Probables que les éléments fluides entraient en résonance avec ses mondes intérieurs et sur un mode inédit. Par exemple elle éprouvait une joie intime lorsque la neige tombait, précipitation qui habitait l'espace, donnait du flou au paysage et un drôle de poids au silence.
En février 1948, elle écrit « Il neige, on ne sait quoi : est-ce un flocon ? est-ce un pétale ? Et je vois lentement mourir les nacres du rêve. »
Elle ressentait cette capacité de la matière blanche à préserver l'espace personnel … Sûrement pour ça que les floraisons, les nuages, les eaux, les vagues, les brumes étaient devenues ses sujets sans qu'elle eût besoin d'en décider. Ils faisaient partie d'elle avant même que son corps ne les eût perçus, avant même que ses yeux ne les eussent reconnus. Ils étaient tapis dans sa nuit.
En effet Richarme a souvent décrit le printemps, coupoles neigeuses de fruits pareilles à des nuages aux abords très doux, très déliés.
À un moment donné, plus de ciel.
Rien que chants duveteux et musiques nacrées d'une métamorphose – un thème suffisamment léger et poétique pour soutenir ses recherches autour de la couleur.
À parcourir l'ensemble des Printemps, on voit comme l'impression de lumière et de renaissance s'était peu à peu substituée à la réalité des corolles éphémères. Le ciel s'était effacé, les atmosphères étaient devenues plus riches et dorées, la composition avait gagné en force.
Printemps jaune, 1958. La toile gorgée de soleil concrétise ses rêves et tentatives... cette même année elle écrira « Je me contente de peindre le printemps sans lassitude, c'est ma manière à moi d'y demeurer. » L'art était devenu son refuge, une façon distinctive d'éloigner ses chagrins.
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« J’aime cueillir la valve irisée
Qui fleurit au matin sur la grève déserte
La coquille idéale et vert de grisée
S’offrant à moi comme une paume ouverte.
J’aime aller pieusement à ta découverte
Riante certitude éclose dans l’eau verte
Du moi marin l’abîme incommensurable en sommeil
Je voudrais aussi faire naître la merveille
Et qu’à mes lèvres salées le mot aimable affleure
Et vague, conque vibrante pour une existence meilleure. »
Poème de Colette Richarme, juillet 1947, suite à une balade sur la plage de Palavas – hors ouvrage, présent sur le site dédié à la peintre : richarme.fr | & pp. 202-3, 80 & 102