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EAN : 9782702410066
Le Masque (10/07/1989)
3.39/5   9 notes
Résumé :
Il est très imprudent de faire des expériences alimentaires avec des champignons d'espèces peu connues. À moins d'être un très grand expert...
- C'est bien là ce qui me trouble. Mon père était un très grand expert.
- Personne n'est infaillible.
- C'est évident, mais tout de même... Et c'est si bizarre que ce soit justement arrivé quand vous n'étiez pas là.
- C'est malheureux, évidemment. Lathom ralluma se cigarette éteinte et répéta : C'est d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique

Un thriller épistolaire presque centenaire ! C'est effectivement en 1930 que Dorothy Sayers a publié son "Documents in the Case", qui fut produit en version française, "Les pièces du dossier", après la 2ème guerre mondiale, à Paris en 1947, comme Livre de Poche Policier.

Dorothy L(eigh) Sayers (1893-1957), de 3 ans la benjamine de la célèbre Agatha Christie, a, comme sa compatriote écrit toute une série d'oeuvres à suspense. Peut-être une production au total moins nombreuse et variée que sa contemporaine, mais avec une pointe d'humour caustique qui fait probablement défaut à la grande Christie.

La petite Dorothy était une gamine douée : son père lui apprenait le Latin à partir de ses 7 ans et une gouvernante lui donnait simultanément des cours de Français. En 1915, elle sera une des premières femmes diplômées à Oxford (en arts et lettres). Cinq ans plus tard, elle aura un doctorat en littérature médiévale.

Les pièces du dossier sont pour la plupart des lettres échangées entre différents personnages vivant et circulant près de l'épicentre du drame, espacées sur une période d'à peu près 2 ans (entre le 9 septembre 1928 et 18 mars 1930).
Cette méthode peu banale permet à l'auteure de présenter progressivement les protagonistes et le contexte du drame annoncé.

Tout à fait au centre, il y a le quinquagénaire George Harrison, intelligent mais exceptionnellement rasoir, dépourvu d'imagination et un tantinet despotique pour sa 2ème épouse, la jeune et belle Margaret, considérée par certains comme une "beauté de banlieue" pas excessivement éclairée. Dans l'appartement d'en haut de leur maison viennent s'installer 2 jeunes artistes : le peintre Harwood Lathom et l'écrivain John Munting. Autour de ces 4 personnages virevoltent quelques autres : l'étrange Agatha Milsom, une intrigante qui réside chez les Harrison ; Elizabeth "Lisette" Drake, la fiancée de Munting et Paul Harrison, fils d'un premier mariage de George.

C'est ce dernier qui fabrique le fameux dossier destiné à Sir Gilbert Pugh, directeur des poursuites judiciaires de Londres, après que son père est retrouvé mort dans sa cabane isolée près de Manaton dans le Devon. Soit dit en passant l'endroit de prédilection de l'auteur John Galsworthy (1867-1933) de "La dynastie des Forsyte", qui y a passé maintes vacances d'été. Apparemment son père est mort empoisonné par des champignons. Hypothèse peu convaincante, puisque George Harrison était un mycologue amateur talentueux !

Et puis, il y a cette romance entre la jolie Margaret et le sympathique Lathom ! Et puis, quel est au juste le rôle du jeune écrivain "en herbe" John Munting ? Et puis..... et puis !?!

La forme épistolaire est très rare dans la catégorie de thrillers littéraires et celui-ci en est sans doute le tout premier.

Dans ce petit livre de 250 pages, Dorothy Sayers se montre une excellente observatrice des moeurs de son temps et de son milieu, très attentive à la place et au statut de la femme dans cette société, ce qui en assure une plus-value significative.

