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EAN : 9780064403689
272 pages
Harper Collins (05/05/2020)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
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Remarquable classique anglo-saxon de littérature jeunesse : ce livre de Katherine Paterson qui a gagné la médaille Newberry, est qualifié de roman-clé, classé parmi les meilleurs romans jeunesse de tous les temps. Je l'ai trouvé par hasard en édition originale, un vieil exemplaire en anglais (il n'a d'ailleurs jamais été traduit en français), dans mon hall d'immeuble!

Roman d'apprentissage, il traite d'une douloureuse rivalité entre soeurs, de la jalousie et de la lutte d'une soeur pour trouver sa propre voie. C'est un portrait assez juste et audacieux de l'adolescence et du passage à l'âge adulte. Une bonne part du récit se passe sur une année, la suite condense une vie.

L'histoire se passe sur une minuscule île isolée de la baie de Chesapeake, aux Etats-Unis, à partir de décembre 1941. L'eau est partout, les paysages magnifiques, presque tous les hommes sont marins pêcheurs de crabe et d'huîtres, sur leurs bateaux de l'aube au crépuscule pendant que les femmes restent à la maison. C'est une toute petite communauté, assez pauvre et très marquée par la foi chrétienne (on y est protestant méthodiste). le père dans l'histoire est pêcheur, la mère une ancienne institutrice, fait remarquable car très peu ont fait des études et peu de femmes ont eu un travail indépendant.

"J'ai aimé Jacob, mais j'ai détesté Ésaü...". La raillerie (basée sur une citation de la Bible) de sa très religieuse grand-mère vient toucher le point sensible de la narratrice Sara Louise : comme l'Esau biblique, Sara Louise, dite Louise voire “Wheeze”, 13 ans, se sent la jumelle aînée délaissée, méprisée.

Car, comme le Jacob de la Bible, Caroline, sa soeur jumelle plus jeune de quelques minutes, capte toute l'attention dès le début et est celle que tout le monde aime. La fragilité de Caroline à la naissance en a fait un “enfant miracle” pour qui ses parents se sont battus. Sara Louise, elle, née en bonne santé, est laissée de côté, oubliée, “ne donnant pas un instant de souci”.

Plus tard, tous les regards, notamment parentaux, continuent à se focaliser sur Caroline, belle et radieuse, blonde, charismatique et dotée d'une voix d'ange. Sara Louise, à côté, sans talent musical particulier, brune, fait figure d'ombre, de fille ordinaire, là encore oubliée. Les parents aiment leurs deux enfants, mais Sara Louise en doute car Caroline prend toute la place tandis que Louise est traitée avec désinvolture. Les jumelles ont beau grandir côte à côte, elles ne sont pas proches.

Grandissant dans cette situation étouffante et déséquilibrée, Sara Louise bout, rongée par la jalousie, l'amertume, la colère, l'envie, la détestation de sa jumelle et la forte culpabilité et accès de haine de soi que cela entraîne, notamment dans un contexte très religieux. Elle se sent volée de tout par sa soeur : l'attention parentale, ses espoirs d'études, l'affection des gens de l'île et de ses amis, et même son nom. En effet Caroline a institué l'habitude de remplacer le nom de Sara Louise par le surnom moqueur “Wheeze” (un son produit quand on a du mal à respirer!).

Enfant ni fragile ni dotée d'un don rare, Sara Louise n'est pas non plus, à son grand dam, le garçon que son père aurait voulu avoir pour l'aider à la pêche aux crabes et aux huîtres. Non admise sur le bateau paternel, elle passe tout son temps libre à pêcher en salopette sur son propre petit bateau avec son meilleur ami Mc Call “Call”, un gamin peu gâté par la nature au départ. le produit du labeur de Sara Louise contribue fortement à financer les cours de chant et de piano de sa jumelle, car pour Caroline, constate-t-elle amèrement, tout le monde se sacrifie naturellement.

Caroline accepte tout aussi naturellement, égoïstement le sacrifice de sa soeur, sans s'abstenir de la titiller sur l'apparence sale et l'odeur de Sara Louise lorsqu'elle rentre de son travail en pleine nature de garçon manqué. Caroline sait aussi se montrer gentille, mais rien n'efface l'inégalité...

Malgré sa jalousie et son amertume à l'égard de sa soeur ingrate, Sara Louise a un vrai amour pour son travail. Elle y trouve, dans la nature et l'eau, hors de l'ombre de sa soeur, du répit, de la paix, une vraie joie et la fierté personnelle de contribuer aux finances familiales comme quelqu'un d'indépendant sur qui on peut compter. Cette première partie qui pose le décor et nous plonge dans la nature est développée et très belle.

