Citations sur Un été au Kansai (40)
[...] Moi – qui m’octroie le luxe du spleen tandis que je me prélasse à l’autre bout du monde, à des milliers de kilomètres des enfers de feu, d’éclats d’obus et de sang.
[...] Voilà qui convient admirablement à mon état d’esprit actuel. Ton frère va se soûler avec de quasi-prostituées pendant que les bombes et les incendies ravagent Berlin, et que les meilleurs fils de l’Allemagne continuent de crever sur le front de l’Est.
les Japonais... paraissent revenus à leur attitude de réserve et de gentillesse naturelles, me donnant à croire que le gouvernement et son abjecte propagande antiespions se sont déchaînés en vain. La saison, languide et suffocante, aide ce peuple industrieux à résister aux consignes , embrigadements, hystéries collectives. Il a renoncé momentanément à nous présenter sa face sombre, brutale.
En ces splendides jours d'été, comment imaginer qu'au delà de l'horizon si bleu et calme, les flots sont souillés d'huile et de sang, les avions piquent et explosent, les corps noircis de mazout dérivent jusqu'aux plages paradisiaques pour y finir rongés par les crabes?...Lorsqu'on est un vacancier de Tokyo ou de Yokohama, ce mot sensô, la guerre, semble s’être entièrement évaporé dans la chaleur.
Les cigales nippones, qu'on appelle les semi, stridulent avec une intensité diabolique, dans tous les coins de végétation de cette ville, lesquels sont infiniment nombreux.
je pense, comme la majorité des Occidentaux ici, que les Américains ont simplement voulu faire un coup publicitaire, ce qui est tout à fait dans leur style.
Lorsqu’il a appris ma nationalité allemande, mon voisin d’hôpital a observé : — Les Soviétiques veulent avaler la moitié de votre pays. Si la Russie triomphe, tout ce que le nazisme avait de haïssable recommencera. Staline ne vaut pas mieux que Hitler. Ah, si la race des idéologues « bienfaiteurs de l’humanité » qui n’apportent que la misère pouvait s’éteindre ! (Le reste se perdit dans une quinte de toux.)
Un ouvrier, dans le tramway, s’est levé pour céder sa place à une Juive portant l’étoile jaune. Il lui a dit, avec un humour sec qui cachait sûrement de la compassion : « Assieds-toi, étoile filante. » Et, à un voyageur qui protestait, l’ouvrier a répliqué tout de go : « C’est moi qui dispose de mes fesses. »
A ce propos - et tu sais que je n'apprécie guère la race hébraïque - il me paraît difficile, et sur ce point je finirai par me ranger à ton opinion, de continuer de se voiler la face plus longtemps. Il s'agit en effet de plus de deux cent cinquante mille citoyens de notre pays qui disparaissent progressivement dans un "Est" lointain, vague et énigmatique dont, pour autant que je sache, nul d'entre eux n'est encore revenu pour dire comment les choses se passent là-bas.
Les jeunes Scholl ont fait face à la mort avec une dignité admirable. Sophie Scholl a été si brutalement traitée par la Gestapo au cours de son interrogatoire, qu'elle a comparu devant le Tribunal du peuple avec une jambe brisée. Elle a déclaré fermement au président Freisler: "Vous savez aussi bien que moi que la guerre est perdue. Comment pouvez-vous être assez lâche pour ne pas l'admettre?" Elle a marché en clopinant sur ses béquilles vers l'échafaud où l'attendait la guillotine de Bavière.
Son air lugubre, en prononçant ces mots, me fait penser que pour elle des camélias fleurissant trop tôt signifient davantage encore de malheur.