Petite anecdote littéraire : la traductrice de l'ouvrage s'appelle Yvonne Paraf (1902-1981), qui a été la grande amie de Jean Bruller, alias Vercors (1902-1991), auteur de la nouvelle magistrale "Le silence de la mer" de 1942, et a ainsi été impliquée et associée à la Résistance et à la création des Éditions de Minuit de Bruller/Vercors, qui avait tout juste 6 jours de moins qu'elle.
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Je viens de relire ce roman et j'avoue que j'avais oublié l'avoir lu. Arrivé à la moitié quand l'empoisonnement survient, je m'en suis brusquement souvenue ! C'est dire qu'il n'est pas inoubliable mais juste un bon moment de lecture si on aime les polars un peu soft.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Ce fut une erreur depuis le premier jour, cette cohabitation avec Lathom. Un pur hasard en fut la seule cause. Si Lathom n'avait pas porté une cravate d'ancien élève de Winchester, jamais je ne lui aurais adressé la parole dans ce petit restaurant de Greek Street, Au Bon Bourgeois. Tandis que comme cela, je fus assez stupide pour dire : "Tiens, vous sortez aussi de la vieille école, à ce que je vois. Est-ce que je vous connais ?" Et je fus submergé par le flot de cordialités que Lathom déversa aussitôt sur moi.
Lathom est expansif. Il rayonne. D'habitude, je ne suis pas doué pour faire fonction de prisme. Cette soirée fut une malencontreuse exception par l'effet du bourgogne que j'avais bu.
Dès que Lathom se fut nommé, je le reconnus. Il a plus de cinq ans de moins que moi et n'était encore qu'un "fag" de troisième supérieure, alors que je préparais mon entrée à Oxford en sixième, mais sa réputation avait réussi à percer mon olympienne réclusion.
Lathom, bien sûr. Le célèbre "fag" de Burrage, qui chipait tout ce qui lui convenait. Il avait une manifeste incapacité à distinguer la propriété des autres de celle de Burrage. Avait-il besoin de quelque chose, il le prenait. Avait-il envie de faire quelque chose, il le faisait. Il était attaché à Burrage qui, naturellement le soutenait et je suis sûr qu'il a gâté le gosse en le protégeant contre les conséquences de ses méfaits.
Je rappelai à Lathom que nous l'avions surnommé "le piqué", et il se mit à rire et dit que nous avions bien raison.
Je me souvins aussi que Lathom s'était fait une véritable réputation par les caricatures qu'il faisait des professeurs. je ne fus pas surpris d'apprendre qu'il était devenu un artiste. Il dit qu'il cherchait un atelier et avait trouvé quelque chose de très bien à Bayswater mais que c'était trop grand pour lui.
Je lui demandai pourquoi, diable ! il avait choisi Bayswater plutôt que Chelsea ou Bloomsbury ? "Parce que, dit-il, d'abord c'est trop cher, et puis ce sont des quartiers pour artistes, dont j'ai horreur. Bayswater est suffisamment central pour être pratique tout en étant assez périphérique pour être sain à tous les points de vue. Et puis on y côtoie la vie telle qu'elle est."
Pour finir, je consentis à partager l'appartement avec Lathom. Une heure plus tôt, cette simple idée m'aurait fait fuir mais, envoûté par l'enthousiasme de Lathom, abruti par la bonne chère et l'esprit de l'école, je commençais à me dire qu'il y avait vraiment quelque chose de réaliste et de piquant à partager un studio avec un ancien élève de Winchester. Et après tout, Lathom avait peut-être raison. Le malheur, c'est que la vie "telle qu'elle est" est mieux quand on la regarde de loin.
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Harrison avait eu la brillante idée de nous inviter à dîner, Lathom et moi, pour nous faire goûter une de ses spécialités culinaires, le poulet frit. Nous étions tous là - Miss Milsom particulièrement féline dans une toilette brodée par elle d'arabesques persanes. Harrison, qui n'admet personne dans "sa" cuisine pendant qu'il confectionne un de ses chefs-d'oeuvre,, était absorbé par sa friture au milieu d'une forte odeur d'ail. pas de Mme Harrison. Nous entretenons la conversation avec fureur. Entre Harrison, il jette un regard sombre autour de lui et disparaît à nouveau gêné. On entend la porte d'entrée. Puis la porte de la cuisine est violemment ouverte. "Alors d'où viens-tu ? (Horreur, la porte du salon est restée ouverte !) Je dis rapidement : "Avez-vous lu le nouveau Michael Arlen, Miss Milsom ?" Nous avons tous conscience qu'un interrogatoire serré se prolonge dans le lointain. Lathom ne peut pas rester en place. La voix gronde : "Pas d'histoires. Combien de temps es-tu restée chez le coiffeur ? - Alors, qu'est-ce que tu faisais ? - Oui, mais qu'est-ce qui t'a retenue ? - Naturellement, tu as rencontré quelqu'un. - Qui ? Un collègue du bureau, probablement. - Caroline Mortimer ? Quelle histoire ! Non, je ne me tairai pas ! - Oui ou non, as-tu oublié... Là, en désespoir de cause, je mets le gramophone en marche. Entre Harrison essayant de faire bonne contenance : "Ma femme arrive en retard comme d'habitude." Nous nous mettons à table dans un silence embarrassé. Je fais l'éloge du poulet. "Trop cuit", grogne Harrison, le repoussant. - Je le trouve délicieux, monsieur Harrison", minaude Miss Milsom. "Vous autres femmes ne connaissez rien à la cuisine, dit Harrison avec acrimonie. Il est trop cuit ! Immangeable." Il est certain que nous avons tous l'appétit coupé. Il n'y a rien à reprocher au poulet, mais nous sommes là à le regarder comme si c'était un poulet de carton.
