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sur 485 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je ne sais lequel, de ces quatre parents, est le plus détestable... Ferdinand, 11 ans, a donné un coup de bâton à son copain Bruno, lui brisant deux incisives. Civilisés, les parents de Bruno, Véronique et Michel, invitent Annette et Alain à rédiger un constat à l'amiable. Ceux-ci reconnaissent sans difficultés la culpabilité de Ferdinand, et acceptent qu'il vienne s'excuser auprès du pauvre Bruno.
Si Alain, pendant la discussion, ne cessait pas de décrocher son téléphone pour des affaires de médicaments pas fiables - il est avocat pour une entreprise pharmaceutique - sans doute n'aurait-il pas fini par agacer tout le monde et la discussion en serait restée là. Mais Véronique, en bonne samaritaine, cumule les commentaires acides sur le respect et la bonne éducation, et Annette commence à voir rouge...
Après tout, c'est Bruno qui a commencé en traitant Ferdinand de "balance", la violence verbale ne compte-t-elle pas? Et que penser de Michel, qui a jeté le hamster de sa fille dans la rue, la veille? N'est-ce pas cruel?
Les attaques fusent, et nos chers quatre civilisés, peu à peu, se révèlent dans leurs bassesses.

J'avais adoré l'adaptation de Polanski, Carnage, et surtout le jeu de Kate Winslet et Jodie Foster. Quant à la picèe de théâtre, que j'ai seulement lue, je regrette juste qu'elle tourne ainsi à la farce à la fin et que les personnages , finalement, soient si stéréotypés. Mais il s'agit quand même d'une bonne lecture acide-amère sur notre société.
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Deux couples se rencontrent pour évoquer, sereinement, en principe, une rixe banale entre leurs grands enfants respectifs. Et ça dérape… Un de ces incidents anodins qui dégénèrent en affrontements dramatiques, et qui révèlent chez certains le démon qui sommeillait en eux.

D'un côté les parents de l'agresseur, Annette et Alain Reille. Lui est avocat surbooké pour qui cet incident est une perte de temps ; elle est une mère de famille totalement débordée, dépassée par son grand ado de fils. Ils viennent donc s'excuser et solder le conflit avec Véronique et Michel Houllié, parents du gamin amoché.
Lui est vendeur en gros articles ménagers, un bon nounours pataud qui ne semble pas trop se prendre la tête dans la vie. Tout à l'opposé, Véronique est une femme « concernée ». Concernée par les droits de l'homme, concernée par la faim dans le monde, concernée par les conflits meurtriers. Elle est aussi férue d'art moderne, collectionnant religieusement les catalogues d'exposition. Autant dire qu'elle forme avec Michel un couple atypique.

Au début de la visite chacun y va de ses protestations polies pour minimiser l'incident, les Houllié assurant qu'ils ne demandent pas de réparation financière, les Reille promettant de faire la leçon à leur bagarreur de fils. Et puis on en arrive aux modalités des excuses. le jeune agresseur doit-il venir officiellement demander pardon ? Doit-on lui appliquer une punition ? Laquelle ? Et là, alors que la discussion s'engage, ça commence à partir en vrille. Alain ne peut renoncer longtemps à être un avocat débordé et décide de répondre aux appels pressants qui font vibrer son portable, vociférant ses conseils à ses clients, d'horribles représentants de firmes pharmaceutiques poursuivies pour un médicament défectueux. Et Véronique, la reine du politiquement correct et des bons conseils en matière d'éducation, commence à tout dramatiser… Si bien, que petit à petit, la tension monte autour de la table basse, du clafoutis et des tulipes, jusqu'à un point critique où tout ce petit monde « péte les plombs »…
Un huis-clos psychodramatique qui évoque « délicieusement » les paradoxes de la condition humaine….et qui questionne le "vivre ensemble".

Dans l'adaptation cinématographique « Carnage » - interprétée par Jodie Foster, Kate Winslet, C. Waltz et J.C. Reilly – Roman Polanski règle la mise en scène. Un film jubilatoire, serré comme un expresso italien.


