Je t'ai dit un jour, je crois même l'avoir écrit, qu'un être ne meurt pas tout à fait tant qu'il reste bien vivant dans le coeur d'un autre être. Or, tu es vivante en moi, si vivante que je t'écris et je te parle comme si tu allais me lire ou m'entendre, me répondre en me regardant de tes yeux pleins de confiance et d'amour.
Plus je vis dans ton intimité, plus j'ai la certitude que tu as été un être exceptionnel, d'une lucidité rare, animée par une volonté presque cruelle de découvrir ta vérité. Ta mort a ainsi été un acte quasi héroïque et, tu le sais bien, tu me l'as timidement laissé entendre, tout cela ne peut être perdu.
Chapitre premier
Le but de ma quête inlassable était au fond, non une femme, mais "la" femme, la vraie, la femme amante et maternelle à la fois, sans artifices, sans fards, sans ambition, sans soucis du lendemain, sans "statut".
Je l'ai trouvé sans le savoir, par hasard, et j'ai mis longtemps à m'apercevoir que j'avais enfin atteint mon but. Voilà déjà quelques années que je ne me livre plus à la "chasse aux femmes", non par manque d'appétit ou de moyens physiques. Parce que j'en ai trouvé une qui remplace toutes les autres.
Chaque fois que nous faisons un enfant, nous nous donnons un juge.
Mon "grand vieux Dad" que j'aime,
Je viens de t'avoir au téléphone. Je voulais être sûre, avant de m'en aller pour toujours, que tu allais bien, que tu étais heureux, et que tu n'aurais pas trop de peine.
Il ne faut pas en avoir. Il n'y a rien de triste, rien de dramatique. Le drame, nous le jouons dans la vie. Je ne crois pas que dans la mort il existe Je m'en vais car je ne sais plus lutter, m'accepter avec toutes mes contradictions, regarder les autres en paix et fraternellement. Ils continuent à me faire peur, ou bien, leur condition même d'êtres humains me déprime.
J'ai trop rêvé. Au fond, je me suis toujours dérobée aux petites réalités de la vie, celles-la qui ont un charme quand on est en harmonie avec soi.
J'ai toujours été lâche. Je me suis reposée sur mon entourage, sur toi, tout spécialement, comme si c'était mon dû, sans me rendre compte de mon égoïsme. Petit à petit, j'ai perdu ma dignité, la seule chose qui donne son sens à l'existence.
Et D. de murmurer gaiement* :
-- Tu vas être content de me voir grossir à nouveau.
Elle reste persuadée que je n'apprécie que les femmes aux formes épanouies, à cause du personnage de Mme Maigret créé il y a si longtemps. Plus simplement, les femmes maigres ne m'attirent guère, surtout quand elles sont mal portantes et se privent de manger pour garder la ligne à la mode.
J'aime la femme naturelle, sans artifices, la femme simple et sans fards qui vit sa vie sans s'efforcer d'être une autre.
* Elle est enceinte
Pour le reste, oublie, il vaut mieux, et surtout sois heureux, continue à vivre en savourant chaque minute qui passe, avec toute la sensualité que tu as. C’est ça, la vie : le soleil sur la peau nue, un regard d’un passant que l’on croise, l’odeur d’une ville qui s’éveille, deux corps qui se mélangent sans fausse pudeur… Surtout être réceptif à chaque minute qui passe, sans déjà anticiper sur la suivante. Parfois, j’ai su être comme ça. J’ai su m'asseoir sur une chaise et détendre mon corps, sans le crisper déjà à la penser de me relever.
J’ai su caresser un chat en le sentant tout proche de moi. J’ai su parler à un chien…
… je n’ai jamais su vraiment parler à une personne!