AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,59

sur 92 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Fuir l'été actuel et se plonger dans l'un des années cinquante, quelque part sur le sol irlandais. S'immiscer dans la moindre petite parcelle du quotidien, à priori bien banal, de certains habitants de ce petit coin d'Irlande. Mais la banalité de la vie d'une bourgade existe-t-elle vraiment ? Chaque âme qui l'habite a un passé et un présent où se bousculent des impressions, des sentiments, des blessures, des pertes, des sensations et même des envies de protection d'une vague connaissance. Des personnes se croisent, s'observent, s'attirent alors que les gestes du quotidien continuent de se dérouler, tâche après tâche.
C'est un début d'été, un bel été dont les habitants se réjouissent dans ce bourg de Rathmoye. Avec ses commerces, son dépôt de charbon, ses pubs, ses deux églises… rien de particulier le distingue des autres petites villes irlandaises. Ce jour de juin, un jeune homme étranger au bourg prend des clichés des funérailles de Mrs Connulty. Ellie, la femme d'un fermier du coin, s'interroge sur cet homme venu à vélo et qui demande le chemin du cinéma brûlé lors d'un incendie survenu des années auparavant. Qui peut-il être et pour quelle raison est-il là ?

Lentement, très lentement, en s'attachant à tous les petits détails qui composent ces vies dites ordinaires, William Trevor nous les fait vivre de l'intérieur, avec un partage qui s'installe à notre insu, graduellement mais de manière diablement efficace. On se laisse aisément, presque hypnotiquement entraîner vers ces quotidiens scrupuleusement décrits. Ils laissent place parfois à des évènements plus ou moins dramatiques qui composent les existences des uns et des autres.

L'auteur nous fait rentrer au numéro 4 de la Grand-Place, la demeure de la défunte Mrs Connulty. Pas de chagrin chez sa fille qui n'était pas appréciée par sa mère. de cruels souvenirs remontent de l'enfance à la vue des bijoux qui sont désormais les siens. Avec son frère, elle partage maintenant cette pension à l'atmosphère morne. Frère et soeur n'ont pas grand-chose à se dire.
On se glissera à la ferme de Dillahan, l'époux d'Ellie, pour la suivre dans ses moindres mouvements ; nettoyer la laiterie, désherber le potager, ramasser les oeufs… l'accent porté minutieusement sur chaque geste, même les plus anodins comme ouvrir la fenêtre, raccrocher la balayette, donne l'impression très nette de partager la pièce, les déplacements, de suivre ce rythme lent synonyme de monotonie des jours. Chaque vendredi elle va livrer ses oeufs au bourg à quelques kilomètres qu'elle parcourt à bicyclette.
Florian, notre inconnu photographe, vit dans une gentilhommière, héritée de ses parents avec les créances qu'il ne peut honorer. Une vente et un exil sont ses uniques projets. Passif, sans aucun allant lié à son jeune âge, il vit doucement, au jour le jour. Les successives descriptions de cette demeure délabrée qui se vide peu à peu sont magnifiques. J'ai visualisé ce qu'elle fût, ce qu'elle est.
Il y aussi le vieux Orpen Wren qui n'a plus toute sa tête, qui attend chaque jour le train dans la gare désaffectée et discourt sur une ancienne demeure désormais rasée et ses habitants morts ou exilés.

Une autre rencontre d'Ellie et Florian se fera au cash and carry. Dans les habitudes d'un bourg à l'apparence tranquille, un homme arrivant à vélo se remarque.

Alors que la banalité des gestes de chaque jour emplit les pages, l'auteur y glisse subrepticement les échanges qui ont lieu entre Ellie et Florian. C'est un sourire qui ravit, une envie de rire étouffé. Dans les faits et gestes d'Ellie, ses pensées s'égarent vers le photographe et lui font parfois perdre le fil d'une conversation. Tout est dit sous couvert, modestement, et paradoxalement j'ai été saisie par la force de ce récit éthéré. Les songes de la jeune femme s'immiscent dans le texte comme ils s'immiscent dans son quotidien, la transformant et la faisant se sentir coupable sans pouvoir s'opposer à de telles pensées.
La construction est lente et minutieuse, même si on sent une accélération dans la seconde moitié. Cette trame intéressante insère aussi les personnages avec qui nous avons lié connaissance car les blessures des uns agissent et interfèrent dans l'histoire à venir. Elle nous fait également appréhender le temps qui file, au rythme des travaux des champs et des signes climatiques annonçant la fin d'une saison.

