Deux déceptions à la suite ! Heureusement que ça arrive rarement. Dans ce roman de
Tess Sharpe, le premier chapitre de 8 pages se joue sur un rythme trépidant. Harley McKenna a 8 ans. La petite fille est livrée à elle-même depuis la très récente mort de sa mère. Son oncle Jake s'occupe d'elle épisodiquement ; son père, Duke, boit beaucoup et ne décolère pas. L'enfant passe son temps dans la forêt. Une nuit, elle surprend son père qui traîne un corps dans la grange. Elle l'épie, le voit torturer Ben Sprinfield pour que celui-ci lui révèle où est Carl, son frère. Ben finit par le révéler, mais bien que Duke lui ait promis la vie sauve pour lui, sa femme et ses enfants, il le tue. Et maintenant, Duke veut tuer Carl, le responsable de la mort de sa femme, la mère d'Harley.
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Dans
Mon territoire, la narration alterne entre présent (les chapitres pairs) et passé (les chapitres impairs), mais, dans les deux cas, Harley, la narratrice s'exprime toujours au présent. Dans les chapitres où Harley raconte son apprentissage, ses multiples expériences traumatisantes, son évolution, elle commence toujours par préciser son âge à l'époque des faits, sans doute parce que la chronologie n'est pas respectée et pour insister sur le fait que sa vie ne ressemble à celle d'aucune autre petite ou jeune fille. Les chapitres du présent se déroulent entre le 6 juin et le 16 juillet. Une construction, comment dire, pour présenter l'apprentissage et le résultat, peut-être. Et pour moi, c'est là que ça pèche… Harley est vraiment trop : trop habile, trop forte, trop intelligente, trop perspicace, trop rusée, trop violente, trop courageuse, etc., et tout ça grâce à la formidable éducation que lui a donné son père, gros propriétaire terrien et baron de la drogue. Non, elle ne va pas à l'école : c'est trop dangereux à cause de la guerre des clans avec les Springfield. Son père la forme donc et lui inculque une morale qui lui permettra de prendre sa suite. Mais Harley tient aussi de sa mère : elle est généreuse et dévouée à certaines causes. Elle s'occupe d'un refuge où les femmes battues sont accueillies avec leurs enfants et protégées ainsi de leurs compagnons violents. Cette héroïne (trop) hors du commun est flanquée de personnages secondaires qui soit cumulent les clichés, soit tentent de les subvertir sans y réussir vraiment, comme c'est le cas pour Will et l'aspirante shérif. Si j'ai lu sans déplaisir les chapitres de l'enfance malgré l'extrême violence et la complaisance de certaines descriptions, je me suis vite ennuyée au présent, pendant la mise en place du stratagème : elle n'en finit pas. J'ai eu parfois l'impression de me retrouver dans une sorte de western ou le charisme du héros (ici Harley) suffit à tenir l'intrigue, parfois dans un vieux film français où, bon, d'accord, les personnages sont des salauds, mais dotés d'un code de l'honneur et capables de beaucoup de générosité. J'ai été étonnée par la « Note de l'auteure » dans laquelle
Tess Sharpe prévient le lecteur que les néonazis ne sont pas tous comme ceux du livre, qu'il y en a dans tous les milieux sociaux et qu'il faut s'en méfier. Elle semble s'excuser elle-même de son cliché… Cela dit, ni les thèses ni les actes néonazis ne font vraiment partie de l'intrigue, ils sont à peine effleurés, ce qui rend la « Note » un peu incongrue. Et malgré certains passages lus en diagonale, j'ai fini ce roman, ce qui explique les **½…