Ce qu'est l'amour d'abord, c'est une complicité.
Une complicité et un secret. Parler d'un amour, c'est peut-être déjà le trahir. L'amour ne se passe qu'entre deux êtres; tout ce qu'on y introduit d'étranger lui fait perdre de sa force et de sa pureté, le menace de mort.
Les hauts lieux de l'histoire ne sont pas indifférents au cœur. Rome, Athènes, Tolède, Assise ont d'étranges vertus.
Même ceux qui en ignorent tout subissent le charme de leurs noms et de ces souvenirs dont ils ne savent rien.
L’indifférence prépare admirablement à la passion : dans l’indifférence, rien ne compte ; dans la passion, rien ne compte non plus, sauf un seul être qui donne son sens à tout.
La vie était merveilleuse. Toute douleur passée serait alors oubliée. Le baume de l’amour panserait bien vite toutes les plaies.
Aimer sans être aimé, c’est ce qu’il y a de mieux dans l’amour !
« Si ce charbonnier me demande du feu, elle m’aime ; si ce petit garçon traverse la rue, elle m’aime. » Tout ce que le hasard offre d’absurde et de vain se mettait à receler ainsi pour moi les plus chers, les plus fous, les plus déchirants des messages.
Car si avoir mal fait pleurer, si l’amour rend gai, ces larmes et cette gaieté à leur tour rendent plus profonds la douleur et l’amour qui leur ont donné naissance : tant l’âme est chevillée au corps, tant le corps est l’âme même. Ce que cherche toujours la passion, c’est d’aller jusqu’au bout d’elle-même ; et elle trouve dans ses manifestations de quoi s’approfondir encore : ainsi les amours se nourrissent-elles en nous des larmes qu’elles y provoquent.
Le besoin d’être seuls que ressentent tant d’êtres très heureux ou très malheureux, c’est d’abord un besoin d’être seuls pour mieux retourner dans leur tête, sans avoir à répondre aux questions, sans avoir à être attentifs pour être polis, les images de bonheur ou de désespoir qui se bousculent sous leur crâne.
Le mot jalousie ne rend sans doute pas exactement ce que je veux dire. C’était comme si les appuis que m’offrait un monde instable se défaisaient brusquement. Seul l’amour d’un être pour moi pouvait lui rendre son équilibre. Ma passion de l’indépendance qui me faisait rejeter tout le poids de l’amour s’unissait en moi à un irrépressible besoin d’être aimé.
Le propre de la passion, et très particulièrement de l’amour, c’est la contradiction.