J'avais lu presque tous les romans dont Benjamin Mallaucène est le héros, mais il me manquait encore "
La petite marchande de prose". Cette lacune est maintenant réparée. J'ai donc retrouvé toute la tribu - haute en couleurs - qui gravite autour de Benjamin, et une intrigue comme seul
D. Pennac sait les concocter: une improbable et "hénaurme" histoire de vol d'identité dans le milieu de l'édition, qui induit une série de meurtres. Comme il se doit, Benjamin se retrouve dans l'oeil du cyclone. Sous les yeux du public, il reçoit même une balle qui perfore un petit tunnel dans sa tête - ce qui le transforme illico presto en "plante verte" (celle-ci, cependant, continue à parler in petto, pour notre plus grand plaisir). Devant cette situation, que l'auteur refuse de prendre au tragique, j'ai presque craint une issue fatale... Mais aussitôt
Pennac dirige son projecteur sur la belle amie de Benjamin, Julie, qui a subitement des envies meurtrières à l'égard du tireur fou. L'auteur sait évidemment ménager le suspense; l'histoire, quoique a priori abracadabrantesque, reçoit un dénouement presque logique.
En lisant ce roman malin et bien ficelé, on ne s'ennuie pas une seconde; on se prend au jeu. Evidemment, on trouve sans surprise des jolies formules et quelques morceaux de bravoure truculents, à la
Pennac. La phrase est généreuse, l'esprit du roman est vif, l'humour pointe son nez à brûle-pourpoint. L'auteur se permet aussi des digressions et des ruptures volontaires au coeur du mystère, c'est de bonne guerre. Les personnages principaux, campés dans les épisodes précédents, se retrouvent ici identiques à eux-mêmes: solidaires, un peu fous, picaresques, iconoclastes, pétris de bons sentiments (au moins à l'intérieur de la tribu) et toujours attachants…
Ce roman est un petit régal pour tous les lecteurs, sauf pour ceux qui ont décidé une fois pour toutes de détester
D. Pennac.