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« Véronique, moi je crois au dieu du carnage. C'est le seul qui gouverne, sans partage, depuis la nuit des temps »... « la morale nous prescrit de dominer nos pulsions mais parfois il est bon de ne pas les dominer. On n'a pas envie de baiser en chantant l'agnus Dei. »
Cette réplique clé d'Alain, un des quatre protagonistes de ce "huis clos" donne le ton, la couleur, le propos de la pièce de Yasmina Reza : deux visions du monde qui s'opposent.
Celle d'Alain qui croit à la loi du plus fort, d'un monde où l'homme est un loup pour l'homme, dans lequel la raison du plus fort est toujours la meilleure, qu'adopter cette philosophie en cherchant à être dans le camp des vainqueurs permet d'autant mieux de profiter d'un monde dont on a accepté par avance la règle ou l'absence de règles.
Celle de Véronique, militante convaincue, droit-de-l'hommiste impliquée, persuadée, elle, que l'homme est perfectible et que pour ce faire, l'humanisme, la solidarité, la culture, le progrès sont la clef de voûte d'un monde meilleur.
Cette rencontre de quatre personnages, deux couples : les hôtes : Véronique et Michel Houillé... les "invités" : Annette et Alain Reille, quadragénaires de la petite ou moyenne bourgeoisie parisienne, est donc placée sous le double signe de la fable - le loup et l'agneau - ou de l'affirmation sartrienne " L'enfer c'est les autres " et de la vision sarcastique d'un Jean Yanne s'évertuant à nous montrer malicieusement que - Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil -...
Les Houillé reçoivent donc dans leur appartement les Reille suite à une altercation qui a vu Ferdinand Reille, onze ans, assener un coup de bâton sur le visage de Bruno Houillé, onze ans également, après que le second ait gratifié le premier du qualificatif de "balance".
Résultat : Bruno a deux incisives abîmées et un léger hématome à la lèvre.
Les parents se rencontrent donc pour une explication que chacun veut courtoise et pour s'entendre sur les termes et la conclusion amiable d'un constat où l'accord commun semble acquis.
Chacun des protagonistes cherche à se montrer sous son meilleur jour. Chaque couple veut donner l'illusion de l'union, de l'entente harmonieuse. Chacun des membres de chacun des couples faisant en sorte, dans un premier temps, d'afficher une solidarité et une complémentarité réciproques et à toute épreuve mais... de façade.
Car le vernis ne va pas tenir longtemps confronté aux tiraillements que la "réalité" inflige aux masques dont se sont parés les personnages ; les vrais visages vont finir par les remplacer.
L'amabilité circonstancielle va alors céder la place à l'agressivité, à la violence... au dieu du carnage.
Le Ça va au fil de la rencontre reléguer aux oubliettes de la civilité un Surmoi penaud et dicter sa loi à un Moi contraint à la soumission,

