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sur 322 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
A la mort de l'auteur, j'ai réalisé que je n'avais lu aucun de ses ouvrages. "Au plaisir de Dieu" est donc le premier mais probablement pas le dernier.
Une écriture à la fois complexe et alerte, pour conter, avec un détachement certain, l'histoire d'une famille, aristocratie en déclin, à la fois coupée des évolutions de la société, et en même temps traversée par elles.
Ce n'est pas facile à lire ; il faut y mettre du temps et y chercher du plaisir... Mais on ne le regrette pas.
Deux choses assez extraordinaires :
- en lisant le texte de Jean d'Ormesson, je l'entendais dans les émissions de
Bernard Pivot, à la télé des années 80. Il écrivait un peu comme il parlait, avec grâce.
- une grande modernité : à la fin du roman, les aventures d'Alain, écrites au début des années 1970, nous rappellent celle des enfants perdus de l'islamisme du début des années 2000... Eternel recommencement ?
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Au plaisir de Dieu, c'est le récit d'une famille et le récit de sa mort, mais aussi le récit du dernier siècle qui par ses transformations a accéléré cette fin. Au plaisir de Dieu, c'est aussi très difficile à résumer tant il s'agit d'une oeuvre riche que j'ai trouvé passionnante. Il y a de l'ironie, de la grandeur et de la petitesse, de la douleur et de l'orgueil. Il y a une certaine forme de tragédie aussi. L'avouerai-je? A trois reprises, j'ai pleuré, mais je ne vous dirais pas où!
La famille du narrateur a participé à l'épopée de la France bien avant que celle-ci trouve sa forme moderne. Ils mourraient pour Dieu et le Roi, ils étaient grands parfois, terribles souvent, ils étaient catholiques ou de la Réforme, ils s'étaient réinventés dans des branches aux quatre coins de l'Europe, ils étaient plein de panache souvent, mais bien rarement de génie. Mais surtout ils étaient une famille et leur nom était leur bien le plus précieux. Leur nom, et puis Plessis Les Vaudreuil, le domaine familial où on revenait mourir, ou plutôt s'endormir dans le giron de la sainte mère Église.
Seulement le monde a changé et il n'est plus question de nos jours de mourir pour le Roi et pour Dieu. le Roi de toute façon....Un Orléans, pouah!!
Quant à Dieu, il semble bien décidé après avoir été leur devise pendant des siècles, à les abandonner. Au sein même de la famille, les dissensions commencent, tandis que la politique et l'histoire les rattrapent. Et si avant on mourrait pour la France par habitude, même la France Républicaine, voici que les fils de la famille se retrouvent dans des camps opposés dans la guerre d'Espagne...

Arrêtons nous là pour le récit: on ne résume de toute façon pas une telle oeuvre. Pour un homme qui aime tant les digressions, D Ormesson a un étonnant talent à ne pas dire trop. Jamais ses personnages ne sont décrits et pourtant ils prennent vie et on les aime. Pour leur aveuglement, leur douleur, pour cette lente agonie de ce monde qui n'en finit plus de mourir.La partie où peu à peu, ils vendent, vendent, vendent, dans l'espoir fou de sauver au moins la maison....
Le Roi est mort et ses fidèles ont commis l'erreur de lui survivre : rattrapés par le siècle, ils se cherchent un destin. Ceux qui tombent en Ardenne sont finalement les plus heureux: rien de plus terrible que ce pauvre grand-père qui survit à son monde. Que reste-il quand tout ce qui constituait votre être a disparu, et pire; se trouve brocardé?
Ce roman est aussi celui de l'histoire moderne de France, tout du moins du siècle dernier: à se chercher, les membres de la famille en viennent à aimer tous les partis, les uns ou les autres, ou les uns après les autres, et c'est une promenade historique par le petit bout de la lorgnette, parfois finalement les promenades les plus instructives.
Un grand roman.
