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4,02

sur 4706 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Vous reprendrez bien un peu de rentrée littéraire?

 Après un Jean-Paul Dubois décevant, voici le dernier Tuil - eh!je n'ai pas dit la dernière Tuil, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit!

Karine Tuil, je dois dire, je n'aime guère:  toujours dans l'air du temps, à surfer sur les vagues à la mode, un grand sens de la caricature et peu de profondeur, simplifiant les personnages à grands traits, avançant à grands pas, sociologue  efficace, déguisée en romancière, qui sait qu'elle va faire mouche-et qu'elle va vendre- parce qu'elle va nous parler de ce qui nous harcèle,  nous obsède, de ce qui nous rebat les oreilles aussi...

Mais ce livre-là,  on m'en avait dit tant de bien...J'ai retenté l'expérience.

Va pour Les choses humaines, comme dans la chanson.. .

Je l'ai lu, je l'ai même dévoré,  en un jour.
Succès? Surprise? Réconciliation?

Je l'ai laissé tiédir un peu : trop chaud- bouillant. J'avais envie de voir ce qui restait des Choses humaines, justement. À froid.

Eh bien, je pourrais reprendre mon troisième paragraphe mot pour mot: Les Choses Humaines est un produit marketing parfait. Il sera lu, apprécié, il fera réfléchir, discuter. Mais ce n'est pas un roman. Il y manque le style, la chair, l'invention. Il y manque l'art.

Les quatre personnages principaux sont brossés à grands traits, ce sont des types socio-psy' - le self made man, vieille star télévisuelle qui n'arrive pas à quitter le plateau, l'intellectuelle écartelée entre principes et réalité, le fils à papa voué à la réussite sous peine d'inexistence,   la fille timide, traumatisée, coincée entre tradition et émancipation- des "caractères" comme ceux de la Bruyère mais  au temps des empires médiatiques,  de Twitter et de Facebook,  ce sont aussi des silhouettes piquées  à l'actualité récente -l'affaire DSK, l'affaire Weinstein, #balance ton porc - ou à des couples médiatiques célèbres , PPDA /CHAZAL, JJSS /GIROUD.

Karine Tuil, en abeille diligente,  butine à toutes les fleurs, et en fait son miel.

Le bonbon plait. Même si les ficelles sont un peu grosses. Même si c'est le Bûcher des Vanités à l'heure de Me#Too...en version française et en beaucoup moins fouillé,  beaucoup plus sensationaliste et beaucoup moins époustouflant que l'incroyable livre de Tom Wolfe où un simple accrochage déclenche un tsunami social .

Les personnages une fois campés,  l'intrigue déroule sa mécanique inexorable: on l'avait compris, ces quatre-là mis dans le même bocal doivent déclencher une catastrophe.  Un vrai cas d'école. Jusqu'ici, rien que du très attendu ou du déjà vu.
.
Il s'agit d'un viol. Ou pas.  D'un consentement. Tacite. Ou d'un refus. Muet. On est dans cette fameuse "zone grise" qui fait le bonheur des intrigues judiciaires et des versions contradictoires.

 Et c'est dans la seconde partie, toute entière consacrée à l'enquête de police, aux dépositions, confrontations, puis au procès qu'enfin Karine Tuil excelle.

 Pas une ligne de gras, rien que du factuel, des questions, des réponses,  des plaidoiries, des témoignages, un verdict. Et pas le moindre commentaire, la plus timide prise de position. Au lecteur de juger. Il a toutes les cartes, toutes les pièces en main. C'est un grand garçon, ou une grande fille. Qu'il/elle ( je reprends ce tic d'écriture que Karine Tuil a heureusement perdu depuis L'invention de nos vies!), qu'il/elle donc se débrouille..

La rentrée littéraire, n'en déplaise à Babelio qui en fait ses choux gras, n'est pas la meilleure opportunité  pour aborder un livre - trop de battage, trop d'avis, trop d'enjeux -,   ni pour retrouver un auteur qu'on aime ( j'ai été déçue par le dernier livre de mon cher Jean-Paul Dubois! ),  ni pour découvrir le talent d'un auteur vraiment inconnu, ni pour réhabiliter un auteur mésestimé.

Ce livre de Karine Tuil avait tout pour me déplaire, (auteur, sujet, style)  et pourtant je l'ai lu toutes affaires cessantes, sans pouvoir m'en détacher.

