La Chine est un milieu aussi hostile à l'art qu'aux étrangers. Un voyageur candide s'arrêtant pour faire le croquis d'une place forte à la frontière allemande n'est pas exposé à plus d'avanies que le dessinateur qui s'avise de prendre des notes dans les rues de Canton.
J'en ai fait l'expérience. Il n'est invective méprisante ou grotesque dont on n'assaille là-bas, comme naguère encore nos propres paysans, les « tireux d'plans» — tous « jeteux d'sorts». Proposez à un Chinois de lui faire son portrait: il se cachera de suite, et vainement, pour obtenir qu'il pose, tenterez vous de le séduire : le plus misérable d'entre eux résistera aux offres les plus brillantes. Livrer son image à un tiers, c'est — dans leur étroite superstition — attirer sur soi tous les dangers imaginables.
Au Japon, très hospitalier, l'art est partout, comme mêlé à l'air que l'on respire. Aussi les Japonais, sont-ils passés maîtres dans la science de vivre et de peindre la vie — la leur bien entendu, qui n'est pas plus celle des Chinois qu'elle n'est la nôtre.