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EAN : 9782714303783
394 pages
José Corti (31/03/1990)
2.83/5   3 notes
Résumé :
En publiant cet essai sur Lewis Carroll (en 1970 chez Corti), le propos de Jean Gattegno était de souligner l’unité de l’homme et de l’œuvre : comment pouvait-on concilier, en effet, le clergyman et l’amateur de petites filles, le fantaisiste et le professeur ennuyeux, le conteur onirique et le logicien autrement qu’en tâchant de retrouver le fond commun à tous ces personnages, à ce même personnage, homme privé, mais aussi créateur, artiste et penseur. Cette étude... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Une véritable Bible pour tous ceux qui veulent travailler sur Lewis Carroll. le livre traite davantage la qualité littéraire des oeuvres de Lewis Carroll que du caractère très ambigu de l'auteur.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Comment s'évader? Comment aider un lecteur, enfant ou adulte, à franchir cette frontière qui borne, et enferme, le monde dit réel? Comment Alice peut-elle oublier, et nous à sa suite, la chambre bien victorienne dans laquelle elle est en train de bavarder avec son petit chat pour découvrir, derrière le miroir de la cheminée, un monde aussi étrange, extérieur et intérieur à la fois? Deux procédés qui, de l'aveu général, permettent cette fuite hors du temps ou de l'espace. En cela seul ne réside donc pas l'originalité de Carroll, mais dans le degré d'interpénétration des deux procédés, qui deviennent complémentaires et se renforcent l'un par l'autre.
Mais ces procédés eux-mêmes ne suffiraient pas, et Carroll en fait intervenir un troisième: le rire, dont le but est de détruire les derniers liens qui nous rattachent à un univers stable, aux règles reconnues et acceptées par tous. Rire qui n'épargne rien, ni les conventions sociales, ni les principes moraux, ni les catégories intellectuelles. Rire, surtout, qui permet que le scandale qu'est le nonsense ne soit pas senti comme tel. Car c'est de la fusion de ces trois procédés que naît le nonsense carrollien, et c'est en lui que chacun trouve sa justification. Les jeux destructifs du langage, les idées cocasses, le passage insensible entre rêve et réalité, l'intervention d'éléments tirés du merveilleux enfantin - tout cela se conjugue et se couronne dans cette création originale que représente le nonsense. Et son aboutissement - provisoire, puisque d'autres étapes, dans la vie comme dans l’œuvre de Carroll, marquent le cheminement vers la Logique Symbolique - ce sera l'ouverture au monde de l'enfance.
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La pruderie dans le langage est donc reconnue par lui [Lewis Carroll] pour ce qu'elle est: une erreur, qui nous fait prendre les mots pour des idées ou des concepts, qu'ils ne sont pas. C'est au reste tout l'enseignement de Carroll le logicien - mais non pas, semble-t-il, du chrétien Carroll. Qu'en conclure donc? D'une part que se vie, et son œuvre aussi, du moins celle qu'il a écrite "consciemment", témoignent d'une constante fidélité à ces deux notions de l'existence d'une puissance divine, et de l'infinie bonté de celle-ci. D'autre part, et presque contradictoirement, qu'est grande l'insécurité que crée chez lui le maniement irréfléchi de mots qui pourraient mettre en danger un équilibre peut-être fragile: le verbe devenant le garant, et non le signe, de l'idée ou du dogme. Sa défiance à l'égard des idées (rappelons-nous ce qu'il écrit dans Logique symbolique des sophismes contenus dans bien des sermons), sans jamais se traduire par une mise en question des dogmes eux-mêmes, si ce n'est celui de l'enfer, fortement contesté par tout son temps, se révèle, se trahit même par le refus, inhabituel chez lui, de toucher l'échafaudage verbal par quoi les dogmes sont, directement ou non, soutenus. Signe de doutes religieux? Peut-être pas. Mais signe à coup sûr, et ce malgré ses dénégations, du refus de faire porter sur l'ensemble de sa foi le regard aigu du raisonnement logique, dont il était mieux placé que bien d'autres pour connaître la force. L'intuition lui demeure, et la permanence d'une attitude humaine faite avant tout de charité - mais la certitude, sur ce point du moins, semble échapper à cet instrument dont lui-même cependant soulignait dans sa Logique le caractère universel. Si le divorce entre le cœur et la raison n'est pas nécessairement le signe d'une foi mal assurée, du moins nous fait-il comprendre que, là où les facultés intellectuelles mettant en jeu le raisonnement logique ont libre cours, la foi, sans être écartée, reste absente. Si aucun syllogisme ne peut servir à démontrer l'existence de Dieu, non seulement celle-ci ne saurait être l'objet de réflexion, mais même elle ne peut que disparaître lorsque la création littéraire, dans le nonsense, est le fruit de cette même logique. L'absence de Dieu dans les deux Alice et dans le Snark est l'envers du triomphe de la logique qui caractérise ces ouvrages. Wittgenstein disait: "La philosophie commence quand le langage part en vacances." De la même façon, il semble que, pour Carroll, Dieu n'apparaisse qu'avec l'effacement ou le départ de la logique. Ce n'est pas dire que la foi soit chez lui insincère ou fragile, mais simplement qu'elle ne se confond jamais avec la logique, qu'elle se conjugue peut-être avec elle, mais peut-être aussi comme l'eau avec le feu. Pilier, certes, mais non pas unique.