Je reste convaincue que c'est un habile produit marketing, mais la dernière partie m'a bluffée et sauve le livre de son habileté marchande. Dommage qu'il faille en passer par tant de clichés pour atteindre cette verité-là.

Traquées,  quadrillées,  cernées par la machine judiciaire, elles sont bien floues et incertaines, Les choses humaines..
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C'est efficace. Souvent, j'ai eu l'impression de lire un long papier de Pascale Robert-Diard, la chroniqueuse judiciaire du Monde, que j'apprécie beaucoup.
C'est du bon journalisme. Mais voilà, est-ce de la littérature ? Pour moi, la réponse est non.
Une des caractéristiques du roman traditionnel, c'est qu'il permet l'identification. Or, ici, pas moyen. le livre de Karine Tuil est ancré dans la réalité la plus contemporaine. Il est quasi impossible de le lire sans chercher des correspondances. Je peux me prendre pour la princesse de Clèves, pour Manon Lescaut et même pour Juju Sorel, mais me prendre pour Poivre d'Arvor, ça, non, ça ne m'a jamais effleurée. Suis-je de mauvaise foi? Les lecteurs De Balzac savaient bien, en lisant Les Mémoires de deux jeunes mariées, que l'écrivain dégoisait sur Marie d'Agoult et George Sand; autrement dit, les romans à clefs ont toujours existé. Mais Balzac transformait des individus réels en archétypes; Tuil reste factuelle. Oui, il y a des hommes de pouvoir qui s'accrochent à leur fauteuil et qui s'envoient des jeunettes, c'est une réalité que tout le monde connaît. Que m'apporte de plus le roman de Tuil par rapport à Paris Match? (En plus, Paris Match est beaucoup plus facile à glisser dans son sac pour aller chez le coiffeur). Au lieu de m'identifier, je retrouve le même mécanisme que dans la presse people: toi, c'est toi, lectrice, et eux c'est eux, et non, vous n'avez pas les mêmes problèmes, contemple l'empyrée et contente-toi de ta médiocrité.
On me rétorquera qu'avoir un fils accusé de viol est en revanche une catastrophe susceptible d'arriver à chacun de nous. Oui mais, là encore, je n'apprends rien. La fameuse zone grise a été évoquée un peu partout; la fille a été violée et le garçon l'a crue consentante. Je suis heureuse que des jeunes aient lu ce roman parce qu'ils ne sont pas forcément abonnés à l'Obs, mais depuis Pervers pépère Weinstein, c'est quand même une notion qui a beaucoup été évoquée. Or, on pourrait penser que le détour romanesque a lui-même cette fonction de zone grise, qu'il doit permettre à une femme violée de ressentir de l'empathie pour son agresseur et pour un violeur d'éprouver l'horreur de se sentir niée comme être humain. Mais ici, les deux plaidoiries, brillantes, comptent les points: chaque lecteur fait sa propre addition et choisit son camp. Ou il choisit de ne pas choisir, il s'abstient. Alors qu'il devrait être à la fois Milla et Alexandre et souffrir de se sentir à la fois victime et coupable dans son humaine condition.
Certes, les personnages de Tuil ont leurs contradictions. Claire Farel est féministe, mais soutient son fils. Ben dites donc. Oui, j'ai beau filer des sous à Amnesty International, si quelqu'un s'avisait de faire du mal à mes gosses, je lui arracherais les ongles un par un avant de les lui faire bouffer. Mon Dieu, mon Dieu, quelle pertinence dans l'analyse de mes fêlures, l'eût-on cru avant de le voir écrit?
Ben, à mon avis, oui.
Alors, qu'y a-t-il de subtil dans ce roman? Que les choses (humaines) sont quand même compliquées parce les femmes doivent être respectées mais il faudrait déjà qu'elles arrêtent de coucher avec des vieux, que c'est pas une raison pour ne porter que des jupes longues et que si il faut anticiper la liste des droits qu'on donne à l'autre avant tout rapport sexuel, y'a pas que chez les mecs que ça va débander.
J'ai déjà du lire ça dans Cosmo.
Quant à l'interprétation que fait Tuil de la fameuse affaire Stanford, je la trouve maladroite. le fils Turner a écopé d'une peine légère parce qu'il appartenait à la bourgeoisie américaine ? C'était en 2015, autant dire une autre époque. Avant Weinstein, avant Metoo. Je ne suis pas sûre que la clémence serait la même aujourd'hui. La transposition me paraît entachée d'anachronisme.
Donc, pour résumer, je n'ai pas aimé (Pour ceux qui n'auraient pas suivi).
Et puis 21€ pour un livre qui se lit en une journée, c'est abusif!
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Dans cet opus, le lecteur est provoqué par l'auteur à la lecture du titre de cet ouvrage et l'appât fonctionne.

