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Traduction de Jean-Louis Boutefeu (Traducteur)
EAN : 9781090090706
Steinkis Editions (23/09/2015)
3.91/5   16 notes
Résumé :
24 juillet 1923, la signature du Traité de Lausanne sonne le glas de l'Empire ottoman et donne naissance à la Turquie moderne.

Pour les populations grecques vivant sur le territoire turc et pour les Turcs vivant sur le territoire grec, la conséquence est immédiate : l'exode.
1,5 million de Grecs et 500 000 Turcs passent d'un territoire à l'autre.

Presqu'île devenue turque mais située juste en face de l'île grecque de Lesbos, Aïva... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
1923, la première mondiale est terminée. Pas vraiment, le sera t elle vraiment ? Déjà en 1885, à Berlin, l'Afrique avait était tronçonnée, par traité, et puis après la première "boucherie" mondiale viendront le traité de Versailles, le traité de Sèvres.
On redistribue les cartes, on tire des traits, et jamais la leçon de leurs conséquences.
Des territoires, des forces, des richesses, des axes, des puissances..Une ligne, un trait, un territoire.
Qui chante ici? qui aime la-bas? qui vit là ? Halte là ! On signe des traités !
Des peuples ballottés, malmenés, d'une rive à l'autre au gré de la fantaisie des pouvoirs en place.
Des meurtres, des villages vidés, des peuples déportés.
Bâbord tribord et peu importe qui tombe dans l'eau, qui jette, qui sera jeté, qui est rejeté.
La politique internationale a cette odieuse habitude de trier l'humain.
Classer, archiver, également mais trier ça on aime vraiment bien.
alors les humains font ce qu'ils peuvent. Ils tentent de survivre et s'obstinent à toujours revivre.
Déracinés, déplantés, implantés, les humains ne sont toutefois pas des lentilles.
Il leur prend évidement toujours l'envie de reprendre racine, de vivre coûte que coûte, mais à la différence des lentilles, les humains ont la mémoire.
Bien plus que celle des chiffres ils ont la mémoire du choeur.
C'est à la fois une très cruelle et très belle histoire que Soloup, l'un des plus grands dessinateurs grecs contemporains, nous adresse.
Cette histoire est la notre, à nous, peuples européens.
Ces dessins sont les nôtres.
L'histoire de la Méditerranée nous a , pour une grande part de nous mêmes, élevés, éduqués, nous a fabriqués, engendrés, rêvés, apportés, construits.
Le fait est que nous n'en parlons pas. L'histoire n'est plus au goût du jour alors que pourtant son actualité nous envahit.
Nous submerge.
Alors il faut cet art, cet art de la bande dessinée, pour venir jusqu'à nous.
Plus de chiffres, plus de vitesse, plus de flots incessants de phrases et d'avalanches d'images.
Des prénoms, des visages, des vies qui s'adressent entre ces pages au silence de notre mémoire.
D'une rive à l'autre, Soloup nous invite à faire le voyage, à relier les passages, d'une rive à l'autre, de notre passé à notre présent.
Aïvali, l'image ouverte, face à Lesbos, l'île miroir.
Opération masse critique - 12.2015 - editions Steinkis -Balelio
Astrid Shriqui Garain

