AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,25

sur 1544 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un délice de la joie de vivre, mais pas d'une joie de vivre injustifiée, hallucinée et naïve, qui se dupe ou se tromperait dans ses visées : une joie de vivre qui inclut dans ses principes de plaisir la déliquescence même que la vie connaît à chaque seconde et qui fait de ses sources potentielles de laideur la preuve d'une diversité foisonnante de ses manifestations.

Gargantua est monstrueux. Il déborde de vie. C'est à en frissonner de plaisir et de terreur... mais le plaisir est si grand qu'on en oublie rapidement la terreur.
Commenter  J’apprécie          441
Certains, incontinents, consideroient pompeusement que maistre Rabelais, rabelinant rabelinoisement, n'estoit que pauvre diable conteur de scandales et d'infections. Lesditz meschants lecteurs doivent estre constipez de ventre Ces « trop diteulx, breschedents, plaisans rousseaulx, galliers, chienlictz, averlans, limes sourdes, faictneans, friandeaulx, bustarins, talvassiers, riennevaulx, rustres, challans, hapelopins, trainneguainnes, gentilz flocquetz, copieux, landores, malotruz, dendins, baugears, tezez, gaubregeux, gogueluz, claquedans boyers d'etrons et bergiers de merde » ne sont pas beuveurs illustres et sont demourer lecteurs de surface, rustres consommateurs de culture. Cestuy avaleurs paperivores n'ont pas rompu l'os et sugcé la sustantificque mouelle, « avecques espoir certain d'être faictz escors et preux à ladicte lecture ; car en icelle bien aultre goust trouverez et doctrine plus absconce, laquelle vous revelera de très haultz sacremens et mysteres horrificques, tant en ce que concerne religion que aussi l'estat politicq et vie oeconomicque. »
Commenter  J’apprécie          312
Lu dans la Bibliothèque de la Pléiade, dans le texte établi par Mireille Huchon en1994.

Voilà un texte qui se mérite!
En plus d'écrire en moyen français (ça c'est bien normal c'est la langue de son époque), François Rabelais brouille les pistes, joue avec son lecteur et avec la langue, et recherche la rareté du vocabulaire. Au besoin, il crée des mots. Et pour couronner le tout, nous ne baignons plus dans les références antiques des érudits de la Renaissance.
Heureusement, l'édition de Mireille Huchon fourmille d'explications et de notes. Alors avec un peu de patience, on peut goûter l'humour de Rabelais et les enjeux de ce célèbre texte.
Il y a d'abord la belle irrévérence vis-à-vis du système d'éducation. Les théologiens et autres enseignants religieux, prudemment et plaisamment appelés "Sophistes", sont raillés durement. Ils sont remplacés par Eudemon, un précepteur dont le nom signifie simplement "heureux".
Ensuite, les guerres picrocholines, qui sont une parodie de la lutte entre François 1er et Charles Quint.
Ces récits posent la question de la guerre, quand un côté veut la guerre sans en démordre tandis que l'autre tente de l'éviter par tous les moyens, mais est finalement contraint d'y entrer. le bon côté représente évidemment le roi de France, ce qui n'est peut-être pas de la plus grande exactitude.
Et puis il y a l'exagération propre à la parodie (nous sommes chez des géants, ne l'oublions pas): les quantités monstrueuses de vin et de mangeaille, l'habillement, et toutes les allusions sexuelles et scatologiques qui ne sont pas sans drôlerie. de l'art d'être grivois sans être vulgaire.
Bref une lecture riche, drôle et instructive, d'un livre qui n'a pas volé son titre de classique, mais qui s'en échappe aussitôt avec espièglerie.
Commenter  J’apprécie          300
D'ordinaire les romans se situent dans le lieu de la réalité. Ils doivent être sinon réalistes, au moins probables, pour que le lecteur y accorde un minimum d'intérêt et de crédit.

