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3,58

sur 335 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Tiffany Tavernier tombe un jour sur une photo et un article de journal qui la saisissent : une femme d'une quarantaine d'années, plutôt bien habillée, se révèle en réalité être une SDF. Enfin, plus exactement, son domicile est l'aéroport d'Heathrow près de Londres. Lorsque le journaliste, pour conclure l'article, lui demande pendant combien de temps elle compte vivre dans cet aéroport, elle répond : « Toute ma vie ».
Tiffany Tavernier comprend qu'elle tient là un sujet de roman.
Roissy. L'auteur y passe des mois et des mois à observer ceux que l'on appelle « les indécelables » : l'aéroport est leur lieu de vie et pour échapper aux caméras de surveillance et aux vigiles, ils se font passer pour des voyageurs. le long des couloirs, ils traînent une valise ; dans les salles d'attente, ils dorment sur les fauteuils ou lisent les journaux abandonnés ; dans les cafétérias, ils vont parfois se payer une boisson ou un sandwich ; dans les boutiques, ils osent à peine effleurer du regard les foulards en soie et les beaux sacs de cuir.
Ils font semblant d'attendre un départ qui n'arrivera jamais.
« Comportement sobre. Exposition sobre. Ne jamais laisser de traces : jeter les mégots dans les poubelles, jeter les déchets dans les poubelles. Aucun geste excessif. Se gratter, mais pas jusqu'au sang. Boire, mais pas au goulot. Courir, non. Hurler, non. S'en tenir aux codes. Aux limites. A la procédure. »
La narratrice s'appelle Anna, elle connaît par coeur cet espace gigantesque où travaillent cent vingt mille personnes et où passent un million de voyageurs par an. Un monde à part, une planète où se mélangent toutes les langues, toutes les nationalités, toutes les classes sociales. Elle vit là depuis quelques mois. Elle connaît tout de cet espace qu'elle hante nuit et jour, elle sait comment faire semblant. On l'interroge ? Elle répond qu'elle part pour Shanghai, qu'elle y a rencontré quelqu'un, qu'elle va peut-être s'y installer. Elle ferme un instant les yeux pour imaginer les lieux où elle n'ira jamais. Deux heures après, elle explique à un quinquagénaire un brin curieux qu'elle va à Manille.
Le personnel de l'aéroport commence à lui devenir familier, certains lui disent bonjour.
Elle imagine la vie des uns, des autres, regarde les avions décoller, promesse d'un nouveau départ, pour elle aussi, un jour, peut-être.
« Hier, je suis partie à Naples, Nairobi et Abidjan, m'improvisant tour à tour prof d'histoire, chef de produit L'Oréal, femme d'expat' militaire… Femme d'expat', c'était une première et j'ai été brillante. »
Elle vit en se laissant « traverser par la foule » dans un lieu en dehors du monde, une limite au-delà de laquelle on ne peut plus aller. À moins de faire demi-tour et ça, elle n'en veut pas.
Elle n'est pas seule : il y a Vlad dont le passé est un mystère et les autres, Liam, Joséphine, Josias…
« Pour eux, comme pour moi, ce monde est notre dernière chance. le quitter, ne serait-ce qu'une seule fois, ce serait renoncer à tous les voyages, à toutes les identités, perdre, en somme, le peu de matière qu'il nous reste, rompre définitivement le fil qui nous tient encore en vie, briser la magie par laquelle chacun de nous s'invente hors la violence du monde. »
Et cette femme, Anna, qui est-elle ? Elle ne le sait pas. Un choc lui a fait tout oublier de son passé qui lui revient par bribes lors de terribles cauchemars…
Il lui faudra pourtant sortir de son jeu de cache-cache pour entrer en contact avec l'autre, un homme, qui a aussi son histoire...
Un très beau texte tellement cinématographique que je ne serais pas étonnée de le voir prochainement porté à l'écran. C'est tout un monde complètement fascinant que l'on découvre et dans lequel on se trouve plongé, comme l'a été l'auteure elle-même : un lieu de mouvements, de sons, de lumières et de mots - l'aéroport a son propre langage- où les gens se croisent, se mêlent, s'évitent et se rencontrent parfois.
Le roman de Tiffany Tavernier nous permet aussi de voir ceux que l'on ne voit pas, des gens meurtris, ravagés par l'existence et qui refusent de retourner « à la rue », se sentant vaguement protégés par les vitres de l'aéroport comme dans une bulle, un cocon. Roissy est peut-être aussi le seul lieu où ils puissent imaginer un nouveau départ… Qui sait ? Des avions qui s'envolent, il y en a tous les jours.
Tiffany Tavernier a parfaitement mis en scène le quotidien de ces « indécelables », leur façon de se planquer parmi les autres, de se fondre au risque de s'oublier peut-être, aussi.
C'est certain, jamais plus je ne verrai Roissy comme avant…
Un très bon roman !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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J'ai eu du mal ,au début,à m'immerger dans cette drôle d'histoire.
Une femme,nous comprenons qu'elle est amnésique, passe ses journées et ses nuits à l'aéroport de Roissy. Avec beaucoup d'artifices et de combines, elle se fait passer pour une voyageuse qui embarque pour une destination différente chaque jour.Elle se fond dans la foule de voyageurs pour y trouver la sécurité dont elle a besoin.
Mais ,un jour,la rencontre d'un certain Luc,va faire voler en éclats sa bulle de sécurité.
Un roman , écrit d'une belle plume,étrange, angoissant ,déstabilisant parce qu'il nous renvoie à nos propres peurs.
À conseiller.⭐⭐⭐⭐
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Une « journée » à Roissy pour suivre cette femme qui survit et erre dans les couloirs de l'aéroport. Elle doit y vivre sans se faire remarquer, se nourrir, de protéger...
Elle s'invente des vies en fonction de ses rencontres.
C'est une femme sans mémoire qui n'a pas vraiment envie de la retrouver, elle a trouvé une certaine sécurité dans cet aéroport ! Elle pourrait, pourtant, en sortir à tout instant et tenter de retrouver son passé...
Un roman lu d'une traite, quasiment... l'écriture de Tiffany Tavernier est efficace. La construction du roman est entraînante et à l'image de l'héroïne qui marche comme les autres voyageurs pour ne pas se faire repérer. On n'a pas envie de lâcher le roman, comme cette femme qui ne peut s'arrêter de marcher !
Un joli coup de coeur !
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Dans un décor bien connu des voyageurs, l'aéroport de Roissy, l'auteur nous invite à un voyage bien différent, insoupçonné dans l'énorme ventre, machine de l'aéroport. Bien évidement les voyageurs, le personnel sont présents mais aussi ce refuge pour les "indécelables", les SDF qui vivent dans les sous-sols, ceux qui doivent échapper à la vigilance des 1700 policiers, des 700 caméras, être le plus invisibles, donc se glisser dans la peau d'un voyageur, être propre, bien habillé, avoir une valise et surtout marcher continuellement pendant des heures.
C'est la quotidien de cette femme depuis huit mois qui s'invente une vie selon ses rencontres à la surface et le soir rejoint Vlad dans leur cache dans les sous-sols.
Je n'ai pas accroché dès le début du roman, je le trouvais décousu mais j'ai bien fait de poursuivre cette lecture la raison arrive vite et ensuite j'ai été emporté par ce magnifique portrait de femme qui se dévoile progressivement, c'est pour moi un roman fascinant, d'une grande réalité, justesse d'un monde indécelable.
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Oubli... souvenir. Pour celle qui ne connaît plus de nom, quel autre lieu possible que cet aéroport? Passagère d'une l'absence, sa mémoire transite. Atterrir, toucher terre, retrouver la moindre racine, paupière ouverte d'un signe..
Aimer les ailes des avions comme on chérit les grands oiseaux "A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.", comme l'écrivait Baudelaire. Roman de lieu, d'espace, roman où se mêlent peurs souterraines et profondeurs humaines. les limbes du monde....? Terminal 2...souls on bord..et quelques autres bagages, plus tard.
Derrière les vitre d'un passé, les sans histoire creusent en mémoire des couloirs protégés.
J'aime les gares. J'aime les trains. J'aime les regards sur les quais, tous les passages secrets de millions d'histoires qu'on devine ensemencées .
J'aime les pas perdus, et les personnes perdus pour tout le monde. J'aime les gares et grâce à Tiffany Tavernier j'aime les aérogares. L'instant entre arrivée et départ, ce laps du temps, comme un navire échoué sur une lande du Dartmoor...
Amnésie, émergence, mémoire, immersion. Des lettres tournent comme tombent les heures aux couleurs du monde. Souvenirs s'envolent ... et, peut être... reviennent un jour tous les avions.