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En hommage a la mémoire de son grand-père,symbole de la tradition,contraint de s'eloigner a jamais de la terre de ses ancêtres,le cadet d'une vieille famille francaise enfermee dans l'image du passe,raconte ce qui a été et qui acheve de s'effondrer.L'histoire du xxe siecle avec ses situations paradoxales,precipite la mutation de la decadence d'une famille qui avait su,a travers tous les cataclysmes,maintenir ses privilèges et conserver son charme.
Une famillebde l'aristocratie comme tant d'autre,perdue dans la tourmente de la vie;tres beau livre,qui se lit avec beaucoup de facilite et qui est toute en delicatesse;on vit au cote de cette famille,la decadence et l'echeance inevitable du vieu monde bourgeois
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Nous traversons plus d'un siècle au travers d'une famille "exotique" à souhait, une famille noble, attachée à un terroir et un château.

Un siècle traversé par l'histoire et les histoires de famille, les deux fissurant peu à peu , le mode de vie mais aussi les valeurs ancestrales de cette famille.

Le talent de l'écrivain fait beaucoup pour attacher le lecteur aux différents membres, le plus souvent inutiles et imbus d'eux mêmes et de leur place. On pourrait sans difficulté les prendre en grippe mais croisant petites anecdotes et grandes tragédies, on accompagne l'auteur qui dessine les mémoires de ces aristocrates .

L'ensemble est traversé de réflexions mi-moralistes mi-philosophiques qui ne sont pas dénuées d'intérêt et même parfois très pertinentes.

J'ai lu ces plus de 600 pages avec étonnement, plaisir, ennui aussi à certains passages mais c'est une bonne lecture, une belle écriture. Cela faisait longtemps que je voulais découvrir et l'auteur et ce titre, c'est chose faite .
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Au plaisir de Dieu/Jean d'Ormesson de l'Académie Française
Cette chronique de la vie d'une vieille famille aristocratique française nous est conté par le cadet des petits enfants de Sosthène, le grand-père donc, né en 1856 et mort en 1951.
Ce grand-père, symbole de la tradition, est en fait le personnage central, celui autour de qui tout gravite, celui qui est de tout temps le chef, le centre de la famille et qui à travers les orages et les séductions, a tenu bon, comme un de ces vieux chênes parmi lesquels il aura vécu foudroyé et indestructible pendant près de cent ans. (1856-1951)
Dans un style magnifique digne De Chateaubriand , son idole à qui il fait penser, Jean d'Ormesson écrit des lignes riches d'un souffle, d'un rythme et d'une amplitude rares.
« Aussi loin que je regarde en arrière, mon enfance m'apparaît calme, heureuse, limpide, protégée, tout encombrée de ce que les miens y déposaient, jour après jour, de souvenirs toujours vivants et d'inquiétudes encore lointaines …Plessis-lez-Vaudreuil, avec sa table de pierre, m'apparaît dans le souvenir comme un havre, comme une île, comme un rocher de délices qu'auraient battu les flots, non de la mer, mais du temps. La vie dans le monde moderne était venue à bout, peu à peu, de la cohérence de la famille. »
Bien formaté par des siècles de domination et de mépris du peuple, le narrateur, au nom de sa famille, nous livre ses réflexions sur ce qui fut et ce qui est.
Les idées nouvelles font leur chemin parmi les hommes et ce cheminement suspect où des philosophes socialistes voient avec satisfaction un progrès de la conscience, au contraire angoisse les grandes familles qui devinent comme un forage souterrain, un lent travail de sape et de mines sous les cathédrales menacées de leur caste.