Ce roman est une perle mélancolique. Il dépeint à merveille la fugacité d'un été, des relations, mais aussi la fausse banalité de la vie lorsque l'on creuse dans les sentiments et le passé de chacun. J'ai aimé toute la sensibilité humaine qui se dégage de cette lecture simple et envoûtante, dans laquelle on entre à pas comptés, presque précautionneusement pour ne pas perturber le magnifique fil de cette histoire où les sentiments émergent et se démarquent des petits détails qui emplissent le quotidien.
Commenter  J’apprécie          334
Il s'agit d'une histoire d'amour interdite dans l' Irlande pudibonde des années 50 soumise aux diktats du clergé, aux rumeurs et aux cancanages .


Ellie se marie, presque malgré elle au fermier Dillahan, plus âgé et veuf. Il est gentil Dillahan mais il traîne un fardeau bien plus lourd que le travail de la ferme. Un drame le ronge. Ce fardeau s'appelle culpabilité. Et l'auteur nous raconte son histoire. Il gère" sa tonte, son enclos, son amas de vieilles barrières" en tentant vaille que vaille d'échapper à ses idées sombres.
Ellie croise Florian qui vient dans la région régler ses affaires et vendre la maison de ses parents décédés.

Nous vivons, le temps d'un roman, leur amour naissant, puis foudroyant et enfin douloureux mais de toute façon interdit. "Elle lutte contre son fantasme et s'agrippe à la réalité" Florian lui rappelle que" le temps ne pourrait que mettre à nu, ajoutant la blessure à la blessure, la douleur à la douleur et la honte à la honte".

Les personnages sont bien campés dans le décor verdoyant et unique de la campagne irlandaise. Il y a le curé qui accueille ses pélerins au confessionnal. Les soeurs de Cloonhill qui ne manquent pas d'influencer d'éventuels futurs adeptes et Miss Connlty "tranchante comme un rasoir" et qui, finalement se révèle bien différente et plus humaine.

Très beau texte. Très belle histoire qui ne peut s'articuler que dans le contexte auquel elle s'apparente. le style est concis, précis, les caractères parfois suggérés.
Ce livre on ne peut l'oublier, on peut par contre le conseiller.

Commenter  J’apprécie          320
Ellie Dillahan vit à Rathmoye, dans une ferme avec son mari.

Quelques temps auparavant, elle était sortie de l'orphelinat pour être employée comme domestique chez cet homme, pour l'aider à faire face au vide laissé par la mort accidentelle de sa femme et son enfant . Elle avait accepté , lorsqu'il lui avait demandé de l'épouser et vivait une petite vie à côté de son mari taciturne.
Jusqu'à cet été-là où Florian Kilderry arrive avec son appareil photo pour prendre des clichés du cinéma en ruine. Et sa vie va prendre du relief, l'amour entrer dans sa vie.

Très agréable de se laisser emporter par la vie, les secrets de ce village irlandais.
Commenter  J’apprécie          100
Rathmoye, petit bourg d'apparence paisible au milieu de la campagne irlandaise.
C'est là, que se rencontrent Florian Kilderry revenu au pays pour vendre la maison de ses parents défunts et Ellie Dillahan mariée à un éleveur de la contrée.
Un amour fulgurant et sincère pour Ellie, un plaisir fugace pour Florian « cet été là ».
Cette histoire peut sembler ordinaire si ce n'est qu'elle est racontée et écrite dans le style si particulier de William Trevor : une grande précision des mots sans fioriture de la vie au quotidien contraste avec le bouillonnement intérieur des pensées et émotions que l'auteur nous chuchote à l'oreille, à peine perceptibles.
Miss Connulty qui a connu par le passé un épisode douloureux est la voix-témoin qui alerte le lecteur sur le drame en construction.
J'ai beaucoup aimé la manière dont William Trevor aborde dans ce roman les différents angles du thème central de l'abandon. Les lieux perdus de la maison parentale de Shelhanagh et le pavillon du gardien de Lisquin « sanctuaire clandestin » des amants en sont par exemple des symboles évocateurs.
Un très beau roman tant dans la poésie extrême de la contemplation de la nature que dans la force silencieuse mais ravageuse de la passion humaine.
Commenter  J’apprécie          80
C'est un beau roman grave que celui-ci. Je serai passé à côté si je n'avais pas lu deux excellentes critiques car son titre peut paraître bien mièvre. L'intrigue se passe toute entière dans l'Irlande rurale des années cinquante. Ellie Dillahan, enfant abandonnée, est élevée par une congrégation religieuse. Elle est placée comme employée chez un fermier, veuf depuis quelques années à la suite d'un drame terrible : il a accidentellement écrasé sa femme et son enfant avec son tracteur. Elle l'épousera. Mais de ce mariage, plus dicté par une forme de reconnaissance envers son futur mari que par amour, la jeune Ellie se sent un peu prisonnière. le roman ne suit pas cette trame chronologique : au départ, on apprend à connaître les autres protagonistes de cette histoire : les habitants de la ville (imaginaire ?) de Rathmoye, qui auront une influence décisive sur les suites de la brève passion amoureuse qu'Ellie éprouvera pour Florian Kilderry, un jeune homme un peu artiste, qui se cherche. Raconté comme je viens de le faire, ceci pourrait faire craindre un plat roman sentimental, possiblement dramatique. Mais pourtant, il va bien au delà car c'est aussi une réflexion sur le temps qui fuit, les souvenirs dont personne ne peut se défaire tout à fait, la force des habitudes... Magnifique.
Commenter  J’apprécie          50
C'est le récit d'un été dans la petite ville irlandaise de Rathmoye, dans les années 50. le quotidien s'étire au gré des allers et venues dans les commerces, des travaux aux champs, des rencontres sur la Grand-Place et au pub. Dans ce petit univers, on se croise, on s'observe, et les ragots vont bon train. Ainsi, lorsqu'un jeune homme étranger ose prendre des photos lors des funérailles de la riche Mrs Connulty, on s'interroge : qui est-il ? Pourquoi est-il là ? Ellie, jeune épouse du fermier Dillahan, fait la connaissance de cet inconnu photographe qui se nomme Florian Kilderry. Orphelin depuis peu, il est de retour le temps d'un été pour vendre la maison de ses parents et nourrit des rêves d'exil. Au fil des jours, leurs rencontres se font plus fréquentes, d'abord inattendues, puis espérées, et enfin promises.
Lentement, William Trevor nous fait pénétrer dans le secret de ses vies ordinaires. Il en décrit le déroulement en s'attachant aux petits détails, donnant au lecteur le sentiment de partager la même pièce que ses personnages, d'observer leurs actes. Et c'est là, dans ces gestes anodins du quotidien que décrit William Trevor avec tellement d'intensité, que le lecteur perçoit la vérité : celles des souvenirs, des blessures et des tragédies enfouies, mais aussi des espoirs qui perdurent. Progressivement, l'auteur explore avec beaucoup de sensibilité et de pudeur les sentiments humains, leur complexité et leur manière inattendue de bouleverser les destins.
Une lecture mélancolique et envoûtante.
Commenter  J’apprécie          20
⚠️Une pépite !

