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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une petite centaine de pages suffisent pour sceller une vie dans la misère et la folie... William, exilé cubain à Miami, comme tant d'autres, et alter ego de Guillermo Rosales atterrit au dernier degré de la pauvreté avant celui de la rue: sa tante l'amène dans un "Boarding home", sorte d'asile privé qui accueille aliénés mentaux et immigrés indésirables. En l'occurrence, William est doublement concerné, malgré une carrière prometteuse d'écrivain, avant sa déchéance.

Guillermo Rosales aborde ici son expérience personnelle de l'exil politique et de l'enfermement : les descriptions de ce boarding home sont crues et difficilement tolérables tant on tombe au fond d'un inhumanité ordinaire, malgré une faible lueur d'espoir. C'est sans concession ni morale, le narrateur n'est pas blanc non plus dans ses actes, et c'est un témoignage bouleversant de comportements abjects bien réels.
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Ce livre m'a profondément dérangée car dérangeant et si vous ne ressentez pas quelque gêne en le lisant, c'est soit que vous êtes insensible, blindé comme une carapace ou encore que vous êtes fou vous-mêmes. Oui, car telle est bien l'histoire, celle que tout le monde prend pour un fou : l'histoire de William qui, comme tant d'autres réfugiés cubains aux Etats-Unis, après avoir vécu l'enfer à Cuba, sont partis pour ne plus jamais revenir? Ce qu'ils ne savaient pas, c'est qu'une autre prison les attendait à l'arrivée : celle que l'on appelle les "boarding home", véritable asile psychiatrique. Certes, tous les Cubains n'y ont pas été enfermés mais ceux qui avaient un profond dérèglement mental (du moins, au vu des autres) y étaient et l'enfer continuait de nouveau, pour ceux qui étaient fous sans vraiment l'être. C'est le cas de notre protagoniste qui, comme tant d'autres, se voit réduit à l'état d'animal de par les conditions de vie qui lui sont imposées. Pas d'hygiène, pas de nourriture convenable, des bourreaux en tant que surveillants ou encore hommes crapuleux, bref, je vous en passe pour ne pas vous révulser d'entrée envers cette lecture.

En arrivant dans ce home, William était d'une extrême maigreur et lorsqu'il en ressortira (enfin, si il en ressort un jour), son état n'aura pas changé. Obligé de cohabiter avec des véritables fous, lui, qui a lu tout Proust, Hemingway et bien d'autres à l'âge de quinze ans, notre narrateur se fait peu à peu une raison jusqu'à ce qu'il rencontre Francine, une nouvelle pensionnaire. Cette rencontre-là, il y en a rarement deux dans une vie et cela va véritablement le changer et surtout, lui redonner espoir...Espoir en la vie et espoir en l'amour. Cependant, si tout se terminait comme dans un conte de fées, ce livre n'aurait pas de raison d'être mais je ne vous en dirai pas plus par peur de trop vous dire.