Au rythme des saisons comme à Combourg, le temps s'écoule et « nous entrions dans l'été comme dans une saison sans rivages, sans début et sans fin. Nous nous réfugiions coupés du monde, au sein de la famille. Nous quittions le temps qui passe et nous nous installions dans le temps qui dure…Le temps apportait avec lui tout ce qui nous détruisait et que nous redoutions : l'usure, l'avachissement, le changement, le déclin et l'oubli. Nous n'avions plus assez de force pour nous mettre à construire. Alors nous nous étions établis conservateurs de ce qu'avaient édifié jadis ceux dont nous gardions le souvenir à travers l'hostilité des révolutions et des siècles. »
Le goût et la passion de la lecture vont être inoculés à notre narrateur adolescent par un jeune précepteur merveilleusement cultivé :
« Un poison était entré dans nos veines. Nous avions besoin de notre drogue. Chaque ouvrage, chaque écrivain nous renvoyait à d'autres ouvrages et à d'autres écrivains. Un monde imaginaire s'édifiait autour de nous : une espèce de puzzle géant qui n'existait que sur papier et dont, par un paradoxe de bonheur ou de malheur, nous manquaient, au fur et à mesure que nous avancions dans le jeu, des pièces toujours plus nombreuses. »
Devenu adulte, il ne peut que constater l'évolution et les dégâts, et il est à présent convaincu que « la culture, un jour, exigera d'être sourd et l'intelligence de cesser de lire. »
Et curieusement il s'interroge sur l'avenir et le jugement des hommes à venir :
« Personne ne saura jamais si les gens étaient plus ou moins heureux sans voitures et sans télé, sans nouvelles, sans argent, sans besoins et sans ambitions, sans grandes espérances, mais sans illusions, sous le regard d'un Dieu qui leur disait de se taire, au sein d'un ordre immuable, dans l'absence du changement. »
Autour de lui, le bonheur se confond avec le progrès. Son avis comme celui d'un certain nombre de penseurs va à l'encontre de ce point de vue ; en effet « même ceux qui ne contestent pas les triomphes du progrès doutent maintenant avec violence de ses liens avec le bonheur. le bonheur de nos jours consiste pour beaucoup à fuir d'abord le progrès, et à le condamner. »
L'espoir était né mais fut vite déçu :
« le rôle formidable du socialisme a été de donner à la masse des hommes une espérance du bonheur. Que les fruits du socialisme, du communisme, du stalinisme, aient tenu la promesse des rêves, des espérances et des fleurs, c'est une autre question et dont la réponse est douteuse. Je me demande si les hommes n'ont pas été dans la situation de ces fiancés fous d'amour qui rêvent de leur avenir avec la femme qu'ils aiment. Jamais le mariage n'est aussi beau que les fiançailles. le socialisme aura constitué, pendant un siècle, les fiançailles de l'humanité avec le bonheur…L'extrême gauche, qui arrivait au pouvoir dans la Russie des Soviets, renonçait à la liberté puisqu'elle aspirait à la dictature au nom de valeurs tout aussi totalitaires et exclusives que l'étaient jadis les nôtres. Et nous, vaincus, réduits à la défensive, freinant de toutes nos forces la montée des croyances nouvelles, nous nous instaurions les défenseurs de la liberté individuelle qui devenait notre seul salut. Telles étaient les contradictions du monde moderne, et les nôtres. »
Il y avait l'ordre établi par une aristocratie dédaignant ceux sans particule et méprisant la République, et puis vint le changement avec l'amour du soleil, de la vitesse, de la nudité et la naissance du tourisme de masse.
Et c'est là que les grandes familles vont voir leurs liens séculaires se distendre au risque de se déchirer et se rompre. Les cousins du narrateur en sont l'exemple type : en cette période d'avant guerre où l'Europe se trouve divisée en fascistes et antifascistes, Philippe va adhérer aux idées les plus à droite et Claude à celles du parti communiste. Tous deux idéalistes convaincus vont se retrouver volontaires chacun dans son camp au cours de la guerre d'Espagne, sans se haïr pour autant.
Nous arrivons aux années précédant la guerre et pendant que le Front Populaire propose le bonheur et les loisirs aux Français, Hitler offre aux Allemands les bombardements en piqué et la percée des chars !
Plus tard, à la fin des hostilités, vont s'opposer par un destin cruel Pétain et De Gaulle.