En effet, les choses humaines de Karine Tuil est un fait divers à géométrie variable qui donne le tournis et on bascule dans l'inhumain car il est essentiel d'appeler les choses par leur nom.

La première moitié de cet ouvrage, nous révèle le profil des différents protagonistes décortiqué au scalpel par l'auteur pour planter le décor et on suppose, pour agrémenter sa deuxième partie dans le basculement de l'horreur. C'est incisif, percutant, d'actualité.

La famille FAREL est bien assise dans la société. Jean est un journaliste de renom, intelligent, indétrônable, infidèle. Sa femme est une essayiste féministe.

Leur fils Alexandre est un brillant étudiant à Stanford. Mila, la fille du nouveau compagnon de sa mère, accepte d'aller en soirée avec lui, et c'est le dérapage.

Mila déclare avoir été violée et la vie de ces familles vole en éclats.

On comprend vite le scandale qui va impacter la réputation ces deux familles, Alexandre se retrouve du mauvais côté du prétoire sur le banc des accusés, pour viol suite à cette soirée sordide.

Selon moi cette histoire a vraiment débuté à cet instant là. L'auteur nous entraine dans de nombreux questionnements lors du procès et je me suis rendue compte combien à la lecture de la plaidoirie des avocats, des points tangibles pouvaient aussi basculer au bénéfice de l'accusé sur la question du consentement quand bien même dans les affaires de viol malgré les preuves, la victime doit toujours prouver son innocence.

