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EAN : 9782876788664
144 pages
L'Aube (06/06/2003)
4.25/5   2 notes
Résumé :
Sous-titre : Une incursion subjective au pays des Aroumains
(traduction du roumain, notes et commentaires de Marianne Mesnil)
Quatrième de couverture :
" On mangeait avec la main ; Grand-Mère utilisait quatre doigts, les deux index et les deux pouces. Lorsqu'elle terminait de manger, elle les essuyait avec son mouchoir. Elle mangeait plus proprement qu'un chat et ne laissait pas de miettes. A table, on s'asseyait par terre, à la turque. (...) La... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le sous-titre de ce livre est très important : « Une incursion subjective au pays des Aroumains ». Il s'agit aussi d'un paradoxe, car ce peuple de nomades n'a pas de pays au sens administratif du terme.
Mais, « de part et d'autre du Danube, Roumains et Aroumains sont aujourd'hui les seuls, dans cet orient de l'Europe, à parler une langue issue du latin » (p. 11).
Marianne Mesnil la traductrice du roumain de ce livre et professeur honoraire à ULB de Bruxelles entretenait avec Irina Nicolau une relation très forte d'amitié. Cette dernière était une personnalité importante en Roumanie : ethnologue de formation elle a été cofondatrice avec le peintre Horia Bernea (1938-2001) du Musée du paysan roumain de Bucarest.
Pour elle, « L'ethnologue est un voyageur aux semelles de miroir… » : « Mais qu'est-ce qui peut bien pousser les gens sur les routes ? La misère, les épidémies, les guerres, les génocides, les catastrophes naturelles, un pèlerinage, une cure, le compagnonnage, le commerce, la diplomatie, l'éducation, le tourisme, le journalisme… Et l'ethnologie. Les uns partent sans espoir de retour. Les autres s'en reviennent. Généralement les ethnologues en reviennent (à moins qu'ils ne décident d'épouser leur terrain). L'ethnologue est un voyageur aux semelles de miroir qui rêve à un pays de nulle part qui existerait quelque part… »
Un volet important donc de la démarche intellectuelle de Irina Nicolau sont ses écrits sur les Aroumains. Au nombre de trois, ils occupent une place de choix dans son oeuvre publiée. Deux d'entre eux ont joué un rôle décisif dans le renouveau de l'intérêt pour la question aroumaine. Il s'agit de sa communication sur les « Caméléons des Balkans » parue en français en 1993, et le présent livre « Haide bre! incursiune în lumea aromânilor » paru en roumain en 2000. Il faut préciser de suite que le père de Irina Nicolau était Aroumain.
Je reprends ici le sommaire, car il vous permet de vous forger une idée sur la qualité documentaire de ce livre fort, dédié à une père auquel Irina Nicolau a su prêter l'oreille pour tenter ensuite « de sauver la mémoire d'une tradition orale en train de disparaitre », hélas.
L' Avant-propos, signée de Marianne Mesnil qui a également rédigé de nombreuses notes et des commentaires très éclairants comporte quatre parties : Comment nous avons traduit ce livre (préface de 2003) – D'où viennent les Aroumains ? – Premiers témoignages de la présence des Aroumains au sud du Danube – Ethnonymes endogènes et exogènes
Le voyage proprement dit se divise quant à lui en deux parties :
I. Premiers pas
La tante Pépo – Branle-bas sans combat – Digression – Guerriers et voleurs – Dans le miroir – Les gardiens de l'ordre – À table – Mécènes – du sentiment d'orgueil – du sentiment de confiance – du sentiment de honte – Démesures – de l'art de la réconciliation – de l'art de se vêtir – Les hommes sous les arbres et les femmes à la fontaine – Visites – La noce de Marucha – Digression sur le mariage et la mort – Pèlerinage à Jérusalem – Grand-mère Caterina – Des bergers dans la ville – Tirer profit de la maison – Les photographes des Balkans – Médecins et guérisseurs – Les marchands – Les artisans – Les popes, Rome et l'islam – Histoire du grand bélier noir – Routes et voyages – Des écoles et des alphabets – Habiles à tout faire 
II. Villes et bourgades : Aminchiou (Aminciu)/Metzovo (Mezzovo) – Arbanach (Arbanasi) – Avdela – Bitolia (Bitola) – Càlàrou – Castoria – Coritsa – Crouchova – Frachari – Fourca (Furca) – Gopech – Gramoste – Jannina (Ianina, Ioannina) – Livàdzi – Moulovichte (Muloviste) – Moscopol – Nevesca – Ohrida – Perivoli – Perlepe – Samarina – Sàracou – Sarajevo – Skopje – Veles – Venise – Veria – Zagore 
* Épilogue
* Les livres dans lesquels j'ai picoré
* Glossaire
* Irina Nicolau : une décennie de publications
Écrit à la première personne, le récit est dynamique et très vivant, car Irina Nicolau sait interpeller son lecteur directement pour éveiller sont intérêt pour les traditions et les lieux évoqués. On lit ce livre presque comme un roman historique où un « exotisme » tendre est au rendez-vous. J'ai apprécié l'amour sincère d'un peuple qui dépérit.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
[François Charles Hugues Laurent] Pouqueville prétend que les Aroumains qui avaient voyagé, parlaient une multitude de langues et que l'on trouvait chez eux de riches bibliothèques à même de dépanner le voyageur raffiné qui avait dû se limiter à quelques livres jetés dans ses bagages. Le Français précise qu'il y découvrait des éditions sérieuses de classiques grecques ou de littérature française ; et la manière dont il rapporte ces faits laisse supposer que ce genre de bibliothèques ne constituait pas une exception.
Bien que l'amour des Aroumains pour les livres me remplisse de fierté, je ne parviens pas à me représenter ceux qui possédaient de telles bibliothèques. Ce n'était ni les professeurs, ni des écrivains et je ne comprends pas où ils trouvaient le temps de lire et quelle était la place qu'ils réservaient au livre dans leur vie active. Et dès lors qu'ils lisaient, disons des classiques grecs, avec qui pouvaient-ils les commenter ? Et après avoir jonglé avec les subtilités du grec littéraire, comment revenaient-ils à la langue aroumaine ? Ne la ressentaient-ils pas alors comme un vêtement de l'enfance qui aurait rétréci et dans lequel les grandes idées trouvaient difficilement à
s'exprimer ? Mais peut-être que j'ai tort et que ce n'était pas un vêtement, mais plutôt une forteresse, ou si vous ne voulez pas de la forteresse, alors, une montagne, ou un couteau, une arme simple et dangereuse qui possède sa vie propre, comme les poignards de Borges. La langue aroumaine était le couteau qu'il faut cacher sous le vêtement, sur la poitrine.
(p. 101-102)
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Celui qui omet de parler de lui-même reste dans l’histoire à travers ce que les autres veulent bien en dire.

(p. 167)
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Lorsque la psychanalyse nous montrera que les cultures, et pas seulement les hommes, sont marquées par des complexes, le diagnostic que je propose maintenant sortira du registre de la simple métaphore. Je pense en effet que la culture aroumaine souffre du complexe de l'Atlantide. Ce complexe est typique des cultures qui répondent à des pulsions qui nous sont inconnues, et brillent dans l'histoire écrite… par leur absence.

(p. 167)
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