Je suis navrée de mettre une note si basse et de m'apprêter à critiquer cet ouvrage parce que, étant ancienne étudiante en prépa littéraire, comme
Arthur Nesnidal , j'ai beaucoup de sympathie pour lui. Mon grand-père, après avoir lu un article dans le journal, m'avait demandé de lire ce livre puis de lui donner mon avis : inquiet, il voulait savoir si j'avais vécu le même enfer que l'auteur, il voulait savoir si c'était vraiment ça, la prépa. J'avais hâte de retrouver mon expérience dans un livre, j'avais hâte de lire pour la première fois quelque chose sur la prepa littéraire. Donc je l'ai lu.
Tout d'abord, j'ai sauté tellement de pages... Quelle plume étouffante, quel style lourd ! C'est ce qui m'a immédiatement marquée dès la première page. On croule sous les métaphores et les périphrases, les phrases à rallonge, le lyrisme maladroit, les références culturelles qui parlent seulement à une élite intellectuelle, les mots inconnus et obsolètes, on en vient à oublier ce dont il parlait à l'origine. Les vestiges de la prepa sont bel et bien là, Arthur n'en a gardé qu'un goût pour l'écriture soignée apparemment. Déçue car il critique la prépa mais agit comme un prof en employant du vocabulaire compliqué à dessein... Pourquoi ? C'est trop, ça ne va pas. Un tel témoignage aurait, je pense, été bien plus marquant avec une plume légère, qui ne passe pas par tous ces détours stylistiques et grammaticaux, je me suis sentie extrêmement mise à distance de l'auteur, je n'arrivais pas à entrer en empathie avec lui. Les mots faisaient barrière.
Ensuite, certes, chaque établissement de prépa est différent. Alors que je pensais avoir passé deux années difficiles dans mon établissement à Lyon, il semble que, comparé à Arthur, j'ai été scolarisée au paradis ! Quel est ce véritable enfer qu'il écrit ?? Je ne remets pas en doute la parole de l'auteur mais quand même... Aucun point positif, vraiment ? Aucun ? Qu'un tel enfer existe me semble aberrant. Et grave. Des professeurs monstrueux, des élèves dont on a lavé le cerveau et
qui doivent être renvoyés chez eux à la limite de la démence , des cantines et des internats immondes,
(la fille qui pleure et qui dit "jure-moi que tu ne diras rien !" avant de s'enfuir, le pauvre Arthur qui est apparemment le seul à tenir tête, la" brebis galeuse", "le vilain canard")
Je ne sais pas. Je ne souhaite pas que le public, après la lecture de cet ouvrage, pense que toutes les prépa sont comme ça. Apparemment Arthur est tombé sur un établissement assez horrible. Mon expérience fut difficile mais pour rien au monde je ne regretterais d'être passée par là. Des profs sévères et exigeants, mais généreux, respectueux, encourageants, se donnant corps et âme pour nous. Des élèves fatigués, parfois brisés, mais soudés par les rires, les soirées, l'entraide, le goût commun pour les études. Etc... Bon, par contre, une directrice monstrueuse, que j'ai clairement retrouvée avec joie dans
La Purge.
En somme, je suis assez déçue. Je respecte énormément
Arthur Nesnidal pour ce qu'il a fait, je suis désolée en pensant à ce qu'il a pu subir... Mais je pense que son livre aurait pu être plus incisif, mieux brodé et agencé sans toutes ces lourdeurs. Je n'ai pas la prétention d'écrire mieux, il est de deux ans mon aîné et nous avons suivi un parcours quelque peu similaire, mais je lui en veux parce qu'il aurait pu se faire meilleur porte-parole (il explique, dans le livre, vouloir justement se faire la voix dénonciatrice pour tous ceux et toutes celles qui subissent, muets/muettes une telle torture).
Voilà. Avec cet amour pour l'écriture dont fait preuve, sans doute possible, l'auteur, il devrait écrire de la poésie en prose voire des nouvelles, cela pourrait être très fructueux