Un été, dans les années 50, à Rathmoye, petit bourg d'Irlande où il ne se passe jamais rien..

Lui, Florian Kilderry arrivé à bicyclette, inconnu avec son appareil photographique et son chapeau qui photographie les obsèques de Mrs Connulty, riche et respectable paroissienne …… Il vit dans une gentilhommière, héritée de ses parents avec les créances qu'il ne peut honorer.

Elle, Ellie, enfant trouvée élevée chez les Soeurs a épousé Dillahan, un agriculteur veuf, un homme bon, taiseux tourmenté.

Je n'en raconte pas plus…même si vous avez deviné que, le temps d'un été, Ellie et Florian vont vivre un amour caché.

J'ai tellement aimé la lenteur de ce roman… Lentement, très lentement, en s'attachant à tous les minimes gestes qui composent ces vies dites ordinaires, c'est aussi la chronique du village avec toute sa gamme de personnages secondaires magnifiquement incarnés. le lecteur suit les moindres mouvements de chacun.. C'est beau, c'est poétique ! Je me suis laissé glisser... la découverte des secrets, tourments, les blessures des uns et des autres se fait en douceur, délicatement, pudiquement...

J'ai aimé l'écriture, le vocabulaire juste (merci au traducteur) Bruno Boudard les descriptions des tout-petits riens...les balades auprès du pavillon du gardien de Lisquin, la maisonparentale de Shelhanagh, les rencontres secrètes, les petits mots glissés sous une pierre…

La mélancolie qui s'en dégage est très douce..

Un vrai petit bijou que je vous recommande sans réserve.
𝗝𝗲 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗿𝗲𝗰𝗼𝗺𝗺𝗮𝗻𝗱𝗲 𝗱𝗲 𝗻𝗲 𝗽𝗮𝘀 𝗹𝗶𝗿𝗲 𝗹𝗮 𝗾𝘂𝗮𝘁𝗿𝗶è𝗺𝗲 𝗱𝗲 𝗰𝗼𝘂𝘃𝗲𝗿𝘁𝘂𝗿𝗲 𝗾𝘂𝗶 𝗲𝘀𝘁 𝘁𝗿𝗼𝗽 𝗯𝗮𝘃𝗮𝗿𝗱𝗲…
Lien : https://www.plkdenoetique.co..
Commenter  J’apprécie          10


Lecteurs (227) Voir plus



Quiz Voir plus

Quiz de la Saint-Patrick

Qui est Saint-Patrick?

Le saint patron de l’Irlande
Le saint-patron des brasseurs

8 questions
251 lecteurs ont répondu
Thèmes : fêtes , irlandais , irlande , bière , barCréer un quiz sur ce livre

{* *}