Je t'épargne la suite. Lisette, je vois comment ces choses arrivent, mais que faut-il faire pour être sûr qu'elles n'arriveront pas ? L'amour n'y fait rien. Harrison donnerait joyeusement sa vie pour sa femme, il en vaut cent comme elle, et pourtant à chaque querelle elle s'arrange adroitement pour le faire paraître dans son tort.
Cette maison devient un cauchemar. Il faut que je la quitte,...
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J'ai eu l'espoir il y a quelques jours que tout allait s'arranger. Mme Harrison a déclaré qu'elle allait recommencer à travailler. Cette idée lui souriait beaucoup et il me semble, en effet, que c'est ce qu'elle pourrait faire de mieux. L'Ours a suivi sa tactique habituelle. Quand elle a commencé à en parler, il a eu l'air d'approuver et lui a dit de faire comme elle voulait. Aussi, enchantée, elle a téléphoné à son ancien bureau pour savoir s'il n'y avait pas un poste vacant, et justement il y en avait un. Elle s'était pratiquement engagée avec eux pour la semaine suivante quand l'Ours est parti en campagne.
"Alors, tu es contente ? et tu penses que je le suis, moi ? Tu crois que c'est agréable pour un homme d'avoir une femme qui va s'éreinter toute la journée dans un bureau et n'est plus bonne à rien quand elle rentre le soir ? J'avais pensé qu'ayant un intérieur confortable, tu t'appliquerais à me le rendre agréable quand je rentre chez moi. C'est comme cela que cela se passait jadis, mais la femme moderne n'a pas ces idées."
Et ainsi de suite. Elle a essayé de le raisonner, mais en vain : elle s'est rendue malade à force de pleurer et a dû écrire à son bureau qu'elle ne pouvait pas prendre le poste qu'on lui offrait. Et depuis, il ne cesse de répéter que c'est vraiment fâcheux qu'elle ne trouve rien de mieux à faire que de lire de mauvais romans toute la journée. J'ai fini par me fâcher. J'ai dit : Monsieur Harrison, permettez-moi de vous dire que vous ne devriez pas parler comme cela à votre femme : elle a renoncé travailler uniquement pour vous faire plaisir et vous devriez pensez un peu plus à elle et beaucoup moins à vous-même. Je crois qu'il n'était pas content, mais j'estime que mon devoir était de lui dire cela.
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Et c'est alors que survinrent les Harrison. Harrison était un homme sincère, dépourvu d'imagination et, malheureusement pour lui, extrêmement nerveux. Théoriquement, il était très large d'idées, généreux et rempli d'admiration pour sa femme. En pratique, il était borné, jaloux et tatillon. A l'entendre parler d'elle, on l'eût pris pour le type chevaleresque idéal ; à l'entendre lui parler, on l'eut pris pour une brute méfiante. La grande vitalité de sa femme, son inconséquence et son sens du mélo (ceci est peut-être la clef de la situation) lui portaient sur les nerfs et le rendaient irritable à l'excès. Par instinct, il aimait dominer, mais il n'était pas fait pour dominer cette femme-là, n'étant ni brillant, ni désinvolte, ni énergique. Il avait pourtant deux vocations : l'aquarelle et la cuisine. Malheureusement pour lui, il était, en ce qui concerne la première, faible, conventionnel et sentimental, et c'est seulement dans la seconde qu'il se révélait original et audacieux.
Au début, j'étais étonné de la patience dont Lathom faisait preuve vis-à-vis de Harrison. Il laissait Harrison le raser interminablement avec son bavardage sur l'art et ses petites croûtes. Evidemment, Harrison le traitait avec une déférence flatteuse de la part d'un homme assez âgé, mais en toute autre circonstance, cela n'aurait fait qu'exaspérer Lathom qui, pour lui rendre justice, n'est pas sensible à la flatterie. Je me suis rendu compte plus tard que Harrison servait à mettre Lathom en valeur et que Lathom l'utilisait dans ce but sans honte et sans remords.
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Harrison était un homme sincère, dépourvu d'imagination et, malheureusement pour lui, extrêmement nerveux. Théoriquement, il était très large d'idées, généreux et rempli d'admiration pour sa femme. En pratique, il était borné, jaloux et tatillon. A l'entendre parler d'elle, on l'eût pris pour le type chevaleresque idéal ; à l'entendre lui parler, on l'eût pris pour une brute méfiante. La grande vitalité de sa femme, son inconséquence et son sens du mélo (ceci est peut-être la clef de la situation) lui portaient sur les nerfs et le rendaient irritable à l'excès. Par instinct, il aimait dominer, mais il n'était pas fait pour dominer cette femme-là, n'étant ni brillant, ni désinvolte, ni énergique. Il avait pourtant deux vocations : l'aquarelle et la cuisine. Malheureusement pour lui, il était, en ce qui concerne la première, faible, conventionnel et sentimental, et c'est seulement dans la seconde qu'il se révélait original et audacieux.
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Vidéo de Dorothy L. Sayers
Whether your story is set in a real-life city, a distant planet, or an imaginary place, setting can be critical. You'll need to know how your characters get around, how long it takes to get from place to place, and what they'll see along the way. Authors whose stories are set in a variety of places—from early 20th century Paris to a confined spaceship—will speak on this panel. Featuring Alastair Reynolds, Constance Sayers, Alex Jennings, and R. S. Ford
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