Avec Rabelais d'emblée on tombe dans le pays de Merveille. Par ce procédé il peut laisser libre cours à sa fantaisie et exprimer des opinions, mettre en scène des actions qui autrement auraient excité la haine et la vengeance des tristes «farfadets», chiens de garde de l'Église.

Rabelais se rapproche aussi de l'Utopie de Thomas More. Il y situe d'ailleurs explicitement le pays d'origine de Badebec, la femme de Gargantua (cf. Pantagruel chap. II). Pourtant ses romans fantastiques se situent bien en France, mais contrairement à Thomas More, dans le lieu de l'imaginaire populaire. L'Utopie, acte de rebellion intellectuelle, vise un public d'intellectuels. le Gargantua demeure un livre de divertissement, même de défoulement satirique, de jubilation langagière, de bouffonnerie, qui n'a pas de frontière ni de classe.

C'est-à-dire que nous avons à faire là à une oeuvre proprement universelle.

Pantagruel (le "Tout-Altéré") était à l'origine un démon du sel qui assoiffait et desséchait tout à l'avenant, hommes, bêtes et champs. Les géants ont toujours eu une place réservée dans le folklore des peuples. On les voit encore courir à Carnaval ou à d'autres occasions festives, dans maints lieux de notre pays ou d'ailleurs.

Il fallait bien des géants pour renverser le carcan de l'ordre moral institué alors par l'Église, religion d'État. Rabelais sait très bien ce qu'il fait. le rire est le propre de l'homme, parce qu'il est l'indice de la liberté.

FAY CE QUE VOULDRAS

Était la seule règle de l'abbaye de Theleme. «Parce que gens liberes, bien nez, bien instruictz, conversans en compaignies honnestes, ont par nature un instinct et aguillon qui tousjours les poulse à faictz vertueux et retire de vice...»
Commenter  J’apprécie          232
Ce soir à la maison, repas de fouaces. C'est fête.

Qu'ils viennent nous en empêcher les hapelopins, gobregeux, gogueluz, bustarins, talvassiers, agends immeubliers, riennevaulx, rustres, landores! Nous leur ferons la guerre et les culbuterons jusqu'en Inde, après avoir conquis au passage le Berry, l'Espagne, la Maurétanie, le Cathay et toutes terres attenantes.
Qu'ils viennent les sorbonnistes! Nous caguerons à plaisir dans leur chaperon à bourrelet.
Méfiez vous des agélastes.

En attendant, chopinons théologalement et discutons sur la meilleure éducation. J'ai idée que la dispute sera longue. L'oncle François nous accompagne.
Commenter  J’apprécie          190
Cela s'étoffe, et cela se complique, entre gauloiseries de plus en plus grosses et réflexions humanistes ambitieuses. Gargantua est un sage humaniste qui se torche le cul d'un oison. Frère Jean défend son abbaye en buvant à foison, en tuant à faire gicler le sang, en inventant un nouveau genre de monastère, plus sain sans être plus saint. Quelle unité à tout cela? Peut-être se trouve-t-elle dans la langue rabelaisienne, qui se remplit la panse de bons mots, de listes de jeux interminables, de citations latines dévergondées et de proverbe embabouinés. Cette langue nous est étrange, rebibes d'un jadis évanoui, fête d'un vocabulaire riche, grassouillet, bedonnant et sautillant, comme le fin géant Gargantua, léger dans sa lourdeur.
Commenter  J’apprécie          190
Etudier avec mes élèves dans la séquence Humanisme et Renaissance, ce n'est pas à la portée de tous malgré ce que l'on peut croire.
Ne pas oublier le contexte de l'époque, que Rabelais est un humaniste de la première heure et qu'il trace à travers cette satire l'éducation idéale.

Gargantua, comme Pantagruel d'ailleurs, est une oeuvre majeure, drôle, salace mais surtout efficace. Je conseille une édition avec des notes et commentaires qui permettent de saisir les subtilités et les non-dits essentiels à la compréhension.

