Jane Eyre, ce grand classique de la littérature, ce roman doté d'un lyrisme absolument sublime et d'un romantisme parfaitement maitrisé a donc été transformé en un texte érotique à la mode de ces dernières années (non, je vous promets que je ne citerai pas cette saga qui commence par un « C »!) par une auteure qui répond au nom de
Karena Rose. « Ne jugeons pas au premier regard, ai-je pensé en me dirigeant vers un siège, le bouquin à la main. Après tout, peut-être que c'est un pastiche qui rend vraiment hommage à
Charlotte Brontë. » Sauf que dès les premières pages, j'ai très vite compris que j'allais détester ce roman pour une raison simple: LA PLUME DE L'AUTEUR EST INEXISTANTE. Je m'explique:
Jane Eyrotica, en gros, c'est un texte qui
reprend la narration de Charlotte Brontë, et Karena Rose s'est contentée d'insérer des scènes de sexe dans cette narration. Sauf qu'encore une fois, ces scènes-là semblent avoir été copiées-collées d'un roman Harlequin. CE ROMAN, C'EST SEULEMENT UN CROISEMENT ENTRE JANE EYRE, ET UNE HISTOIRE SENTIMENTALE DE BAS ÉTAGE.
Pardonnez-moi de m'insurger, mais
Jane Eyre est une oeuvre qui est vraiment placée très haut dans mon estime.
J'ai parcouru les pages de ce livre avec nonchalance en oscillant entre mon désir de le balancer sur l'étagère la plus proche, et mon désir (ridicule et inutile) de continuer ma lecture pour tenter de déceler une quelconque originalité dans l'intrigue, ou alors, un passage émouvant. Cependant, je me suis contentée de glousser, de soupirer, et d'ouvrir des yeux stupéfaits face aux
scènes d'amour fades et longues (trèèèèèèèèèès longues) entre Jane Eyre et M. Rochester. » Qu'est-ce que c'est que ce livre? Est-ce que je suis en train de rêver? Ce truc est vraiment dans mes mains? » me suis-je demandé.
A vrai dire, ce n'est pas seulement la merveilleuse alchimie qui unissait Jane et M. Rochester qui a été mise à la trappe, dans ce bouquin: le personnage de
Jane Eyre a aussi subi un massacre phénoménal à tel point que je me demande comment on pourrait faire pire pour détruire un personnage. Dans le roman de
Charlotte Brontë, à mes yeux,
Jane Eyre était un personnage extrêmement bien réussi: à la fois timide, audacieuse, courageuse, sensible, froide, passionnée et intelligente, chacun de ses dialogues et de ses actes m'impressionnaient. Ici, dans
Jane Eyrotica, je pourrais la décrire en une phrase:
La Jane Eyre de ce roman, à l'instar d'un étalon vigoureux, couche avec tout ce qui bouge et ne sait rien faire d'autre de sa vie. Il est vrai que pour échapper à la sourcilleuse morale victorienne, multiplier ses parties de jambes en l'air par cent est une excellente solution !
Parlons de la chronologie du livre, à présent (très brièvement). Je rappelle que j'ai découvert ce roman il y a presque deux ans, donc j'omettrai sûrement des passages, et peut-être même que je me tromperai (auquel cas, je n'en voudrai à personne de me prévenir).
Au départ, Jane vit donc chez sa tante, Mme Reed, qui la méprise. Elle doit également subir l'autorité et les railleries de ses cousins. Et, pour combler le vide et la cruauté de son existence, la jeune fille laisse libre cours à ses pulsions sexuelles (l'auteure lui a donné six ans de plus que son âge pour ne pas choquer le public, ce qui, soit dit en passant, ne change pas le fait qu'il est étonnant de voir une adolescente si jeune, sans expérience, habitant dans une demeure campagnarde exclue du reste du monde, avoir autant d'intérêt pour les plaisirs de la chair.) Donc, quand Jane s'ennuie, elle se fait « plaisir » devant un livre plein d'illustrations coquines (où a-t-elle pu se procurer de pareils livres en pleine époque victorienne??) ou alors, elle se fait peloter par son cousin John Reed d'une manière plutôt sadique – d'ailleurs, elle et John Reed ont une relation très conflictuelle, dans la version originale – mais, j'ai une explication possible quant à l'interprétation de l'auteure par rapport à leur relation: à la page 22, dans la version originale, les servantes surprennent Jane et John Reed en train de se battre, et l'une des servantes s'exclame: » vit-on jamais semblable image de la passion ! ». le mot passion ayant interpelé Karena Rose, elle s'est dit: « Ah bah tiens, puisqu'il est question de passion entre les deux cousins, je vais foutre une scène de sexe à la place de la scène de baston! »M'enfin, après, la jeune Jane finit par quitter la demeure de sa tante pour le rude pensionnat de Lowood. Et bien évidemment, comme vous vous en doutez… il y aura du sexe ! En effet, Jane souffre tellement de la faim et du froid dans ce pensionnat austère qu'il faut bien qu'elle se console. (Là, je suis navrée, mais je ne me souviens plus des détails) Cependant, je me souviens vaguement qu'elle se laisse peloter dans un p'tit coin désert par, eh bien, je ne sais plus qui. Puis, elle grandit, et une fois adulte, elle va exercer sa profession de gouvernante à Thornefield. Un jour, en se promenant, elle rencontre M. Rochester: et cette scène qui est magique et émouvante dans la version originale devient ici une scène… de sexe ! En effet, Jane a le corps et les hormones en ébullition, donc, à peine a-t-elle abordé M.Rochester qu'elle se jette sur lui. Mais, le plus invraisemblable pour moi, c'est qu'ils agissent en plein jour, près d'un chemin… PENDANT QUE VOUS Y ÊTES, ALLEZ-Y: PELOTEZ-VOUS DEVANT L'ENTRÉE DE THORNEFIELD, HISTOIRE QUE TOUT LE PERSONNEL ET LES PASSANTS VOUS VOIENT!!! Non, mais, n'importe quoi!!
Le reste de l'histoire est si redondant que je n'ai pas envie de le décrire:
Jane et M. Rochester passent leur temps à coucher ensemble Voilà. Point à la ligne. Tout ça pour dire que
Jane Eyrotica ne m'a pas du tout convaincu: j'ai plus eu l'impression de lire une parodie ratée.
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