Elle pourrait faire tout ce qu’elle voudrait. En tout cas, elle n’aurait plus à naviguer autour du monde pour sensibiliser le grand public à une putain de maladie.
Elle sortit une liasse de billets soigneusement attachés. Des euros. Des briques et des briques de jolis billets de deux cents d’un jaune brillant. Ils étaient magnifiques : l’image d’une arche d’un côté, un pont de l’autre. Chlöe éclata de rire. Ce tas de billets pouvait lui ouvrir des portes. Il y avait d’autres liasses : des billets verts de cent euros, des cinquante de couleur orange, et des cinq cents violacés. Elle ouvrit un autre sac et vit qu’il était rempli de dollars américains. Des liasses et des liasses de magnifiques billets de cent. Le dollar n’était pas aussi joli que l’euro, mais il dégageait un certain sérieux, une gravité qui lui coupa le souffle.
CHLÖE remonta la fermeture Éclair de sa veste et observa le type qu’elle venait de tirer du radeau de sauvetage. Même en étant indulgente, elle trouvait qu’il avait l’air d’une putain de loque humaine. Il était dépenaillé et puait le varech comme un animal mort échoué sur la plage.
Et qu’était-il arrivé à Bryan LeBlanc ? Il était à l’origine de cette histoire. Tout était sa faute.
Il n’avait aucune idée de ce qui était arrivé à la voile. Arrachée, avalée par l’abîme. Dévorée par des monstres marins.
Neal savait que les marins d’antan se guidaient à l’aide des étoiles. Maintenant qu’il y pensait, il regrettait de ne pas avoir téléchargé une application de navigation céleste avant de quitter le port.
New York lui manquait. Sa circulation, son bruit, sa pollution lumineuse. Quand on ne le voit pas, l’Univers ne paraît pas aussi grand et oppressant.
Il se rallongea sur le pont du voilier à moitié détruit, tel un cadavre étendu dans l’enchevêtrement de cordes et de câbles, de métal tordu et de bois fendu. Il bougeait au rythme de la houle et des vagues de la haute mer ; au loin, l’horizon scindait le monde entre eau et ciel.
À l’aide de sa chemise, il essuya ses lunettes maculées de fines gouttelettes d’eau salée, puis les remit sur son nez. Il cligna des yeux en observant le ciel nocturne constellé d’une infinité d’étoiles, de planètes, de galaxies, de supernovas, de trous noirs, de géantes rouges, de naines blanches et de tous les autres trucs qu’on trouvait là-haut. Il y en avait trop. Ils étaient entassés les uns sur les autres, à tel point qu’il ne reconnaissait pas la moindre constellation.
NEAL Nathanson songea à boire sa propre urine. N’est-ce pas la procédure habituelle lorsqu’on se retrouve à court d’eau ? L’équipe de foot chilienne l’avait bien fait après s’être écrasée dans les Andes. À moins que ce ne soient les mineurs ? Il était certain que des gens originaires du Chili avaient survécu à une terrible épreuve en buvant de la pisse.
Elle fit demi-tour et s'éloigna de lui. Piet se dit que son cul était formidable. Loin des tortillages et des balancements des autres culs, le sien lui parlait plus clairement qu'aucun autre avec lequel il avait communiqué.….