Un excellent moment pour ma part.
Commenter  J’apprécie          170
RABELAIS ET POUTINE

Après avoir lu 2 ou 3 « des mauvais petits livres dont nous sommes inondés », j'en suis sorti tout déprimé et pour me revigorer j'en suis revenu à mes classiques...et je suis tombé par hasard sur un passage de Gargantua – pas le plus gaulois à vrai dire - qui colle parfaitement à notre brûlante actualité et que je vous soumets après quelques mots d'introduction.

Si vous avez, comme moi quelques moments de déprime vous pouvez, certes, aller voir votre psy, lire le roman Amour, Prozac et autres curiosités, boire une cuillerée de Jouvence de l'abbé Souyris, prendre de la Poudre de perlimpinpin mais, je pense que le remède le plus efficace pour vous guérir de votre mélancolie c'est que vous lisiez, chaque soir, 2/3 pages de Gargantua ou de Pantagruel. Vous en serez tout ragaillardi. Rabelais est en effet le meilleur maître pour faire rire...et penser de surcroît.
Il était médecin des corps mais dans ses ouvrages il est surtout médecin des esprits cherchant un réconfort. Pour lui, aussi grandes que soient votre peine et votre tristesse, une seule thérapeutique  qui vaille: de la joie, rien que de la joie...la joie de vivre. A consommer à petites doses, dans une langue modernisée, mais sans modération pour être fidèle aux prescriptions de ce médecin si épris de liberté.

Et tout cela exprimé dans une langue de conteur, de bonimenteur, de farceur qui est un vrai trésor. Il a, en effet, réussi à faire un langage – un vrai – qui s'adresse à tout le monde. Il a voulu - et il y est arrivé – faire passer la langue parlée dans la langue écrite, mais ce style-là s'est perdu après lui. Il a fallu attendre 4 siècles pour que Céline le ressuscite. Et c'est là sa modernité.

Modernité aussi dans ses idées. Ah si Poutine avait pu faire de Gargantua son livre de chevet et, pour meubler sa solitude, en lire un extrait tous les soirs, comme pour Cléopâtre, la face de la guerre eût pu en être changée :

« ...selon la vraie discipline militaire, il ne faut jamais mettre son ennemi au désespoir parce que cette nécessité multiplie sa force et accroît son courage ...Il n'y a pas de meilleur salut pour les gens effrayés et rendus de fatigue que de n'en espérer aucun. Combien de victoires ont été ôtées des mains des vainqueurs par les vaincus, quand ceux-là ne se sont pas contentés des succès raisonnables, mais on tenté de tout mettre à massacre et de détruire totalement leurs ennemis, sans vouloir en laisser un seul pour porter la nouvelle ! Ouvrez toujours à vos ennemis les portes et chemins… »
Gargantua, chap.43

Sans commentaire. A vous de juger.
Commenter  J’apprécie          161
Gargantua, c'est l'appétit de savoir, l'appétit de vivre, la claire et vivifiante vision de l'humain, de son origine et de sa descendance... Gargan tu as, tu auras la vie que tu veux avoir, la liberté de penser et d'agir en homme vertueux, la fulgurance que procure le fait de réfléchir par soi-même et le plaisir des mots, simplement des mots.
Commenter  J’apprécie          110
Non, ce n'est pas un livre à lire pendant sa scolarité
Non, ce n'est pas incompréhensible, ce vieux françois !
Non, ce n'est pas l'apologie du Gargantuesque !
Cet opus est des plus précieux : c'est la
Commenter  J’apprécie          110




Lecteurs (5002) Voir plus



Quiz Voir plus

François Rabelais : un destin hors norme

En quelle année serait né François Rabelais ?

1483
1490
1493
1494
on ne sait pas exactement

10 questions
10 lecteurs ont répondu
Thème : François RabelaisCréer un quiz sur ce livre

{* *}