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Merci aux éditions Steinkis de m'avoir permis de découvrir un auteur de BD grec, et pas n'importe lequel puisque Soloup a écrit un doctorat sur la BD de son pays.
Ce roman graphique, ou plutôt ce recueil de nouvelles graphiques, est bâti autour d'un épisode peu connu des années 1920, le déplacement de populations grecques et turques dans le mer Egée et en Asie mineure, suite à des conflits. Ce déplacement avait commencé une vingtaine d'années plus tôt, lors du soulèvement de la Crète contre l'Empire ottoman, mais il atteint son niveau maximum suite au traité de Lausanne. « Un traité d'une dizaine de pages a ainsi redessiné une région stratégique du monde et décidé du déracinement de deux millions de personnes. » Cette histoire dramatique a été vécue par une partie de la famille de Soloup, et il me semble qu'on peut assez facilement l'identifier au narrateur.
D'une rive à l'autre de la Mer Egée, ce sont les mêmes personnes, les mêmes villages, les mêmes histoires, les deux côtés d'un miroir que personne ne songe à traverser. En face de Mytilène, la patrie de coeur que le narrateur a trouvée, il y a Aïvali et il décide d'y aller. Sur ce trajet de la Grèce à la Turquie, avant qu'il y aille réellement, il nous propose un détour par le passé en nous racontant l'histoire de plusieurs personnes qui ont vécu elles-mêmes ce déracinement. Avec elles, nous découvrons qu'au-delà de la haine collective, il y a souvent des gestes individuels de fraternité et même d'amour.
En revenant au présent et en arrivant à Aïvali, le narrateur retrouve les souvenirs des Grecs et les ruines de leurs vies. Il rencontre ensuite Mehmet et sa famille, un Turc qui est héritier des mêmes déchirements puisqu'une partie de ses ancêtres a été expulsée de Crète vers 1900. Ensemble, ils relisent l'histoire troublée des relations entre les Grecs et les Turcs. Ils se rendent compte que ce qui les sépare peut aussi les réunir, eux, les petits-enfants du traité de Lausanne. L'avenir des deux pays est dans la réconciliation comme entre le narrateur et Mehmet ou entre Soloup et l'écrivain-libraire turc Ahmet Yorulmaz.
Le style du dessin est assez varié, reprenant les aspects byzantinisants de Fotis Kontoglou ou « le Cri » de Munch. L'insertion de véritables photos en noir-blanc, dont celles des quatre grands-parents du narrateur, nous rend proches ces vies brisées. Nous ne sommes pas que dans de la fiction, mais dans des récits de vie bien réels.
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A l'issue de la Première guerre mondiale, l'Empire ottoman est démembré. Mustafa Kemal prend la direction d'une rébellion militaire contre le Sultan. En 1920, le traité de Sèvres entérine le redécoupage de nouvelles frontières mais Mustafa Kemal en refuse les termes. Ses victoires militaires lui permettent d'obtenir par le traité de Lausanne (1923) la reconnaissance de la légitimité du nouvel Etat turc qu'il fonde - sur un territoire cependant plus restreint que celui de l'Empire ottoman mais comportant une partie du Kurdistan et de l'Arménie dont l'indépendance est désormais exclue.
Ce nouveau découpage s'accompagne de transferts de populations : 1,5 millions de Grecs d'Asie mineure quittent la Turquie vers la Grèce et 500 000 musulmans De Grèce se dirigent vers la Turquie.

Un prologue d'une page, particulièrement clair et intéressant, rappelle ce contexte à l'origine des histoires personnelles des quatre principaux personnages présentés dans cette bande dessinée.

L'intérêt principal de ces histoires est de montrer que les échanges de populations turques et grecques qui ont suivi la signature du traité de Lausanne se sont accompagnés de multiples violences, malgré cet accord politique. En effet, au traumatisme du déracinement se sont ajoutées les violences militaires, policières, et même des violences « ethniques » ou religieuses commises pas des populations qui vivaient auparavant en harmonie.

Malgré l'excellent prologue précité et l'intérêt du sujet, j'ai été très déçu par le manque de clarté des histoires présentées, qui nuit beaucoup à l'intérêt de la lecture. Je me suis perdu entre les personnages et surtout dans les lieux. Les biographies présentées en fin d'ouvrages ne suffisent pas à gommer ce défaut du récit. J'ai aussi été gêné par l'absence de cartes claires (ainsi, il m'a été impossible de resituer exactement sur mon atlas la position de la carte dessinée page 52 par l'auteur).

J'ai trouvé le graphisme particulièrement beau et agréable lorsque l'auteur représente des plans éloignés de paysages ou de villages (et très fidèle à ce que j'ai pu voir à quelques endroits de Crète), mais les représentations des personnages m'ont paru moins réussies.