Astrid Shriqui Garain
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Encore une belle lecture dans cette rentrée littéraire décidément riche ! La rencontre improbable de 2 solitudes en recherche : de sa mémoire pour l'une et de sa femme pour l'autre. En effet, Anna et Luc ne se connaissent pas mais l'aéroport où ils errent va les faire se croiser, se reconnaître, chacun devenant la béquille de l'autre. L'histoire, construite intelligemment, est portée par l'écriture sobre et précise de l'auteure. Un roman à découvrir.
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J'ai apprécié le style dépouillé, les phrases et les chapitres courts: non pas intrinsèquement, mais comme un bon reflet de la précarité, du jour le jour des SDF qui constituent les héros de ce roman. Il en va de même du réalisme des descriptions, du vocabulaire (triple 7, yellow dog...) qui matérialise l'existence d'un langage et l'univers commun de ces individus pourtant solitaires de Roissy, au delà de leur vie cabossée.
Mais surtout, j'ai été intéressé par l'amnésie comme moyen de redécouvrir le monde avec des yeux neufs: écriture à partir d'une page blanche, mais en partant d'une situation d'adulte. En fait cette amnésie est un moyen de porter un autre regard sur les gens, les choses, les événements, que ne perçoivent pas les voyageurs "normaux". Il en va de même dans le domaine des sentiments, y compris sentiments amoureux, où je retrouve une "remise à zéro" par rapport à la complexité de leur établissement et de leur développement: on y trouve des relations humaines dépouillées, ramenées à leurs essentiels, ce qui n'enlève rien à leur force comme le montre la relation avec Vlad.
Une lecture agréable mais aussi et surtout intéressante.
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Une femme erre dans l'aéroport. Elle ne connait pas son nom, ne sait pas pourquoi ni comment elle se trouve là. Petit à petit, elle met au point des techniques de survie.
Roissy, c'est l'histoire d'une femme en quête d'identité. C'est également le récit romancé de la vie des SDF dans l'aéroport, la chasse au coin pour dormir, la fuite organisée pour échapper aux services de sécurité, les astuces pour trouver à manger.
L'aéroport est représenté comme le symbole de la vie en transit, entre un avant oublié et un après inconnu.
Avec une plume sensible, l'autrice nous emmène en voyage au coeur des laissés pour compte. Un beau roman
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L'action se déroule dans l'aéroport de Roissy. La narratrice tire derrière elle une valise et se déplace de terminal en terminal. Elle vit là depuis 8 mois, dormant où elle peut, en sous-sol, dans un cagibi, derrière un comptoir, mangeant nourriture abandonnée par les voyageurs ou offerte, se lavant dans les toilettes, volant parfois un portefeuille ou quelques pièces.

