1340. A vingt ans, Don Pedro, héritier de la couronne du Portugal est promis à Constança, infante d'Espagne. Mais il vit une passion dévorante avec la jeune Inès de Castro, bâtarde du roi.
Histoire vraie et émouvante.
Je vous ai aimée avant même de savoir que vous existiez. Je vous aime comme on aime le bonheur et l'espérance et le jour qui se lève et l'impatience de celui qui guette à l'horizon le retour de l'être aimé. Je vous aime comme le peuple aime le roi, comme le fracas des armes aime la paix.
Plus tard, dom Pedro ne se souviendra que de l'impression ressentie lors de l'échange des anneaux, au moment précis où leurs mains se sont frôlées. Une impression de gêne. Dès lors, il comprit que même si leurs êtres étaient liés, leurs peaux ne s"uniraient qu'avec effort.
L'évêque accorde sa bénédiction. Le choeur entonne le Te Deum. C'est fini. L'infante de Castille et le prince héritier de Portugal sont mariés. Les deux royaumes peuvent aller en paix.
C'est en pivotant pour remonter l'allée centrale en direction de la sortie que dom Pedro la vit...
Non. Elle ne pouvait être réelle ! Cette blancheur ! L'éclat de ce teint, cette grâce ! Elle ne pouvait être réelle. Ces joues de lys et de rose. Ce cou d'albâtre. Et sous le satin, seins d'ivoire ou de neige ? Cheveux d'or, c'est sûr, tressés dans le poudroiement de la mer de Paille. Lèvres serties dans le rubis et le corail. Et ses yeux. Ses yeux couleur d'opale comme la mer. Verts comme demain. Verts comme toujours.
Les premiers mots qui vinrent à son esprit furent : Colo de garça... Colo de garça... Gorge de cygne.
Pedro s'agenouille devant sa reine.
Sa main se tend vers le sarcophage. L'écu armorié des Castro alterne avec le blason du Portugal. Sur la frise, une inscription est gravée:
ATE AO FIM DO MUNDO
Jusqu'à la fin du monde.
Comment peux-tu imaginer un seul instant que je ne t'aimerai plus lorsque tu seras vieille? N'aime-t-on pas la vie parce que survient l'automne et l'hiver? N'es-tu pas ma vie?
Lorsque je lui dis je t'aime, je me mords aussitôt les lèvres, conscient de l'immense écart qui existe entre ce que je ressens et la pauvreté de ce que j'exprime.Je sais qu'il en va de même pour elle. Inès est unique. Elle n'est pas de ces femmes que l'on remplace. Aucune ne l'a précédée, aucune ne lui succédera.
Depuis le matin, les voix du passé étaient revenues et faisaient un vacarme assourdissant dans la mémoire d'Alfonso IV, roi de Portugal. Ces voix lui rappelaient les mots qui avaient blessé, les brisures de son âmes. Elles gémissaient les souvenirs bâtards. Plus jamais ! Plus jamais !