• Merci à Babelio et aux éditions Steinkis.
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Même si on est féru en histoire, on ne peut tout connaitre. Ainsi, j'ignorais totalement le destin de cette ville côtière située en Turquie en face des îles grecques. Aivali était doté d'un statut particulier sous l'Empire ottoman. A la chute de cet empire suite à la défaite de la Première Guerre Mondiale, les alliés ont lâché les grecs vivant en Asie Mineure et qui étaient présents depuis Alexandre le Grand dans l'Antiquité.

Le traité de Lausanne de 1923 imposait un échange de population qui s'est déroulé dans les pires conditions. Il faut dire que cela a concerné près de deux millions de personnes. En Grèce, on a parlé de cet épisode trouble comme de la grande catastrophe. C'est toute cette histoire dans la grande histoire qui nous est conté. Juste un regret : ce traité de Lausanne remplace le traité de Sèvres signé en 1920 qui prévoyait la mise en place d'un Etat Kurde et d'un Etat arménien ainsi que la domination grecque sur la région de Smyrne. S'il avait été appliqué, on aurait sans doute évité bien des conflits par la suite. Paradoxalement, ce deuxième traité était très favorable aux vaincus qui avaient pris soin de se retourner contre le pouvoir central en établissant par la même occasion une soi-disant République. Bon, en même temps, on peut comprendre des individus qui n'acceptent pas une paix humiliante.

A noter que ce roman graphique prendra les deux points de vue en considération et que la philosophie va au-delà de prendre parti. C'est surtout la souffrance qui est pris en compte que l'on soit d'un côté ou de l'autre. On se cherche toujours des ennemis pour ne pas avoir à s'affronter soi-même. Au-delà de cet angélisme, il faut comprendre également que beaucoup de grecs (les hommes de 18 à 45 ans) ont été déporté en 1921 comme le furent les arméniens quelques années plus tôt. Les exactions des uns ont provoqué les atrocités des autres. Bref, il faut également savoir doser.

Je reprocherais juste la longueur un peu excessive de ce roman graphique qui passe d'un témoignage imagé à l'autre. Pour le reste, c'est toujours intéressant d'apprendre de nouvelles choses sur un conflit méconnu mais qui visiblement a encore un impact sur cette région de nos jours. Les habitants ont été les victimes collatérales d'accord diplomatiques : c'est ce qu'il faudra retenir.
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En 1923 le traité de Lausanne sonne le glas de l'empire ottoman et donne naissance à la Turquie. A Aïvali presqu'île en face de l'île de Lesbos, les grecs sont expulsés tandis que les Turcs chassés de Crète s'installent dans les maison d'Aïvali. Violence, douleurs, viols et angoisses s'ensuivront pour ces deux peuples subissant la loi des grands de ce monde. L'exode a toujours existé et ce n'est pas sans me rappeler le sort subi par ma famille. Après il faut penser reconstruction.
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critiques presse (1)
Bedeo
02 mai 2022
Récit équilibré et bien construit, Aïvali offre une clé de lecture bienvenue pour comprendre les relations gréco-turques contemporaines, qui sont toujours marquées par la mémoire de ces événements tragiques.
Lire la critique sur le site : Bedeo
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
La Première Guerre mondiale sonne le glas des empires austro-hongrois, russe et ottoman. Des traités de paix donnent naissance à des États-nations donc il délimite les frontières.

Celles de l'Empire ottoman sont particulièrement difficiles à tracer en raison de sa vaste étendue, de son multiculturalisme et de la spécificité de son histoire. Qui plus est, la situation politique au sein de l'Empire et mouvementée.Fin 1918, l'Arabie la Syrie la Palestine la Macédoine la Thrace et la Mésopotamie sont envahies par les Alliés. Cette occupation est vécue que comme une humiliation par Mustafa Kemal, général de l'armée impériale qui s'est illustré notamment dans les Dardanelles. Refusant de voir L'Empire démembré, il prend la tête d'une révolte contre le gouvernement et organise un pouvoir nationaliste parallèle, à Ankara.

