuis longtemps. Et si au début , ce baiser innatendu semblait m'avoir été extorqué, je n'avais à présent plus aucune envie de le rompre.
C'est plus facile de se détruire à petit feu que d'avoir le courage de se remettre en cause, n'est-ce pas ?
Je levai la tête et compris alors que l'existence venait de m'offrir une seconde chance.
- Au fait, j'ai vérifié à la réception. Tom est bien descendu à l'hôtel avec son "amie".
- Je sais, j'ai fait mon enquête : suite n° 12, deux lits séparés.
- Ça te rassure, les deux lits séparés ?
Elle soupira :
- Quand tu t'y mets, tu es encore plus con qu'un balai sans poils...
Vivre dans la fiction n'est pas une solution de long terme, pas plus que de prendre de la drogue ou de se soûler pour oublier sa misère.
On n'y peut rien : à un moment ou à un autre, la vie réelle finit toujours par reprendre ses droits sur l'imaginaire.
Comme le photographe qui échoue à saisir une image évanescente qui ne se présentera plus jamais, j'avais laissé passer l'instant décisif, celui qui aurait pu faire basculer ma vie du côté des rires et de la lumière...
- Faut vraiment arrêter la fumette et les alcools forts, Milo. Quand tu dis des conneries pareilles, j'ai envie de...
- De quoi ?
Elle secoua la tête :
- J'sais pas, de... de t'éviscérer pour te faire crever à petit feu avant de te cloner à dix mille exemplaires pour mieux pourvoir tuer de mes propres mains chacun de tes dix mille clones dans les souffrances les plus atr...
- Ça va, la coupa-t-il. Je crois que j'ai saisi l'idée générale.
Les amis sont les anges qui nous soulèvent lorsque nos ailes n'arrivent plus à se rappeler comment voler
" 1983: un cadeau d'anniversaire offert par Stella: une boussole qu'elle avait acheté en Sardaigne, gravée de l'inscription: POUR QUE LA VIE TE RAMÈNE TOUJOURS A MOI"
Je lui caressai le visage et lui confiai :
- Tu m'as sorti du trou noir dans lequel j'avais glissé. Tu as fait reculer pas à pas le chagrin qui me dévorait. Avec ton rire et ta mauvaise foi, tu as vaincu le silence qui m'emmurait...
Elle chercha à dire quelque chose, mais, le souffle court et la respiration saccadée, elle dut y renoncer.
- Je ne vais pas t'abandonner, Billie. Je t'en donne ma parole, lui assurais-je en lui prenant la main.