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(...) s'il n'était pas l'homme d'un seul livre - les pamphlets oxoniens, le Snark, Symbolic Logic, le prouvent à l'envi -, Dodgson était peut-être l'homme d'un seul problème. Je veux dire que ce qui notamment a fait la réussite éclatante d'Alice puis du Miroir, c'est la communion étroite qu'ils révélaient entre l'âme de leur auteur et certains problèmes enfantins les plus sensibles; il y avait chez le jeune Carroll une spontanéité dans la création, et une adéquation entre l’œuvre créée et les créations de l'esprit enfantin, qui contraignaient à en chercher la cause non dans un effort de compréhension venu de l'extérieur (qui serait celui d'un observateur, le plus attentif possible), mais dans une identification complète de l'auteur à son modèle. Il ne s'agit pas de dire "Alice, c'est Carroll" -, mais de se rendre compte de ce que, à travers Alice (ou ses camarades de rencontre) c'est Dodgson lui-même qui nous parle. Son œuvre est spontanée par ce qu'elle exprime des problèmes qu'il n'a pas cessé de vivre sur le plan de relative inconscience. Le mécanisme même de la création d'Alice, sur la barque qui remontait l'Isis, l'improvisation, tellement surprenante qu'elle motiva la question stupéfaite de Duckworth: "Dodgson, c'est là un conte que vous improvisez?" (cité dans Lewis Carroll Picture-Book, p. 358) sont le signe que Dodgson, ce jour-là, puis, lorsqu'il entreprit de rédiger ce qu'il avait raconté, s'exprima lui-même aussi librement que le malade le fait sur le divan du psychanalyste. Dodgson, assis dans la barque, ramant machinalement sous le grand soleil de juillet, mis en confiance aussi par la présence de trois petites filles qu'il aimait, et nullement gêné par celle de son ami Duckworth, était en fait presque dans la situation physique du patient allongé...
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On peut être auteur pour enfant parce qu'on l'a décidé (parce que les livres se vendent bien lorsqu'on les écrits pour des enfants, ou parce qu'on veut faire plaisir à des petits-enfants, ou encore par qu'on ne s'estime pas capable de faire "mieux", donc d'écrire pour les adultes). En ce cas, on écrit des livres qui peuvent plaire, mais qui ne durent guère. On peut aussi écrire pour les enfants parce qu'on les aime, qu'on les comprend ou qu'on croit les comprendre, et qu'on veut les divertir ou les éduquer. La Comtesse de Ségur se situerait dans cette deuxième catégorie. Et puis on peut être auteur pour enfants parce qu'on a gardé soi-même l'âme d'un enfant, non pas au sens abstrait et vaguement poétique de la chose, mais parce que les problèmes qui se posaient à l'enfant qu'on était, faute d'avoir été résolus, se sont transportés dans l'âge adulte, et, restant toujours actuels, sont exprimés avec une sincérité qui impose à d'autres enfants la vérité de l’œuvre: c'est dans cette classe que doit être rangé le Carroll des Alice, mais également, et pour des raisons analogues, le Kenneth Grahame de Le Vent dans les saules, et probablement le James Barrie de Peter Pan.
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Lewis Carroll
Montage d'entretiens menés par Christine GOEME sur Lewis CARROLL. - Jean GATTEGNO, Directeur du livre au Ministère de la Culture, préfacier des Oeuvres de Lewis CARROLL parues dans la collection "La Pléiade" (Gallimard) : la destinée littéraire de L. CARROLL. Les composantes diverses de son oeuvre. Ses Oeuvres de jeunesse. La personnalité de L. CARROLL. Son activité de photographe....
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