Un ouvrage qui m'a parfois donné la nausée je l'avoue mais que je ne regrette pas d'avoir lu, bien au contraire. Je ne peux que vous en recommander la lecture mais vous préviens : ayez le coeur bien accroché !
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Miami...Bienvenue dans un boarding home dont je ne connaissais ren dans lequel sont "logés" les "fous". Vous y entrez quand la folie est présente mais c'est loin d'être une pension de famille car ici règnent la crasse, la pisse, les cris, les abus et le profit pour ceux qui les tiennent aux dépens des malades. le narrateur, William, l'auteur car lui-même fut hébergé dans un de ces lieux, atteint de schizophrenie, exilé cubain, témoigne des "soins" reçus auxquels il survit en partie grâce à la poésie et à son ange rencontré dans cet enfer. Un court roman, fort, dérangeant dont on ressort écoeuré, mal à l'aise et au bord du malaise. Un roman témoignage à la fois de l'exploitation de la misère humaine, de la détresse de ceux qui rêvaient du miracle américain mais également d'un auteur sur le fil et qui se suicidaire 3 ans plus tard
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Un boarding home, à Miami, c'est théoriquement une pension, un internat, mais c'est en réalité une sorte de prison pour réfugiés cubains fous, handicapés mentaux, vieux, tous reniés par leur famille.
Lorsque William, écrivain raté amateur de poésie, ex révolutionnaire castriste désillusionné, y est placé par sa propre famille, car il souffre d'hallucinations auditives, il ne se fait pas d'illusions : « je savais que ce serait mon tombeau ». Son regard lucide, détaché et froid sur l'insalubrité des locaux et sur les violences quotidiennes qu'y subissent ces personnes sans défense et sans ressources, est absolument glaçant. On est proche de l'ambiance de « Vol au-dessus d'un nid de coucou ».
Il y perdra ses dernières illusions, lorsque lui sera volée l'opportunité de vivre une vie normale de citoyen.
A travers le personnage de William, Guillermo Rosales nous offre un témoignage sidérant de sa propre expérience dans un de ces lieux inhumains.
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J'ai reçu une immense claque en lisant ce témoignage romancé sur la folie et le rejet qu'elle provoque. N'y aurait-il aucune autre issue que de laisser cet écrivain inspiré dans cet asile sordide qui réunit toutes les détresses humaines?
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William Figueras est un exilé, un exilé "total", selon ses propres termes. Il a quitté Cuba il y a six mois pour Miami, où se trouve une partie de sa famille, mais il est persuadé qu'il aurait fui quel que soit l'endroit où il aurait vécu. On pourrait même dire que William est un exilé du bonheur et de l'espoir, qui vit en marge d'une normalité où il ne peut trouver sa place.
Cet amoureux des lettres, qui a lu Proust, Faulkner, Hesse, Mann ou Joyce a écrit il y a vingt ans un roman qu'il n'a jamais pu publier, et il en est devenu fou, à voir des diables sur les murs, à entendre de voix qui l'injurient.

En désespoir de cause, après son internement (en six mois donc) dans trois asiles d'aliénés, sa tante vient de le laisser dans un boarding home, " refuge marginal où échouent ceux que la vie a condamnés, des fous pour la plupart, où des vieillards abandonnés par leur famille".

Y cohabitent des laissés-pour-compte dignes d'une Cour des miracles, êtres édentés aux regards vides, aux corps malpropres -certains s'urinant continuellement dessus- et décharnés, dont l'esprit souvent déraille, et qui pour la plupart ont perdu tout amour-propre.

Livrés à eux-mêmes, ils subissent la férule d'un propriétaire cupide et malhonnête qui détourne les aides de l'état qu'ils perçoivent. Et pour optimiser son profit, il rationne leur nourriture et laisse la pension dans un état de saleté inacceptable.

William en est conscient : le boarding home, c'est la dernière étape avant la rue, avant l'ultime déchéance. Après, il n'y a plus rien.

Mais il est fatigué. Alors il se laisse dégringoler, adopte naturellement les codes de ce microcosme marginal, se soumet aux pulsions de violence que suscite le spectacle de ces plus faibles qui le dégoûtent… jusqu'à ce que Francine arrive, une "nouvelle petite folle" propre et jolie, mutique et passive, avec laquelle il entame une relation brutale et passionnée. Ils se prennent à rêver un retour à une vie "normale"… Illusion…

William déroule son triste parcours avec une impitoyable sincérité, et une lucidité désespérée, sa voix investissant l'esprit du lecteur pour y faire naître des visions sombres et pathétiques, propres à le hanter longtemps après avoir refermé la dernière page de "Mon ange".

Un texte fort.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Pour qui croirait à la chance, au destin, aux faveurs des astres, il ne serait pas à douter que Guillermo Rosales n'a pas goûté leurs faveurs. Arrivé à Miami, en Floride, après avoir connu les tourments du régime castriste sur son île natale, Cuba, il fut placé par sa famille au sein de l'une de ces maisons d'accueil appelée boarding home ou halfway house, et qui n'ont d'accueil que le nom. C'est dans ce type d'endroits qu'il demeura une majeure partie du temps qu'il passa sur le sol américain, de 1979 à sa mort, en 1993. Mon ange relate son arrivée à Miami, dans le boarding home d'un certain M. Curbelo, et l'on est surpris par le choix de ce titre qui, en comparaison avec le propos du livre, lui confère une puissante valeur oxymorique. Car rien, dans ce récit auto-fictionnel, ne relève de la douceur éthérée ou de la grâce angélique. Tout y est monstrueusement sale, violent, désespérant. Cruelle description du sort réservé à une partie des migrants cubains arrivés sur le sol floridien, le récit tord net le cou à l'imaginaire reluisant du rêve américain, sans pour autant indiquer un quelconque regret de l'île quittée. L'homme, où qu'il se trouve, et Rosales en témoigne, n'est jamais qu'une proie pour ses semblables.

