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Citations sur Demain c'est loin (67)

Nous avons trouvé assez facilement la maison de Beynost, qui était au fond d'un lotissement de maisons toutes identiques. Dans les HLM il y a les mêmes apparts et là, visiblement, c'était pareil. En plus grand, avec un jardin et avec un garage, dans lequel on a vite rangé la voiture de police. Dans ce genre d'endroit les gens se connaissent et le moindre pet de travers ameute tout le voisinage, le front contre les carreaux de la cuisine. Les yeux torves, les yeux de gestapistes qui ne veulent de mal à personne, non, qui n'espionnent que pour protéger le territoire. J'étais un peu en mode parano, et stressé avec ça, j ai tout de suite senti dans l'air l'odeur de la droite. Des gens avec des revenus confortables, sans plus, sans ISF, pas totalement réactionnaires mais pas vraiment modernes non plus. Les bons Français, voilà, c'est là qu'ils sont, là qu'ils se retrouvent, là qu'ils se reproduisent. J'ai eu le sentiment d'être dans un parc animalier, dans le zoo de Saint-Martin-la-Plaine avec une seule espèce vivante domiciliée : la classe moyenne. Des gens avec une vie tiède, un bon vieux 12 sur 20 et « peut mieux faire », des gens qui ont peur des pauvres et qui sont impressionnés par les riches. Ils ne feraient pas de mal à une mouche mais ils ne balancent pas la pièce au manouche du feu rouge. Ils trouvent que les Balkany ne sont pas si mauvais que ça et que les socialistes sont trop honnêtes pour être honnêtes. Ils aimeraient bien qu'on offre une direction à la France sans se questionner sur le non-sens de leur propre vie. Plutôt inoffensifs, par ailleurs. On est parvenu à leur faire croire que s'ils sont dans la merde, ce n'est pas à cause de ceux qui ont tout le blé, non, c'est à cause de ceux
qui n'en ont pas du tout. Dingue ! Ils ont gobé ça tout cru. Ils gobent tout, de toute façon. Y en a jamais aucun qui s'est dit : Tiens, je vais aller péter la gueule à ce député, là, qui me prend pour un jambon depuis cinq mandats. Ou : Tiens, ce chef au bureau, qui me sourit en me demandant comment a été mon week-end, gagne cinq fois mon salaire. Leur ennemi a été désigné, il est sale, il vit dans les banlieues, et il est pauvre. Il se goinfre tellement d'allocs que ça gèle les salaires. C'est à cause de lui... Quoi ? . . . Les actionnaires ? Ah non, ça c'est pas pareil, ferme ta bouche et bouge de là. T'es pas content ? T'avais qu'à mieux bosser à l'école. Pis c'est pas de notre faute si tu t'es pas retrouvé dans la bonne couille.

Pages 135-136, Points, 2018.
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Comme ce matin-là, un samedi, dix heures. Juliane Bacardi, ma conseillère financière, voulait me voir. Le mot conseillère était en trop, dans l'intitulé de son poste. En tout cas pour moi. Le seul conseil qu'elle m'avait jamais donné c'était de fermer ma boutique et de trouver un vrai travail. Salope. Je pouvais pas la blairer. C'était une Française ultra Française, de bonne famille, bien élevée, le genre de meuf qui ne dit jamais par contre mais en revanche. Le genre de meuf qui, dans un bar, vous repère tout de suite et vous évite pour se blottir contre des Clément ou des Benoît, inoffensifs et pas drôles. Pas drôle non plus, la Juliane. Quand je l'ai rencontrée au tout début, pour lancer ma boutique, je l'ai joué mec enthousiaste et enjoué. Je lui ai dit que j'avais un nom de juif et une tête d'Arabe mais qu'en fait j'étais normal. Ce genre de vannes, aux Buers, ça faisait marrer tout le monde. Mais dans la presqu'île, pas du tout, et à la Banque Populaire encore moins.

