"Il était posé devant sa porte, à moins de vingt centimètres du seuil, dans la lueur blafarde du petit matin qui filtrait par la fenêtre. Il avait ses pattes rouges et crochues plantées dans le carrelage sang de boeuf du couloir, et son plumage lisse était d'un gris de plomb :
le pigeon. [ … ] Et il fixait Jonathan."
Voilà le récit comme il pourrait être résumé de la rencontre de Jonathan Noël et d'un pigeon posé devant sa porte ; et qui le regarde de son oeil froid.
Jonathan Noël, un célibataire misanthrope et parano ; un « cassé de la vie » aussi, fils de déportés, orphelin, recueilli dans un ferme qui exploitera ses jeunes années, marié et abandonné par sa femme. Il vit depuis trente ans dans la même chambre de bonne de 7 m², sous les toits. Pendant la journée il travaille comme vigile, en planton devant une banque.
On l'aura compris… une vie statique et sans à coups ; et le refuge quasi foetal dans la chambre de bonne. Et puis voilà
le pigeon qui lui arrive – je dis qui lui arrive de même qu'il aurait pu lui arriver une tuile – rompant la monotonie de cette vie dont rien ne dépasse. Jonathan en éprouvera un vif traumatisme.
Il finira par se libérer de ce traumatisme après une longue marche, une nuit passée dans une « chambre d'hôtel cercueil » et un orage… de ce traumatisme ou de l'autre, celui de ses jeunes années…
Un petit livre… mais, pour moi, pas si facile à lire. L'auteur doit plonger le lecteur dans un ennui mortel, s'il veut lui faire toucher le poids de l'ennui dans lequel est plongé son « héros »... C'est réussi ! Parfois, on dirait du Delerm…