Quel mot pourrait le mieux résumer ce qu'est un boarding home, si ce n'est le mot "enfer" ? Habitée autrefois par une famille américaine, la maison que découvre Rosales est devenue tant un cloaque qu'une prison et un asile où vivent, isolés et oubliés du monde, ceux et celles dont ne peuvent ni ne veulent s'occuper les familles. Là, une vingtaine de personnes sont placées sous l'autorité omnipotente de M. Curbelo et d'un gardien tyrannique, Arsenio. Là est abandonnée toute idée de dignité humaine ; la crasse, la sueur, l'urine et la merde imprègnent chaque parcelle de tissu, chaque mètre carré de ces chambres où les résidents dorment par deux. Toilettes bouchées, excréments à même le sol et compagnie des blattes font l'ordinaire de cette maison dont M. Curbelo tire des revenus très confortables, lesquels lui permettent de côtoyer la bonne société de Miami. Confisquant leur aide sociale, M. Curbelo tient à sa disposition ces malades mentaux - schizophrènes, attardés, bipolaires - dont la société ne veut pas. D'ailleurs, William Figueras - l'alter ego littéraire de Guillermo Rosales - a été placé là par sa propre famille, puisqu'il "n'y a plus rien à faire", dixit sa tante. Dans ce microcosme où il n'est aucun échappatoire, il se développe des habitudes et des rituels auxquels Figueras finit par se conformer. Ainsi du petit déjeuner, en fait un verre de lait froid, distribué le matin par Arsenio qui, l'annonçant, ameute l'ensemble de la maisonnée. Ainsi cette habitude d'uriner et de déféquer sur ce que les résidents auront placé dans la cuvette des WC : rideau, maillot sale, imperméable. Plus encore, Figueras fait sienne la loi du plus fort, qui établit une hiérarchie stricte entre les résidents, dont le sommet est Arsenio, homme de confiance de M. Curbelo et tyran redoutable pour chacun. Cette forme de gouvernance des affaires internes à la maisonnée autorise ainsi la brutalisation des plus faibles et les attouchements et autres viols ses femmes. Arsenio couche ainsi avec Hilda qu'il contraint à des pratiques qu'elle ne désire pas. Figueras, qui finit par nouer, sinon une amitié, du moins une certaine connivence avec Arsenio, prend aussi le vil pli d'imposer sa personne et sa volonté aux autres par la force. On le voit alors voler son camarade de chambrée, qui travaille de nuit dans une pizzeria ; on le voit frapper le vieux Pépé, fragile et incontinent. La maison de fous - au sens propre comme au figuré - semble être la reproduction miniaturisée du monde extérieur où, sans égards pour les faibles, les malades, ceux que la vie aura outragés et brisés, ceux qui détiennent quelque chose ressemblant à du pouvoir - la force physique suffit - exerce celui-ci pour tout accaparer.

L'arrivée dans le boarding home d'une nouvelle résidente, Francine, - dont la litanie des "mon ange" donne son titre au livre - constitue l'acmé et le dénouement du récit. Acmé, parce que Figueras accueille cette femme comme il a déjà pris l'habitude de traiter les autres résidents. Dans un mélange de frustration et d'adoration, d'envie de destruction et de protection, Figueras tantôt caresse et baise le corps de cette femme, tantôt le pince et l'étrangle. Sur ce corps, il peut exercer une volonté tyrannique et une force qui ne rencontre aucune résistance ; mais cette âme, qu'il devine bouleversée par des événements brutaux, lui ouvre aussi un avenir possible et paisible, une histoire d'amour d'apparence banale, une vie en dehors du boarding home et des méchancetés quotidiennes. Seulement, des deux âmes, l'une qui conserve encore un peu de force, l'autre complètement résignée et qui s'accroche au moindre morceau d'humanité, l'une - Figueras - parvient à se détacher de l'emprise de M. Curbelo quand l'autre retourne entre les griffes de quelque lointaine famille.

