Le 8 décembre 1977, deux religieuses françaises sont enlevées à la sortie de la Messe et incarcérées dans une caserne argentine avec des mères de la Place de Mai et des militants pour les droits civiques ; le 14 décembre douze personnes sont jetées en mer par un commando de la Marine.
Plus de trente années passeront avant que justice soit rendue à Alice DOMON et Léonie DUQUET. C'est ce long combat que raconte l'enquête de
Frédéric SANTANGELO publié en décembre en France et en janvier en Argentine.
Frédéric, Ingénieur et diplômé de Sciences Po Paris, a mené une carrière de consultant avant de rejoindre en 2004 un groupe de médias européen. En 2011-2012, il part en Argentine, s'inscrit à l'Université San Andréa, obtient un Master de Journalisme et rencontre les victimes de la junte et les protagonistes du drame. En dix ans il recueille, analyse et croise l'équivalent de 30 000 pages de sources, émanant de 200 personnes, en Europe et en Amérique Latine. Puis il écrit «
Se taire serait lâche » simultanément en français et en espagnol.
Visitant les familles des religieuses natives du Doubs, puis les Missions Etrangères, l'auteur décrit l'apostolat d'Alice et Léonie qui s'installent en Argentine, aux cotés des plus pauvres, dans un contexte marqué par le
Concile Vatican II, l'émergence de la théologie de la libération, la chute du péronisme et la dictature militaire (1976-1983). Il montre la répression, les disparitions, les clans et les rivalités opposant l'armée de terre, la marine et l'aviation. Il décrit le combat des mères des disparus.
Décembre 1977 voit l'enlèvement de la Santa Cruz, le calvaire des deux religieuses et de leurs co-détenus et leurs assassinats.
Commence alors une mobilisation internationale, des deux cotés de l'Atlantique, avec l'intervention d'Edgar Faure, de l'amiral Sanguinetti, les pressions politiques et diplomatiques, un énorme travail de terrain mené par des associations de défense des droits de l'homme qui aboutiront en 2005 à la découverte de quelques sépultures.
Puis la Justice prend le relais et, bien plus tard, les coupables sont incarcérés et condamnés.
En 460 pages, complétés par un cahier de photographies, des cartes, une bibliographie,
Frédéric Santangelo livre une enquête factuelle, sans pathos ni volonté hagiographique. Il présente des faits, des témoignages, qui, dans leur brutale vérité, restituent l'humble vie des deux religieuses engagées aux cotés des défavorisés. C'est bouleversant, édifiant et il est difficile de sortir indemne d'un tel témoignage.
Publié par les Editions du Panthéon, ce livre diffusé par Hachette est facilement accessible.