Pierre Thiry s'est auto-édité. Je le remercie donc personnellement pour cet exemplaire offert à titre gracieux et qui m'a permis d'avoir une petite idée de son monde imaginaire.
Ce livre débute sur un pari : comme il ne veut pas avouer à sa nièce qu'il a inventé le titre d'un livre pour mieux l'impressionner par son érudition, un bouquiniste, l'oncle Sigismond, décide de relever ses manches et d'écrire lui-même le livre en question. Sous un pseudonyme, bien sûr.
Il n'a jamais rien écrit auparavant. C'est un grand lecteur mais pas un écrivain. Alors, forcément, au début, ça coince un peu, il a du mal à bien mettre en forme son intrigue. Et puis, il prend son rythme et ça donne un peu l'impression de partir dans toutes les directions.
Seulement, ça n'est qu'une impression,
Pierre Thiry sait où il va et où il emmène son lecteur. Ce lieu, c'est son monde imaginaire, un monde, vous vous en doutez, nourri de lectures et aussi de chansons. Il y a beaucoup de chansons dans
Ramsès au Pays des Points-Virgules, des poèmes aussi. Des couplets ou des quatrains que l'auteur nous demande de compléter à notre façon, ou bien qu'il complète à la sienne. Comme beaucoup de ces vers sont tirés de
Boris Vian, je crois que celui-ci ne s'indignerait pas de la liberté prise. Pour
La Fontaine, souvent cité aussi, j'étais plus perplexe. (Mais
La Fontaine est un auteur plus scolaire, ce doit être pour ça. Very Happy )
Pierre Thiry est un homme cultivé, pour moi, ça ne fait aucun doute. Parce qu'il y a, dans son roman qui mériterait plus, je pense, le nom de conte, toute une multitude de clins d'oeil malins et de références à Alice au pays des merveilles, aux contes de Perrault et à tout plein d'autres ouvrages qui ont en commun d'être souvent présentés comme de la littérature pour enfants alors qu'on les apprécie mieux à l'âge adulte.
L'"intrigue", à proprement parler, il n'y en a pas, je préfère parler de prétexte ou d'argument. Ca fait plutôt penser à une cascade de scènes oniriques (attention : elles sont reliées entre elles avec cohérence, toujours comme dans Alice) qui se doubleraient d'un parcours de montagnes russes. C'est drôle, très animé, déroutant aussi. En tous cas pour le lecteur qui joue le jeu.
La seule chose qui m'attriste, c'est de penser que, pour certaines personnes, dépourvues de fantaisie ou peu habituées aux livres, pour celles également qui n'ont pas de formation littéraire (avec ou sans diplômes),
Ramsès au pays des points-virgules sera plutôt identifié comme un délire incompréhensible, tout juste bon pour les enfants. C'est une idée qui ne vous vient que le livre refermé, quand vous faites le point sur la somme de connaissances en culture (littéraire et générale) qu'il faut avoir pour lire un conte comme celui-là et qui, pourtant, est rédigé dans un langage très simple.
Enfin, au milieu de la régression (presque) générale, il est bon de savoir qu'il reste de petites poches de résistance, comme ce roman de
Pierre Thiry avec lequel on passe un bon petit moment si l'on se donne la peine d'entrer dans le jeu de l'écrivain.