Page 13, Points, 2018.
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Je m'appelle François Feldman, comme l'aut' con. Mais je suis pas chanteur. Et je suis pas juif. Depuis toujours quand je dis mon nom on me demande : « Comme le chanteur?» Quand je suis énervé je réponds : « Pis ta mère, tapette ? » Et quand je suis calme je dis que oui, c'est mon oncle. Là, les gens ne savent plus quoi dire et ils sourient bêtement. Ils sont écrasés par le poids de la célébrité et ils me regardent autrement. Sinon, on me demande souvent si je suis juif. « Feldman, Feldman... c'est juif, non ? » Quand je suis énervé je réponds : « Pis ta mère, tapette ? » Et quand je suis calme je dis que oui, je suis feuj. Gros silence. Les gens n'ont rien contre les juifs mais ils n'aiment pas être avec eux, ils ignorent ce qu'il faut dire ou ne surtout pas dire, ils sont comme des cons et c'est ça qu'ils n'aiment pas : être comme des cons.

Page 11, Points, 2018.
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Ensuite on a exploré le king size, comme des steaks dans une poêle on était; et d'un côté, et de l'autre, et je te retourne et tu cuis. Je me suis pris au jeu, j'étais excité à fond, je me disais même que j'aimerais bien revenir voir Brigitte de temps en temps quand, d'un coup, le tue-l'amour s'est produit. Brigitte s'est mise à quatre pattes pour que je la prenne en levrette et j'ai découvert qu'elle avait le visage de Johnny Hallyday tatoué dans le dos. En énorme. Un putain de poster, c'était. Mais bon, je n'étais pas là pour faire la fine bouche, je me suis exécuté et j'ai pris Brigitte par les hanches comme on prend un chariot à Carrefour. Je l'ai secouée, car c'était ce qu'elle voulait, mais ce bon vieux Johnny s'est mis à vivre, à bouger, sa bouche remuait sur la peau de Brigitte. Plus je la besognais, plus Johnny avait des trucs à me dire. Il disait: "Qu'est-ce que tu fous là, grand?"
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Il a précisé à plusieurs reprises qu'il était enseignant. On ne sait pas pourquoi ils font ça, personne, pas même eux, mais tous les professeurs le font. C'est hyper important. Imaginez un peu, si on les prenait pour le commun des mortels ! Vous vous rendez pas compte, vous. Ils sont au-dessus. Ils sont supérieurs. Ils passent leur vie à donner des leçons à tout le monde, y compris en dehors des heures de boulot, du coup ils ont en permanence le sentiment de dominer leur entourage.
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Ce que je déteste chez les coiffeurs normaux, c'est qu'ils se sentent obligés de faire la conversation, à croire qu'il y a une matière dédiée à ça au CAP.
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..l'argent, c'est quelque chose, alors que les gens, c'est juste quelqu'un.
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...J'ai enfilé des mocassins à glands, sidéré que cela se vende encore en 2017.
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Elle avait d'ailleurs les yeux qui pétillaient et un petit sourire autosatisfait qui lui faisait ses petites fossettes marrantes. Le second degré venait de rentrer dans sa vie et, visiblement, elle n'était pas contre.
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Duffle-coat appartenait à une catégorie particulière de Français : les professeurs. Celui là était un spécimen typique, un marqueur, un poster. Il était parfaitement identique aux derniers de son espèce qu’il m’a été donné de côtoyer, l’année de mon bac. Pour commencer, il a précisé à plusieurs reprises qu’il était enseignant. On ne sait pas pourquoi ils font ça, personne, pas même eux, mais tous les professeurs le font. C’est hyper important. Imaginez un peu, si on les prenait pour le commun des mortels ! Vous vous rendez pas compte, vous. Ils sont au dessus. Ils sont supérieurs. Ils passent leur vie à donner des leçons à tout le monde, y compris en dehors des heures de boulot, du coup ils ont en permanence le sentiment de dominer leur entourage. Cela dit ce sont de bons citoyens, ils sont de gauche et ils pensent que la croissance n’est pas la solution. Ils ne regardent pas Le grand journal ils regardent C’est à vous. Ils n’écoutent pas la radio, ils écoutent France Inter. Ils ne supportent pas le foot mais nom de dieu qu’est ce qu’il est bien ce Griezmann ! Ils ont un autre signe de reconnaissance : ils adorent les Maghrébins et leur culture. Bon, par culture, il faut comprendre cornes de gazelle et couscous. Car au fond d’eux ils ne conçoivent pas que les Arabes puissent faire autre chose de bien que de la pâtisserie. En revanche, donc, ils les adorent. Et ils adorent les reprendre, les corriger, les éduquer. Ce sont des pieds noirs finalement : des pieds noirs jamais descendus du bateau.
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