Les 3 soeurs : certains pensent à
Anton Tchekhov, bien sûr, mais moi, je vois mes tantes. 3 femmes qui ont été des petites filles, des femmes adultes, mariées, mortes maintenant pour certaines, chacune avec son caractère. Mes tantes et leur besoin viscéral d'être ensemble, mes tantes et leurs maris qui sont devenus des frères pour les deux frères qu'elles avaient. Un famille bretonne : des taiseux, des sensitifs qui ne parlent pas forcément beaucoup, mais dont on sentait l'amour circuler autour d'eux, à travers eux. Ceux qui sont partis, me manquent, ceux qui restent, souffrent de leurs absences, mais ils sont toujours plein de vie.
Voici donc à qui j'ai pensé tout au long de ce livre qui raconte la violence intra-familiale dans une famille russe cautionnée par l'Etat : ce qui se passe derrière les portes ne regarde pas la Police sauf en cas de décès, mais même là le tueur n'est pas inculpé ou emprisonné. Voici la place des femmes en Russie et elle fait écho à l'expérience de l'auteure au sein de sa famille, dans ses relations avec les hommes : non dits, silences assourdissants. 3 gamines qui se sont affranchies de la violence et y ont opposé la leur après des années de sévices paternels. Ce texte m'a permis aussi de mieux appréhender cet étrange pays qu'est la Russie où l'on peut juger les morts. et ou
VKontakte est le Facebook russe. Quelques réflexions de l'auteure (ou du moins qu'elle prête aux jeunes soeurs), m'ont interpellé, même si je les comprends dans le contexte du livre : "C'était formidable de pouvoir dire, en instantané, le désir, les émotions, les pensées" : personnellement, je pense que c'est dangereux, qu'il faut réfléchir avant de parler. "Tuer son père, c'est aussi tuer une partie de son être" : ça dépend de ce qu'on appelle un "père". La psychanalyse freudienne dit que symboliquement, on doit "tuer" le père et "violer" sa mère. Quelquefois, le meurtre n'est pas symbolique. « Embrasse-moi. » : encore une injonction, pas une demande. Quelquefois, on le souhaite, d'autrefois, non.
Un livre âpre et violent, mais aussi d'un grand respect pour ces jeunes filles qui je l'espère, vont pouvoir reprendre le cours de leur vie, devenir ce qu'elles veulent être, vivre enfin !