En 1920 le traité de Sèvres entérine les décisions relatives au territoire ottoman prises par les Alliés. Accepté dans le sultan il est catégoriquement refusé par le mouvement national de Mustafa Kemal futur Atatürk. Appuyé par la France et la Russie bolchevique fort de victoires militaires, il obtient la renégociation du traité.

Après de longues tractations le 24 juillet 1923 la Turquie d'une part, et la France , le royaume d'Italie le Royaume-Uni, l'Empire du Japon, le royaume de Grèce, le royaume de Roumanie, le royaume des Serbes, croates et slovènes,d'autre part signent un nouveau traité conforme aux nouveaux rapports de force de la région, le Traité de Lausanne.

En premier lieu, ce traité reconnais la légitimité de la République turque mise en place par Mustafa Kemal. Les alliés obtiennent la reconnaissance par la Turquie des pertes territoriales de l'ex- Empire ottoman à Chypre, dans le Dodécanèse, en Syrie Palestine, Jordanie, Irak, et Arabie mais en échange renoncent à demander l'indépendance voir simplement l'autonomie, du Kurdistan et de l'Arménie auparavant prévu dans le traité de Sèvres.
Ces nouvelles frontières établies ne sont pas sans conséquence pour la population. Avant même la signature du traité des échanges de population débute "baïonnette dans le dos".
Un exode basé sur des critères religieux est engagé
1.5 million de Grecs vivant en Asie Mineure sur le territoire de la Nouvelle Turquie et 500 000 musulmans vivant sur le territoire grec vont passer d'un territoire à l'autre.
Près d'un demi-million d'entre eux y laisseront la vie.

Un traité d'une dizaine de pages a ainsi redessiné une région stratégique du monde est décidé du déracinement de 2 millions de personnes. "Aïvali, une histoire entre Grèce et Turquie", Soloup, extrait.

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Les Grecs, bercés et brassés par les flots bien avant l'Odyssée, voyaient leur coeur dériver sans cesse au fil des mers : l'Ionienne, l'Egée, la Noire, la Méditerranée ; dès qu'ils bâtissaient un port, ils rayonnaient dans les terres avoisinantes.
Les Turcs, peuple d'Asie, avaient en permanence, le coeur enraciné dans la terre ferme ; quand ils se trouvaient face à la mer, ils se contentaient d'y patauger aussi loin qu'ils avaient pied.
Comment veux-tu, après cela, que nous nous entendions ? Les uns et les autres se croient propriétaires des mêmes lieux.
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- S'il le fallait, chacun de nous prendrait le parti de son pays, n'est-ce pas ? Comment parler ensuite de "fraternité" et d'autres utopies du même genre ?
- Pourquoi ? Il serait plus réaliste de nous imaginer en train de nous battre au corps à corps ? Nous prendrions les armes pour défendre notre patrie et notre religion ?Pour donner à nos enfants une vie meilleure ? Ou au nom de la Bourse et du pétrole ?
- Va le dire aux patriotards, Turcs et Grecs confondus.
(...)
- Franchement, je ne sais pas ce qui est bien.
- En tout cas, nous savons ce qui ne l'est pas.
- SI c'est une utopie de vouloir que les hommes ne soient ni bourreaux, ni victimes, alors vive l'utopie !
- Et cela ne vaut pas seulement pour les Turcs et les Grecs.
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Chaque peuple a son ennemi, un ennemi mortel. S'il n'en a pas, eh bien il doit s'en trouver un.
Un ennemi qu'il faut montrer du doigt, dénoncer dans les livres d'école. Car il ne s'agirait pas...
Car il ne s'agirait pas qu'en grandissant les enfants comprennent enfin que d'autre que lui sont responsables de ce qui va de travers dans leur vie.
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Les espoirs des réfugiés sont morts avec eux.
Et nous, Mehmet et Ayché, mon ami Peter,
Manolo, Mohamed, René, Margarita, Greg,
Johan, Ho,Vladimir, Husni, Elèni,
que ferons-nous, de nos espoirs ?
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