« D'un côté, la terre natale, le sol, le bon sens paysan, le regard et les yeux, le réalisme, le passé, l'immédiat, l'obéissance et le oui : le maréchal, à Vichy. de l'autre, la mer, l'exil, l'aventure, la voix et l'oreille, la rêverie foudroyante, le futur, le pari, la révolte et le non : le général, à Londres. Une page extraordinaire s'ouvrait dans l'histoire de la France. Les deux principes élémentaires, où la mémoire obscure des hommes, dans quelques millénaires, verra la lutte mythique d'une épopée de légende dont les protagonistes, aux yeux des esprits forts, n'auront jamais existé, se combattaient à mort, se déchiraient, s'excommuniaient, se condamnaient mutuellement à la peine capitale, entrainant derrière eux des milliers et des milliers de partisans fanatiques qui avaient confié leur existence et leur honneur à l'un ou l'autre des deux chefs de guerre. »
Des lignes tout à fait magnifiques de ce récit qui se poursuit durant des pages sur ce thème tragique et dramatique du sens de la patrie et de la gloire ressenti de façon différente par deux hommes que des liens profonds unissaient cependant au sein de la caste militaire.
Le grand père du narrateur tout empreint d'une sagesse privilège de l'âge et d'un bon sens attaché au terroir, s'exprime sans détour pour dire qu'en cette période d'après guerre où tous les comptes se règlent, la justice ne se contente pas seulement d'être bafouée quand elle est faible, mais qu'elle cesse d'être juste quand elle devient forte.
Tout au long de ces belles pages que nous offre l'immense talent de Jean d'Ormesson, dont on ne peut que déguster la saveur des mots, est déroulée une chronique du temps qui passe avec un sentiment de fin d'un monde. Pour dramatiques que s'annoncent les jours à venir, l'humour et la tendresse ne désertent pas ces pages sublimes et nostalgiques.
Et plus grave :
« L'idée de destin, qui hante les hommes sous mille formes, j'imagine qu'elle provient de cette étrange coalition des forces de la destruction, de cette impossibilité d'arrêter ce qui roule sur les pentes de l'abîme… Il n'y a rien à faire contre l'usure, il n'y a rien à faire contre le temps. Nous nous étions appuyés sur lui pour édifier notre puissance : il se retournait contre nous en nous rejetant dans ce passé que nous avions tant aimé. Il reconstruisait ailleurs des théories nouvelles, des visions fulgurantes, des espérances admirables…Nous ne retrouverions plus jamais la saveur délicieuse mais perdue - délicieuse et perdue, délicieuse parce que perdue - des poires de Plessis – lez – Vaudreuil. »
Et puis le style, oui le style encore sous cette plume magique de poésie et de sensibilité :
« Je regardais les vieux arbres, la pièce d'eau au loin, les tilleuls, la table de pierre, tout ce paysage si familier et si calme qui s'étendait sous nos yeux depuis des siècles et des siècles. C'était l'heure où se faisait un grand silence, où les oiseaux se taisaient. On les voyait passer, sans un bruit, assez haut dans le ciel d'où les nuages s'écartaient. Nous étions liés à ces lignes si douces, à ces couleurs un peu fondues, à cette odeur incomparable qui montait jusqu'à moi. »
600 pages d'histoire familiale, contée avec humour, émotion et nostalgie par le narrateur, simple observateur qui dépeint la lutte de ce qui s'obstine à rester stable contre les fluctuations de la mode, du progrès et du temps, et le triomphe du temps sur l'éternité de sa caste. Tel une espèce de vigie qui regarde ce qui se passe et juge les personnages avec une tendresse de tous les instants et une grande humanité sachant bien que toutes les créations humaines sont de toutes façons éphémères.


À noter que le château de Plessis - lez - Vaudreuil existe vraiment. Construit en 980, son vrai nom est Château de Saint - Fargeau, situé dans l'Yonne. Il appartint aux Boisgelin, ancêtres maternels monarchistes et réactionnaires de Jean d'Ormesson. C'est là que Jean d'Ormesson passait les étés avec ses parents et il s'en inspira pour écrire ce récit.
Il n'est pas douteux que certains traits du récit sont autobiographiques avec certes un décalage dans les dates, l'auteur n'étant pas né la même année (1904) que le narrateur.