Partie d'une querelle d'enfants, certes violente, une explication domestique va dégénérer en pugilat général, en foire d'empoigne où des comptes vont commencer à se régler entre les couples et à l'intérieur des couples,
Cette déliquescence d'homo educatus educans réduit crescendo à l'état de "vilain sauvage" va permettre à Yasmina Reza, dans un décor minimaliste, dans une pièce en un acte, lequel n'est pas divisé en scènes, de nous offrir une pièce drôle, caustique, violente, polémique... base d'une réflexion intemporelle sur la nature de l'homme.
Celui-ci est-il un bon sauvage que 6000 ans de civilisation ont conduit à un état d'individu sage et raisonnable ou demeure-t-il un animal culturel toujours habité par ses instincts primaires ?
La pièce écrite en 2006 est sthénique, les personnages ont du corps.
Les trouvailles de l'auteure... Alain Reille, avocat défendant un labo qui couvre les effets secondaires d'un de ses produits hypertenseurs et, concours de circonstances aidant, ledit produit fait partie du traitement de la mère de Michel Houillé, "actualise" la cocasserie du "malentendu"... malentendu rendu plus efficace encore par le biais des incessants coups de téléphone donnés et reçus par les deux maris marris... quiproquos amplifiés par "la double énonciation" qui établit la connivence avec le public et donne l'impression dans le même temps d'un nombre plus grand de protagonistes dans la pièce et par conséquent sur scène ...
Superbe trouvaille que les "pérégrinations" d'un certain hamster que la musophobie de Michel a contrait à un exil forcé, à une errance désespérée en milieu urbain... exil auquel fait écho le désespoir de sa fille séparée de son cher animal de compagnie...
Tous les thèmes et leurs controverses abordés, toutes les situations concourent à donner à cette lecture corps et vie, à susciter l'intérêt, à offrir au lecteur un bon moment... moment loin d'être perdu, car la pièce offre matière à jubiler et à cogiter.
Exception faite de la réputation sulfureuse qu'il a acquise, ce n'est pas un hasard si Roman Polanski ( très grand metteur en scène ) a fait de cette pièce un film que j'ai pris plaisir à voir à sa sortie en salles.
Film dont Yasmina Reza a écrit le scénario et pour lequel elle a été "Césarisée".
Ce n'est pas un hasard non plus si - le dieu du carnage - continue d'être joué dans le monde entier.
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C'est la deuxième fois que je lis une pièce de cette auteure. J'adore son humour décapent. Elle fait d'une situation simple au premier abord et fait évoluer ses personnages à l'extrême dans cette situation. Ici nous avons deux couples qui se réunissent pour parler de leurs chers bambins. le sujet de dispute par excellence qui peut dégénérer pour notre plus grand bonheur.
Yasmina Reza pousse à l'extrême la situation et pointe du doigts certains comportement de l'homme et la femme. Il n'y pas un adulte pour en rattraper un autre. L'auteure arrive même à nous faire oublier la vraie raison de ce rendez-vous rocambolesque.
Encore un très bon moment de lecture que j'aimerai voir sur scène.
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"Madame, votre fils est un sauvage".
Un enfant "armé" ou "muni" d'un bâton a cassé les dents d'un autre. Les parents se donnent rendez-vous dans un salon, autour d'un clafoutis, pour traiter l'incident "à l'amiable".
Sauf qu'il faut dire ce qui est, l'éducation parentale est un sujet polémique. La politesse et les civilités, ou les restes de l'éducation des parents, n'empêchent en rien à leur vraie nature de crier, de s'en prendre aux autres, de faire de la casse, un carnage ; même s'il y a une espèce de "flottement" (en didascalie) qui marque la frontière entre ces deux états : l'état de nature et l'état civilisé. Ce qui est le plus intéressant dans la pièce, c'est comment on tente d'"aplanir cette situation au lieu de l'envenimer" et comment la faille, au contraire, s'aggrave, jusqu'au burn-out. ( is coming !)

"Nous avons la faiblesse de croire aux pouvoirs pacificateurs de la culture !" (p.36)

Film conseillé à tous ceux qui aiment les états limites : Les Nouveaux Sauvages de Damián Szifrón
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Bon moment de lecture que ce Dieu du carnage, lu dans le cadre du programme de seconde de mon grand fiston. Belle joute verbale, ambiance qui va crescendo, les relations humaines de notre société contemporaine mises à nues sans fard : parentalité, bienséance, relations de couple, tout y passe. Pas très encourageant sur le plan humain, mais tellement vrai, j'aurais adoré voir cette pièce sur scène !
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👦 « MICHEL. le Clafoutis est-il un gâteau ou une tarte ? Question sérieuse. Je pensais dans la cuisine, pourquoi la Linzertorte est-elle une tarte ? Allez-y, allez-y, on ne va pas laisser cette tranchette.
VERONIQUE. le clafoutis est un gâteau. La pâte n'est pas abaissée mais mêlée aux fruits.
ALAIN. Vous êtes une vraie cuisinière.
VERONIQUE. J'aime ça. La cuisine il faut aimer ça. de mon point de vue, seule la tarte classique, c'est-à-dire aplatie, mérite de tarte.
MICHEL. Et vous, vous avez d'autres enfants ? »
(P. 36-37)