Cette partie est bien menée et j'ai apprécié la qualité de l'écriture de Karine Tuil, mais l'attente a été longue et j'ai songé à abandonner la salle d'audience.
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Je n'avais rien lu de Karine Tuil depuis La Domination (2008), roman auquel je n'avais pas du tout accroché. À cause des diverses récompenses obtenues par Les Choses humaines et les nombreuses bonnes critiques d'amis Babeliotes, j'ai mis le roman dans ma PAL où, depuis, il attend son tour... Mais le troisième item du challenge Multi-défis m'impose le livre le plus populaire de ma PAL au jour de mon inscription à ce challenge, et il se trouve que c'est ce roman. J'ai retrouvé sans enthousiasme le milieu très parisien et très favorisé qui semble être le décor habituel dans lequel évoluent les personnages de l'autrice. Jean et Claire Farel sont des piliers d'un certain microcosme parisien. Jean est un journaliste qui fait carrière à la télévision. Sa femme, Claire, vingt ans de moins, est une essayiste appréciée et connue pour ses positions féministes. Leur réussite professionnelle s'affiche indéniablement et fait des envieux. Alexandre, leur fils a suivi la voie royale avant de se retrouver à Stanford où, forcément, il excelle. Il se sent cependant mal-aimé et délaissé par des parents trop occupés. Jean et Claire viennent de se séparer : Claire a rencontré Adam, un professeur d'un milieu modeste et d'origine juive, avec lequel elle s'éclate sexuellement. Il quitte sa conjointe, pratiquante stricte, ainsi que ses filles pour s'installer avec Claire. Mila, une des filles d'Adam, les rejoint.
***
Ce roman à clés est divisé en trois parties : Diffraction, le territoire de la violence et Rapports humains, parties pendant lesquelles on suivra essentiellement les Farel et très peu Mila. La première partie (vraiment longuette) plante le décor et, si on insiste beaucoup sur les relations sociales et sur le pouvoir du couple, la séparation est liquidée en quelques lignes... J'ai d'abord cru que l'accusation de viol annoncée en quatrième de couverture allait concerner Jean Farel (ça me rappelait quelqu'un), qui entretient une liaison avec une collègue depuis des lustres, mais drague aussi toutes les femmes de son entourage avec plus ou moins d'élégance. Mais non, c'est Alexandre qui sera poursuivi après que Mila aura porté plainte. Ils ont couché ensemble et, si pour Mila, il s'agit d'un viol, pour Alexandre, la relation était consentie. Dans les deux parties suivantes, le lecteur tentera de démêler le vrai du faux (?) et assistera à la progression du scandale qui va toucher toute la famille. Au fil de l'histoire, on découvre l'effarant égoïsme des Farel, les trois !, comme d'ailleurs celui d'autres personnages de pouvoir. La question du consentement est évidemment primordiale, mais j'avoue que j'ai trouvé que l'on tournait en rond assez rapidement. On aborde tous les thèmes dont on parle dans la presse people, du polyamour à #metoo, de l'enfance délaissée aux ravages des réseaux sociaux. Ce qui m'a le plus gênée, c'est l'esprit de classe et la condescendance envers les plus modestes, les subalternes de tout poil… Il m'a semblé, parfois, que la romancière n'en était pas consciente. Seuls Françoise, la maîtresse de longue date, et Claude, le chien, ont éveillé ma sympathie. Il faut croire que Karine Tuil n'est vraiment pas une autrice pour moi.
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Je suis assez partagée avec ce roman.
La première moitié m'a semblé très longue.
Un journaliste célèbre de la télévision
Sa femme de vingt ans plus jeune, féministe, essayiste dans des journaux.
Leur fils de vingt ans, brillant étudiant aux Etats-Unis,.
Tous ces personnages sont très caricaturaux.
Un milieu parisien aisé, pas très sympathique, surfait
.Puis la deuxième partie raconte le procès.
Car oui, le fils est accusé d'avoir abusé d'une jeune fille.
Et là, c'est un peu plus intéressant.
Le sujet est très contemporain, voire peut-être un peu opportuniste de la part de l'auteur. Bon, mais là, c'est mon sentiment je ne suis pas sûre et ne veux pas lui prêter de mauvaises d'intentions.
Plus qu'un sujet de fiction c'est un sujet d'actualité.
Sujet qui nourrit généreusement les réseaux sociaux actuellement.
Les abus sexuels, les zones grises, consentement ou pas…..des questions qui interpellent depuis un bon moment à l'écoute des informations.
Les femmes sont souvent la proie des hommes et c'est souvent ignoble.
Mais on arrive à un stade où il ne doit plus être aussi confortable d'être un homme.
Et si c'est tant mieux, il ne faudrait pas tomber dans le procès d'intention systématique.
Bien sûr toutes ces réflexions sont nécessaires et le quotidien de l'actualité nous les rappelle, sans qu'il soit d'ailleurs facile d'arrêter une vérité ou l'autre.
Ce que je reprocherais donc à ce livre, c'est de ne pas être une fiction littéraire nous emmenant à un autre monde, à des personnages intenses.
Aucun ne m'a fait vibrer.
Si un roman n'a pour mission que de nous plonger dans la réalité, il me semble qu'il lui manque une certaine dimension.
De plus, si la lecture est fluide, ni l'écriture ni le style ne dénotent d'une quelconque originalité.
Je me trouve assez sévère, d'autant que d'ordinaire, j'approuve toujours le choix des lycéens pour leur Goncourt.
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Peu de personnages dans ce roman :
Jean, la soixantaine fringante, journaliste a toujours privilégié sa carrière aux dépens de sa faille.
Claire, sa femme, essayiste reconnue, souvent invitée des plateaux télé pour ses prises de position.
Alexandre, leur fils de vingt ans, brillant étudiant dans une université prestigieuse.
Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes si une accusation de viol contre Alexandre ne venait enrayer cette belle mécanique.

Karine Tuil nous propose un texte d'une grande clairvoyance sur notre société, le mouvement metoo, la violence des réseaux sociaux et l'importance de l'image renvoyée par les médias.
Ce roman sociétal démonte les rouages impitoyables de la machine judiciaire et la douleur engendrée chez les personnes impliquées.

L'écriture est efficace comme toujours chez Karine Tuil.
Les personnages sont minutieusement décortiqués, montrant leurs forces et leurs faiblesses.
Une nouvelle fois, Karine Tuil m'a happée avec une histoire douloureuse.


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Cela fait longtemps que je lis Karine Tuil et avec plaisir en plus. Ses deux précédents romans, en particulier le dernier, L'insouciance m'avaient emballée avec leur toute nouvelle puissance narrative ancrée dans le siècle et ses maux. Elle avait réussi un récit à la densité impressionnante qui puisait bien sûr dans l'actualité et l'observation de la société dans toute la spirale ascendante de sa violence. Un récit qui vous happait et ne vous lâchait qu'à la dernière ligne, rincé, épuisé mais heureux. Trois ans après, je suis rincée mais cette fois c'est plutôt la douche froide. Une déception à la hauteur de mes attentes ou plutôt de mon envie de renouer avec l'expérience précédente. Ici, ça ne marche pas ou plutôt, ça ne marche qu'à moitié.