Mon ange signe ainsi la fin d'une illusion. Nulle part, la vie n'est meilleure pour l'homme de peu. Nulle part - ni dans l'île communiste, ni dans le grand pays où tout est prétendument possible -, l'homme qui a montré quelque faiblesse n'est protégé. Pis, il est exposé à toutes les maltraitances, physiques comme psychologiques. La galerie de personnages qui se trouvent au boarding home est un échantillon de ces hommes et femmes qui, un jour, ont cru : à la littérature comme Figueras (qui a lu tous les grands auteurs à quinze ans), à la dignité de la bourgeoisie comme Hida, à la possibilité d'une vie meilleure, comme certainement quelques-uns des résidents. Au moins, si le rêve américain semble sérieusement ébréché, l'expérience cubaine l'est tout autant. Ce qui est pris là-bas - la liberté, la dignité - n'est pas permis ici. L'expérience de Figueras / Rosales doit donc être comprise au-delà des lectures idéologiques. Aucun système de pensée, aucun parti-pris sociologique ou économique ne saurait justifier le traitement réservé à ces hommes et femmes. Au début du roman, Guillermo Rosales écrit d'ailleurs que ce livre n'a rien à voir avec la politique. Exilé total, c'est bien au tombeau qu'il est promis.
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Lorsque j'ai lu à la toute fin le contexte du récit (livre longtemps interdit, récit semi-autobiographique) cela m'a fait reconsidérer la profondeur de l'histoire. J'ai eu le sentiment de lire une longue nouvelle, et c'est dommage car je pense qu'il y aurait eu bien plus à dire avec la matière disponible. J'ai eu le sentiment de lire comme une ébauche; un premier jet, auquel j'ai trouvé beaucoup de charme. Les thématiques abordées, la maladie mentale, l'exode cubain aux USA, les désillusions du communisme, auraient pu être plus approfondies. L'écriture est agréable, plutôt fluide. En bref, mitigée mais pas déçue.
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Voilà une des étoiles filantes de la littérature. Guillermo Rosales, cubain, né en 1946, est très tôt remarqué comme romancier mais il n'est pas publié à Cuba où règne l'ordre politique et moral. Dépressif, malade, il choisit l'exil en 1979. Il continue à écrire malgré ses internements successifs et "Boarding Home" ("Mon ange") est publié en 1986 à Miami. En 1990, il bénéficie d'une chambre dans un immeuble d'Etat pour nécessiteux et se suicide en 1993, trois ans après son ami Reinaldo Arenas.

Tous ces éléments sont nécessaires à connaître car "Mon ange" est bien sûr complètement autobiographique. Dans cette maison de fous crasseuse, l'auteur va rejoindre le rebut de la diaspora cubaine. Aucun pathétique dans ce récit. C'est la description précise, souvent sarcastique, à la première personne et au présent, d'une situation sans issue.

L'Amérique y a vu la critique de la révolution cubaine, et Cuba la critique du mode de vie américain…
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Fuyant le régime carcéral de Cuba, W. Figueras, un écrivain se retrouve aussi rejeté par sa famille américaine dans un asile de fous. Ils ont honte de ce cousin cubain qui délire et qui refuse de s'insérer. Quand sa tante le dépose comme un malpropre dans un asile sale et indigent, elle insiste bien sur le fait qu' "il n'y a plus rien à faire". W. Figueras doit survivre au milieu de résidents plus laisser pour compte que fous... Il tombe amoureux et veut s'enfuir avec sa dulcinée. Ce court récit enchante par sa poésie humaniste et la tendresse des portraits mais il me convainc moins quand à la description sociale. le désespoir y est une impasse trop facile.
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