👦 Ah si Ferdinand n'avait pas tapé son jeune camarade Bruno avec un bout de bambou, il ne manquerait pas deux dents à ce dernier… Maudites soient ces petites têtes blondes qui se comportent si mal et qui, par conséquent, font se rencontrer les parents qui doivent régler ça au pays de la diplomatie. le problème dans de telles situations, c'est qu'il faut faire des concessions… mais à quoi bon ? Quand chaque couple campe sur ses positions, la souplesse d'esprit disparaît et laisse place à des pensées et paroles aussi fallacieuses qu'absurdes…

👦 D'ailleurs, les parents de Ferdinand ne sont pas dupes : si leur fils a agressé Bruno, c'est qu'il y a eu provocation. Lequel des deux a commis l'action ou la réaction ? Violence physique oui merci, mais quid de la violence verbale ? Sans cesse interrompus par le téléphone d'Alain qui ne cesse de sonner (quelle idée d'être avocat d'un groupe pharmaceutique), Véronique s'agace peu à peu, le ton monte, les piques sont lancées, les mondanités sont laissées de côté. Très vite le sujet n'est plus cette blessure ridicule ni le pourquoi du comment de celle-ci ; il s'agit d'un duel, du combat d'ego entre les pères (oui, eux aussi se sont battus étant plus jeunes, et la défaite était exclue) et entre les mères qui tentent de se faire une place, de faire entendre leurs voix à leurs maris. Malheureusement pour elles, c'est un avis sur le clafoutis qu'on leur demande, une bassine qu'on leur tend, un verre qu'on leur refuse.

👦 Comme à son habitude, Reza puise dans notre quotidien banal des situations normales qu'elle exagère au maximum pour les rendre absurdes. Qu'il s'agisse de l'éducation, du jugement permanent de l'autre ou de l'irrespect, elle fait le portrait au vitriol d'une société qui évolue dans un manque qu'elle peine à combler, mais qu'elle tente de noyer dans des futilités, des téléphones et des cigares, des questions dont les réponses n'ont aucune importance… Les mots s'accumulent mais les phrases n'ont aucun sens, le discours est inexistant : quand on parle… à quelle fin le fait-on ?
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Ça m'a amusée de voir comment les personnages s'enlisent dans leurs disputes et leurs tentatives de conciliations. En effet, « le dieu du Carnage » est une pièce de Yasmina Reza publiée en 2007 qui nous dévoile la vie de deux couples bourgeois qui tentent de masquer leurs problèmes conjugaux. Les deux couples se rencontrent chez Véronique et Michel afin de régler, de manière civilisée, le conflit survenu entre leurs fils de onze ans. le fils d'Annette et d'Alain a frappé l'autre petit garçon à l'aide d'un bâton, lui faisant ainsi disparaitre deux dents de la mâchoire. L'après-midi de ces deux couples se conclura par une déchéance extrême, dévoilant ainsi aux spectateurs, la vraie nature des quatre personnages. le tout est couronné d'un humour qui souhaite critiquer l'hypocrisie conjugale mondaine et le bien paraitre qui cache des défauts grossiers.
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Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas lu une pièce de théâtre de Yasmina Reza. C'est avec joie que je me suis plongée dans le Dieu du carnage. Il s'agit ici d'une mise en abyme du conflit : conflits de deux enfants, que les parents tentent de désamorcer pour, par la suite, eux-mêmes entrer en conflit !
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Féroce, mais pas seulement. Impitoyable, mais pas seulement. Mené avec une telle maestria. L'évolution des personnages vers la sauvagerie, j'imagine Isabelle Huppert dans la distribution lors de la création, une sacrée claque. Et cette fin... Pour moi, pas moins qu'une tragédie au sens classique du terme.
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