Je ne suis pas une grande lectrice de BD, aussi lorsque j'ai vu, à la médiathèque, l'album « Chagall en Russie » de
Joann Sfar, je n'ai pas hésité longtemps car j'aime la peinture de Chagall et j'ai été une grande lectrice de romans russes.
C'est l'histoire de Marc Chagall, un jeune homme qui ressemble au peintre sans pour autant être lui. Ce n'est pas une biographie dessinée de la vraie vie de Chagall, c'est un conte juif dont le héros porte le même patronyme que le peintre. le jeune Marc est dessinateur, rêveur, idéaliste et désespérément amoureux d'une jeune fille. Désespérément car le père de l'amoureuse veut que sa fille épouse « un bon juif qui ait un bon métier ». Que faire ? Cesser de peindre et rentrer dans le rang pour épouser son amour ou renoncer à l'amour pour continuer à peindre ? A cette question existentielle, même le Rabi de Loubavitch ne connaît pas la réponse. Alors qu'il s'endort au bord de la rivière, Marc a des visions : celle d'un plafond peint par ses soins dans un sublime palais. Ou encore monter une pièce de théâtre pour montrer à son futur beau-père qu'il est capable de vivre, honorablement, de son art.
Avec une verve extraordinaire dans les textes, parsemés de mots et d'expressions yiddishs,
Joann Sfar m'a entraînée dans une valse endiablée au coeur d'une Russie en proie aux conflits du début de la Révolution : les cosaques mènent une ultime chevauchée d'une sauvagerie quasiment burlesque, les poncifs sur les pogroms sont malmené avec brio et un humour ravageur.
Sfar détaille avec drôlerie le quotidien des villages de l'époque, les préoccupations des habitants, les cosaques violents assassins sans qu'ils sachent pourquoi, ils tuent parce qu'on leur dit de tuer.
Dans le deuxième tome,
Sfar met en scène le jeune Marc désireux de créer un opéra dans son village. Un quatuor invraisemblable prend vie sous nos yeux, tel le tétragramme hébreux : Marc,
Jésus-Christ, Tam et le violoniste. Marc tient le pinceau, Tam le couteau sacrificiel. La sarabande continue, dans une folie surréaliste et presque mystique : tout est fouillis, tout est désordre et tout est incroyable.
Le rythme est endiablé, on suit les virevoltes et les comiques de situation avec entrain, ces folies dessinent les brutalités de la vie faites aux juifs.
« Chagall en Russie » est une biographie du peintre prenant beaucoup de liberté sa vie. Cette licence n'est pas à vilipender car grâce à elle,
Sfar n'assomme pas son lecteur avec une ribambelle de faits. Les couleurs utilisées, les dessins d'animaux, certaines scènes permettent d'entrer dans l'univers du peintre et donnent envie de se replonger dans son oeuvre.
Je n'ai pas été enthousiasmée au plus haut point, cependant j'ai passé un excellent moment en compagnie des personnages burlesques.
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