Ce bref roman, écrit au début du 20ème siècle, fit, selon ce que nous indique la préface, une grande impression sur la société de l'époque. Un film s'en est inspiré.
Dans ce livre, l'auteur met en scène le richissime Bhupati, qui, persuadé d'avoir un grand talent d'éditorialiste, lance son propre journal appuyé par Umapati, son beau-frère, un avocat sans cause.
Naïf et enthousiaste, il se lance dans ce projet la tête la première, y investit beaucoup de temps et d'argent, délaissant quelque peu son épouse,
Chârulata, désoeuvrée.
Comme il est courant pour un homme de son rang à cette époque, il décide de faire venir et d'héberger de la famille afin de tenir compagnie à
Charulata. A cette fin, sont invité Amal, cousin de Bhupati, ainsi que Manda, l'épouse d'Umapati.
Amal est un étudiant capricieux et fat qui nous est présenté au départ sous un jour moqueur.
Charulata cède à beaucoup de ses caprices et en fait un enfant gâté. Ils se prennent tous deux de passion pour la lecture et
Charulata va finir par pousser à Amal à écrire.
Amal excellera sur cette voie, et finira par être publié et faire l'admiration de tou(te)s, ce que
Charulata vit mal. Elle aussi se met à écrire, et une véritable rivalité s'installe entre ces deux personnes. Cette rivalité est ambiguë, et l'on sent poindre, dans cette relation, une coloration passionnelle, une « subtile tension » finement orchestrée par l'auteur. Cet aspect houleux va être avivé par la présence de Manda, qui aiguillonne la jalousie de
Charulata.
Bhupati, absorbé par son journal, ne se rend compte de rien. Malheureusement son associé a provoqué pour lui une situation financière difficile. Umapati et Manda sont écarté, et Bhupati tente de renouer sa relation distendue avec
Charulata.
Malheureusement, le départ d'Amal va éclairer d'un jour nouveau cette relation. Bhupati voit à quel point son épouse vit mal cette séparation et finit par en prendre ombrage.
De fil en aiguille, de malentendus en petites incompréhensions, la relation se délite inexorablement.
J'ai beaucoup aimé l'univers que nous offre ici Tagore, réellement dépaysant. L'histoire commence assez rapidement, le récit suit un rythme continu, sans interruptions ou lenteurs, et la traduction restitue bien l'atmosphère générale de l'oeuvre. J'ai aussi bien aimé l'aspect ambigu et subtil des relations entre les protagonistes, cette petite ombre furtive qui pointait le bout de son nez entre les pages, sans se dévoiler pour autant, ainsi que la distance que Tagore prend avec ses personnages. Sympathique découverte