Elle est toujours en mouvement, propre et bien habillée pour ne pas se faire repérer, pour rester anonyme, s'inventant des destinations et d'autres vies dès qu'on l'interroge.

Elle a atterri là après un accident de la route et est amnésique depuis, ayant même oublié son prénom. Elle s'est fait quelques amis parmi les "indécelables" et survit grâce à leur aide et leurs astuces.

Nous découvrons, à travers les yeux de cette femme, d'autres facettes de cet aéroport gigantesque, avec l'envers du décor : les sous-sols, les services de maintenance, le personnel de l'aéroport, l'antenne d'Emmaüs, les SDF...

Ce livre m'a rappelé un de mes films préférés, vu 5 ou 6 fois, "Le Terminal" de Steven Spielberg avec Tom Hanks jouant Viktor qui se retrouve coincé à l'aéroport JFK de New-York pendant plusieurs jours.

L'écriture est agréable, les personnages bien brossés. La jeune femme en proie à des cauchemars terribles va finir par retrouver la mémoire et renaître à la vie.

J'ai apprécié ce livre mais ce n'est pas un gros coup de coeur car malgré tout je ne me suis pas vraiment sentie proche et/ou attachée à elle (contrairement par exemple à Violette de "Changer l'eau des fleurs") et suis restée un peu sur ma faim...


Lien : http://www.unebonnenouvellep..
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Je découvre la plume poétique de cette auteure avec ce court roman qui se lit d'une traite. Comme la narratrice nous sommes à la recherche de ses souvenirs essayant de relier les fils de cette mémoire qui petit à petit réapparaîtra, dans cette attente elle est une « indécelable », une sans domicile fixe déguisée en passagère. Roissy, un lieu de transit où pourtant certains restent. J'ai découvert grâce à l'autrice le monde des « indécelables » de Roissy dont je n'avais jamais entendu parlé, une « communauté » soutenue par des associations ayant des permanences directement à l'aéroport. Un monde invisible mais pourtant connu.

Dans cette errance, un rendez-vous systématique pour notre narratrice, l'arrivé du Paris-Rio en hommage aux victimes du crash, sa route croisera alors celle d'un homme, Luc, d'abord la peur puis les rapprochements. Ces deux là vont s'apprivoiser, Anna, comme elle se fera appeler, reprendre goût à certaines choses et lui commencera le deuil de sa femme qui était dans cet avion.

Tout un monde vit dans Roissy et notre narratrice se lie aussi avec Vlad et Josias dont elle est plus ou moins proche, ils sont ses repères jusqu'à ce que Luc entre dans sa vie. En parallèle notre narratrice va aussi lire les écrits de Liam, un autre sans domicile fixe, ils nous sont retranscrits. Les intermèdes sur ces écrits coupaient le rythme de lecture à mon sens, certes ils permettent d'expliquer son comportement final mais ils ont eu tendance à me déstabiliser.

Je reste partagée sur cette lecture, la tension entourant la narratrice sur sa peur d'être découverte et celle de se découvrir m'a happée et ne m'a pas fait lâcher ce roman avant de l'avoir terminé mais j'ai trouvé que les révélations sur son passé n'étaient pas assez limpides et je reste un peu dans le flou à la fin. Ce n'est pas un roman dont je me souviendrai malheureusement.
Lien : https://leslecturesdemamanna..
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