On a déjà beaucoup parlé de ce livre ou plutôt de son thème puisqu'il est particulièrement d'actualité : le consentement. Karine Tuil explique s'être inspirée d'un fait divers récent aux États-Unis où un étudiant de Stanford (milieu aisé, fac d'élite, sportif, promis au plus bel avenir...) avait été accusé de viol par une jeune fille. Une affaire qui avait mis en lumière ce que l'on a coutume d'appeler "la zone grise" où se confrontent les différences de perception de deux êtres humains ; il pensait qu'elle était d'accord car elle ne disait pas le contraire, elle était pétrifiée de peur et était persuadée que ne rien dire était le moyen le plus sûr de s'en sortir vivante ou le moins mal possible. L'écrivaine s'inspire donc de cet événement qui l'a marquée, le transpose en France et met en place les personnages qui lui permettront de dérouler sa démonstration. D'un côté, la famille Farel, très médiatique, évoluant dans un milieu intellectuel très en vue. Jean Farel est un journaliste présentateur TV vedette de sa chaîne, qui fait ou défait une image d'homme politique grâce à ses interviews pleines de punch. Sa femme Claire est une essayiste à succès, plus jeune que lui. Ils ont un fils brillant, Alexandre qui poursuit ses études aux Etats-Unis. le couple ressemble désormais plus à une association efficace qu'à deux amoureux transis et Claire s'éprend d'Adam Wizman professeur dans une école juive où elle participait à une rencontre littéraire. Je vous passe les détails des séparations des deux couples (en même temps, c'est très rapide dans le livre) pour en arriver au noeud de l'histoire. Alexandre Farel, en vacances à Paris est accusé de viol par Mila, la fille aînée d'Adam. Éclatement du nouveau couple, opposition entre les membres de classes sociales très différentes (il se trouve que la mère de Mila vit selon les valeurs juives traditionalistes) et parole contre parole.

C'est compliqué, la littérature. La bonne alchimie qui permet de transformer quelques ingrédients factuels en un roman de bonne facture. le parfait assaisonnement qui permet de transcender des faits et un contexte pour composer quelque chose qui a du souffle et surtout une petite musique qui différencie le roman du simple récit. Ce que Karine Tuil avait déjà brillamment réussi à faire. La première partie est atroce. On a l'impression d'un empilement de faits pour brosser au plus vite le portrait des protagonistes. Résultat : on reste complètement en surface, on reconnait très vite les modèles qui ont pu inspirer l'auteure (des images, rien que des images), on a l'impression d'avoir des biographies résumées vite fait. Ça s'arrange un peu dans la deuxième avec une tentative pour explorer un peu plus les sentiments des uns et des autres mais, ils ont été traités de façon si superficielle en amont que la pente est difficile à remonter. Seule la dernière partie sauve le roman. Celle du procès qui donne à voir de façon très détaillée et intelligente ce qui se joue au niveau de cette "zone grise", ce qui se juge dans un tribunal et qui n'a rien à voir avec la morale portée par la voix des réseaux sociaux. Mais en attendant, on a bien failli ne pas arriver jusque là.

Je ne peux pas m'empêcher de comparer le travail de Karine Tuil à celui de Vincent Message. Lui aussi, pour Cora dans la spirale s'est inspiré de faits et de témoignages afin de livrer un contexte et des situations plus vrais que nature. Mais, il travaille tellement sa matière que justement, ça devient la sienne. Certes, les thèmes sont totalement différents mais la démarche est assez identique et la comparaison est meurtrière pour Karine Tuil. On a d'un côté un roman fouillé, avec des personnages dont l'épaisseur fait qu'ils vous accompagnent longtemps après que vous ayez refermé le livre et auxquels vous pouvez vous identifier même s'ils n'ont pas grand -chose à voir avec vous. Des personnages qui font corps avec leur environnement et écho à vos sentiments. de l'autre, une sorte de résumé des épisodes précédents, uniquement destiné à en arriver au procès (mais pourquoi, dans ce cas, y consacrer près de 200 pages ?).

Bref, j'ai lu Les choses humaines et j'ai été très très déçue.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Sur un sujet qui sort du bois où il rampait en quête de lumière, le consentement, l'auteur nous emmène sur le rail infernal police-tribunal-prison, avec un vocabulaire de circonstance, très clinique.