Elle lit beaucoup. Elle travaille plus dur encore, économise une part de sa pêche pour se payer un internat qui l'éloignerait de sa soeur. Elle prend aussi le large en tentant de découvrir des secrets de l'île, en particulier le retour du vieux “capitaine” Hiram Wallace (imposteur? espion?), mystérieusement de retour après cinquante ans. Dans cette deuxième partie, Call et Louise se lient d'amitié avec le capitaine (qui appelle Sara Louise par son vrai nom!) l'aident à remettre en état sa baraque, à venir au secours d'une vieille dame célibataire qui a des soucis de santé et trop de chats (attention cliché!). Mais là aussi, Caroline viendra voler la vedette...

Tout cela se passe dans le contexte, d'une part d'une forte tempête en 1942, d'autre part de la guerre. La tempête pousse le capitaine à changer de logement (à cette occasion Louise s'en amourache, alors qu'il est plus vieux que sa grand-mère, et heureusement ce n'est pas réciproque!) et prive Caroline de ses chers cours de chant. L'entrée en guerre des Etats-Unis à partir de Pearl Harbor est un choc qui marque un cap pour les jumelles, et la guerre pousse au départ leur professeur adoré de collège et de chorale, puis Call lui-même, qui change.

Arrive pour Caroline une opportunité d'études en internat spécialisé qui la ravit. Cela éloigne cette soeur encombrante que Louise voulait fuir, mais Louise est une fois de plus laissée en arrière, à rester seule sur l'île.

Seule et incertaine, Louise commence à se battre pour se faire une place en dehors de l'ombre de sa soeur. Cette partie du roman (à partir du départ de Call et Caroline) est trop courte, un peu précipitée et aurait mérité d'être plus développée.

La guerre va inopinément lui donner l'occasion réaliser un rêve : travailler sur l'eau aux côtés de son père. Cela offre une plénitude temporaire, mais ne suffit pas. Elle laisse tomber l'école, passe son bac grâce à l'enseignement de sa mère. Seule enfant restée au foyer, elle a enfin toute l'attention de ses parents. Avec sa mère, elle explose et exprime enfin, dans une scène “climax” du roman, son sentiment d'enfant délaissée et son désir de départ, ainsi que sa colère vis-à-vis d'un modèle de femme qui a tout laissé tomber par amour pour se retrouver à vivre isolée sans se réaliser. Sara Louise veut être différente, partir, mais réclame l'assurance de manquer à ses parents et leur aval.

Sa soeur loin et suivant sa voie, le capitaine la met face à elle-même et aux choix à faire dans ce tournant de sa vie : elle doit découvrir qui elle est, et oser partir. Trouver sa place. Elle voulait faire des études et découvrir les montagnes, elle le fera. Faute de pouvoir entrer en médecine (le contexte misogyne d'après guerre lui barre l'accès) elle sera sage-femme, dans les montagnes, paysage insulaire à sa façon, et elle... y restera... par amour pour un homme.

Mais elle s'épanouira, se réalisera dans son métier, ne le lâchera pas. Dans le cadre de ce métier elle aide à la naissance de jumeaux et se retrouve à revivre, mais en tant qu'adulte extérieure, sa situation de départ. Un premier jumeau naît en bonne santé, puis la soeur, bleue, à moitié morte déjà. Sara Louise se démène pour l'enfant fragile, improvise une couveuse de fortune près du four, puis se rend compte qu'elle a oublié l'enfant fort. Alors elle demande qu'il soit allaité par sa mère tandis qu'elle s'occupe de la petite, qu'elle allaite comme son propre enfant (un garçon dont elle a accouché récemment). Dans la même situation, comme ses parents, elle a oublié le fort en se focalisant sur l'enfant fragile, mais elle a voulu corriger et compenser son oubli, veiller au partage égal de l'attention.

J'ai beaucoup aimé ce roman, certes jeunesse, mais qui s'apprécie tout à fait aussi en tant d'adulte. C'est une écriture assez visuelle, efficace et rendant justice à la beauté de la nature tout comme à la psychologie des personnages, très vivants. On se prend d'affection, de compassion pour Louise. Malheureusement le dernier tiers est précipité, les années et les évènements défilent en peu de pages. Sans doute, sans son ami Call ni sa soeur, le temps passe-t-il plus vite. Mais j'aurais aimé que soit développé le moment et la façon dont Louise a l'idée de la médecine, trouve sa voie, et je déplore que quatre ans, puis au moins une dizaine-quinzaine de plus, soient concentrés en moins de pages que l'année de départ, de décembre 41 à décembre 42.

Pour conclure, c'était une lecture agréable dans un décor de nature et avec une problématique courante, voire universelle, et qui parle à tous les âges (car on a tous été enfants et adolescents!), la lutte de frères et soeurs pour l'amour parental et l'estime de soi, j'aurais juste aimé pouvoir suivre mieux et plus longtemps l'héroïne dans sa quête d'une voie à elle.
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Vidéo de Katherine Paterson
Bridge to Terabithia (Le Secret de Terabithia), un drame fantastique américain réalisé par Gábor Csupó, sorti le 28 mars 2007. Le scénario est adapté du roman de Katherine Paterson intitulé Le Pont de Terabithia (Bridge to Terabithia, 1977). Trailer.
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