La bonne idée aussi est d'avoir précédé le récit d'un indispensable arbre généalogique qui permet de situer les nombreux personnages.
Enfin reconnaissons à Jean d'Ormesson un immense talent de conteur en plus d'être un homme de grande culture classique. Un livre à lire et relire, même en ouvrant les pages au hasard.
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Un voyage dans le temps, l'histoire, la vie, la mort... Une prose délicate qui vous prend par la main, dire :"viens voir comme la vie était facile", les idées, les convictions évidentes. Il faut rattraper le temps, L Histoire et rien ne va plus, tout se délite, de plus en plus vite.
En une cinquantaine d'années, tout est parti, tout s'est érodé. Tout va trop vite comme notre ère industrielle, et tout se perd...
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Un des points d'orgue de notre voyage en France cet été fur notre courte étape au Château de Saint-Fargeau, dans l'Yonne. Il est un peu à l'écart des coins plus touristiques de Bourgogne, caché au milieu d'immenses forêts qui abritent aussi le chantier de construction médiéval du château-fort de Guédelon.
A Saint-Fargeau, les massives tours rondes surmontées d'élégants lanternons à chaque angle de l'édifice ajoutent un air bonhomme à cette imposant château de style renaissance. le tendre rose des briques sous le soleil de l'après-midi vire à l'orange à la tombée du jour. L'invitation à rester, après la visite, pour le spectacle nocturne, se fait alors très tentante.
En ce long soir d'été, nous nous sommes donc assis sur un banc de bois entre l'étang et l'harmonieuse façade du château. La nuit avance, les flambeaux s'allument et nous nous sommes laissés embarquer par un spectacle entièrement joué par des centaines de volontaires du village et de la région. Ce fut un superbe voyage, en quelques deux heures de démonstrations équestres, de tournois de chevaliers, guerres de religion, pillages, révolutions, guerres mondiales et scènes de la vie quotidienne des campagnes, ponctuées d'effets spéciaux et d'humour, nous menant à travers l'histoire du château et de son village.
Alors qu'à la fin du spectacle nous quittions le domaine par la cour intérieure où résonnaient les trompes de chasse, il était impossible de ne pas faire le lien avec le roman de Jean d'Ormesson. Il a choisi comme titre « Au Plaisir de Dieu », la devise familiale inscrite au linteau de la porte de la chapelle. Et même si, dans son roman, l'académicien aux yeux bleus place le château fictif de Plessis-lez-Vaudreuil en Haute-Sarthe, c'est bien à Saint-Fargeau, appartenant alors à la famille de sa mère, que l'écrivain a passé quelques années de sa jeunesse. En outre, l'excellent feuilleton télévisé adaptant le roman – disponible dans son entièreté sur Youtube- a été tourné dans le même château.
« Au Plaisir de Dieu » raconte l'histoire de cette famille aristocratique, du début du XXème siècle à la fin des années soixante. C'est un regard à la fois sans complaisance et attendri que Jean d'O pose sur cette lignée. Son patriarche, Sosthène, Duc de Plessis-Vaudreuil, est d'un autre âge, fidèle au drapeau blanc du roi, et pourtant il traversera le siècle comme le point de repère et de ralliement de ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants perdus et brinquebalés dans les soubresauts de l'histoire : tués dans les tranchées, suivant les dernières fantaisies du surréalisme et de Dada, ruinés par le krach boursier, rivaux dans les deux camps de la Guerre d'Espagne, déçus du marxisme et du fascisme, résistants et collabos, et finalement, forcés de vendre le château. Au milieu de ces tempêtes, tous les étés la famille se retrouve autour de la table de pierre à l'ombre du tilleul pour d'abord refaire le monde, et ensuite panser ses blessures.

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Un pur régal que cette histoire de famille, écrite au temps ou Jean d'Ormesson écrivait de vrais romans.
