Le dialogue du silence - École de la respiration, tome 5

Je n'ai pas l'intention d'ajouter une pierre à l'édifice qu'on a l'habitude de construire : accumuler les connaissances, créer des méthodes, proposer des manuels.
Je décris ce que j'ai connu, ce que j'ai vécu moi-même sans toutefois prétendre que j'en détiens le secret. J'ai connu des maîtres, mais ils sont allés tellement loin que je les perds souvent de vue. Je tâte les traces qu'ils ont laissées pour pouvoir m'orienter.
Je découvre seulement que l'orientation qu'ils ont prise est centripète, bien que leur approche soit très différente dès le départ. C'est cette découverte qui me permet de traiter des sujets aussi divers, à condition de bien montrer dans quel sens ils se dirigent.
La société est organisée sur des principes centrifuges. Ceux-ci nous permettent, soit de nous justifier vis-à-vis des autres (la charité, la gentillesse, etc.), soit de nous consolider de l'extérieur (la sécurité, la prévoyance, etc.). Quant à ce qui se passe à l'intérieur de nous-mêmes, c'est bien autre chose.
La différence entre une bouteille à moitié vide et une autre à moitié pleine, la différence entre ceux qui sont en train de mourir et ceux qui sont en train de vivre, aucun critère objectif ne peut la déterminer. Seul le réveil intérieur nous la fait sentir.
Ce réveil n'est pas le résultat des spéculations intellectuelles, ni des agressions moralisantes.
A un certain moment, sans qu'on s'y attende, la porte s'ouvre et le dialogue commence dans le silence.
p.10

Dans cette société où tout est compliqué, contradictoire, voire même absurde, on peut réserver quelques instants pour oublier tout, les disputes dans la famille, les agressions du milieu ambiant, pour oublier que ce petit moi existe. Ce lâcher-prise nous permettra de repartir à zéro, de voir enfin que Tout est à nous ; le ciel, la terre, le soleil, les monts et rivières, sans qu'il soit besoin de les mettre tous dans notre poche. Nous pouvons nous libérer, ne fut-ce que pour quelques instants, de notre possessivité, pour voir un peu plus grand, un peu plus lucidement.
(…)
Aucun apport extérieur, argent, honneur, pouvoir, ne peut nous procurer la vraie Liberté, car celle-ci est une sensation intérieure qui ne dépend d'aucune condition matérielle ou objective. On peut se sentir libre dans la pire des contraintes aussi bien que prisonnier au comble du bonheur.
p.73

Ce qui importe, c'est de vivre pleinement, chaque instant de ma vie, en accord avec moi-même, ce qui veut dire que j'avance quand je veux avancer, je m'assieds quand je veux m'asseoir. Que les démissionnaires, ceux qui ne font pas ce qu'ils veulent faire et qui font ce qu'ils ne veulent pas faire, aillent ailleurs chercher leurs consolateurs.
La vie se présente comme une suite de fluctuations : hauts et bas, faim, soif, sommeil, réveil, envie de travailler, envie de se reposer, etc. Quand on commence à sentir que derrière ces fluctuations il y a quelque chose d'immuable, on cesse d'en être perturbé.
p.60