Dans celui-ci, il raconte l'histoire d'une illustre famille, celle du narrateur (peut-être en partie celle de l'auteur lui même ?), en hommage à la mémoire de son grand-père, un homme pétri de traditions et fidèle au passé et à ses ancêtres. Bien évidemment, le livre parcourt l'histoire du 20ème siècle mais ce n'est pas un livre d'histoire, l'auteur s'en défend : l'histoire n'est là que pour servir la description de la famille au château de Plessis-lez-Vaudreuil. le poids des traditions et la présence de la mémoire des aïeux sont des contraintes continuelles pour tous les membres de la famille, mais les vicissitudes du monde moderne finiront par en avoir raison. C'est vraiment d grand art, il n'y a pratiquement pas de dialogues et pourtant on ne se lasse pas du récit. le grand-père est toujours là, inamovible référence, ses enfants, leurs conjoints et toutes leurs descendances gravitent autour de lui, chacun avec ses moyens, sa façon de vivre, ses idées politiques parfois diamétralement opposées. Mais, malgré les écarts, ils reviennent toujours au château.
Magnifique !
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« Notre Judas à nous, notre traitre c'est l'histoire. »
Autour de Sosthène, le patriarche de la famille Plessis-les-Vaudrueil, la maisonnée s'affaire, enfants, petits-enfants chaque été se retrouvent sous le tilleul témoin de leurs joies et de leurs peines.
le clan s'étoffe, la vie et la mort s'invitent au moment où on s'y attend le moins. Sosthène veille, il n'en perd pas une miette, il transmet l'histoire de cette famille qui semble aussi vieille que le monde, six maréchaux et pléthore de ducs, de comtes.
Sosthène tient aux traditions, celle de sa vieille famille aristocratique, bienveillant mais ferme, il se sent bien dans son monde vieillissant. Obstiné, il refuse le progrès, le modernisme, pas d'eau courante au château, enfin voyons, tout va très bien ainsi ! qu'ont-elles ses jeunes belles-filles qui voudraient révolutionner l'époque et les moeurs !
L'histoire déroute, si Sosthène entretient la mémoire des croisades, il se sent impuissant face aux nationalisme qui peu à peu embrase le monde, déjà qu'il avait eu du mal avec ce fichu Napoléon III, nostalgique de la monarchie, désormais il doit subir Hitler.
Sosthène est juste, il aime les siens et ceux qui le servent, il ne fait pas grande différence entre Claude, Jean, ou Michel le fils de son régisseur, il arrive même à changer d'avis et se voit affublé d'un téléphone qui lui coupe la parole sans vergogne.
Sa famille ne le ménagera pas, Dieu et l'histoire n'ont plus : la politique divise ses garçons, la guerre lui volera ses fils ainsi que la banqueroute de 1929, ses petits-enfants vont s'engager dans l'histoire, la résistance et se battre pendant que Sosthène tient tête à l'État-major allemand installé sous son toit.
Il parait que Sosthène est directement inspiré du grand-père maternel de Jean d'O., que ces souvenirs au château de Saint Fargeau sont là, aussi dans ce roman empreint de tendresse et de nostalgie pour un monde qui laisse place à un autre.
Au plaisir de Dieu, est certainement le titre que j'affectionne le plus dans ma bibliothèque, y figurent plusieurs exemplaires.
C'est beau, mélancolique avec des sursauts de poésie et une drolerie que concentre à lui seul le patriarche, personnage central. L'émotion y est intacte.
A lire, pour le plaisir d'étirer le temps...
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La taille conséquente de cet ouvrage s'explique par son ambition de peindre un siècle entier d'un point de vue particulier : celui d'une grande famille noble sur le déclin. Défi réussi pour moi ! Jean d'Ormesson dessine une fresque sociétale impressionnante, évoquant souvent avec légèreté, parfois avec gravité, le passage d'une société rurale basée sur le devoir à celle, grande bourgeoise qui ne cherche que son plaisir. Les personnages familiaux sont riches et attachants, surtout la figure du grand-père, en butte aux évolutions du monde, qui domine tout le récit. Certains passages tournent un peu en rond, cependant l'ensemble reste agréable à lire avec une progression dans le temps bien tenue.
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