Admirons d'abord le tour de force : elle louvoie suffisamment pour empêcher le lecteur de prendre parti pour l'un des protagonistes, on les comprend tour à tour, sans parvenir à se faire une idée définitive. Malgré tout, le personnage et l'entourage de la jeune fille, Mila, sont quand même bien moins développés que celui de son violeur présumé, Alexandre. Probablement parce que l'auteur a voulu nous rendre le personnage du garçon d'emblée plus proche pour éviter qu'on ne prenne naturellement le parti de la victime.

On comprend finalement que 2 perceptions se sont télescopées : celle d'un jeune homme programmé depuis la naissance pour passer au-dessus des autres plutôt que d'être avec eux (« Son monde, c'est celui d'une petite caste qui croit que tout lui est dû, que tout est permis parce que c'est possible »), coutumier des plans cul anodins, d'une part ; et de l'autre, celle d'une jeune fille, qui par contre n'envisageait même pas ce genre de plan, et que l'assurance brutale d'Alexandre, l'alcool et la drogue consommés pendant la soirée ont tétanisée. Pour elle, ce sera peut-être prison intérieure à vie.

Le corps du livre s'illustre dans cette citation de l'avocate Gisèle Halimi, prononcée 40 ans plus tôt, dans un procès similaire : « le viol, comme le racisme, comme le sexisme dont il relève d'ailleurs, est le signe grave d'une pathologie socio-culturelle. La société malade du viol ne peut guérir que si, en ayant fait le diagnostic, elle accepte de remettre radicalement en question les grands rouages de sa machine culturelle et son contenu ».

Au-dessus de cette soirée glauque, rôdent donc les corbeaux du pouvoir, de la domination sociale et de genre, légitimement mis sous les feux de la rampe à l'occasion de procès plus récents. Des rapports d'abus de pouvoir auxquels nul ne peut échapper dans une vie, entre la cour de récréation, les petites hiérarchies artificielles du travail, les conjoints fêlés, les classes sociales qui se construisent en partie sur l'exclusion des autres, presque impossible de ne pas y être confronté à un moment ou un autre. Violences physiques ou symboliques qui détruisent avec une égale efficacité.

Certaines de ces relations sont perfectibles, comme les relations homme-femme, un défi qui se reconfigure sans cesse sous nos yeux, quelle chance. Comment inventer le nouveau tango homme-femme du 21e siècle, harmonisation de l'énergie commune, enfin à portée de main. C'est beau. L'amour se gorgeant de réciprocité et non de relation à sens unique ou de sujétion.

J'ai trouvé les plaidoiries assez percutantes et subtiles, on aimerait tous avoir Maître Célérier pour nous trouver des excuses, même quand on n'en a pas, il a du métier.
Ceci dit, le ton du texte, saturé de froideurs judiciaires, ressassant en boucle le déroulé d'un acte sexuel unilatéral, tout cela est terriblement pesant, même si c'est pour mieux nous faire appréhender les enjeux socio-culturels de cette histoire. Je pense qu'avec l'édito de Ouest-France ou une page de philosophie magazine sur la pause déjeuner, on arrive au même résultat que ce texte, qui n'a pas le souffle d'un grand roman, à mon goût.

C'est la limite ce livre, je trouve, qui nous laisse repartir nus et grelottants, par opposition à un poème ou une chanson mélancolique qui ratissent de l'intérieur nos émotions douloureuses mais nous donnent simultanément les moyens de les métamorphoser en énergie psychique.
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Quelque peu déçue, en général j'apprécie le Goncourt des lycéens, j'avais aussi entendu une chronique sur ce roman, je m'attendais à autre chose. Je n'ai pas accroché aux personnages, je pensais avoir plus sur le côté juridique, connaître le fin fond des choses des deux côtés : victime et accusé , mais je n'ai pas eu la sensation à laquelle je m'attendais. Ça sonne le creux pour moi, trop de vide, de non dits aucun des personnages ne m'a conquise dans leur rôle respectif.
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Un épilogue pour le moins pessimiste( voir ma citation) auquel je n'adhère pas .
Un roman sociétal, où l'histoire est " courue d'avance" et dans " l'air du temps": la parité hommes/femmes,les femmes battues,les femmes violées,bon ,je ne suis pas surprise qu'il ait reçu le prix Concourt des lycéens, c'etait le but du jeu et Karine Tuil a rempli son contrat.
Pour moi,c'est irréprochable au niveau construction,écriture, je rejoins totalement Milie_Baker sur ces deux points forts,mais l'histoire est trop convenue .
Deux intouchables par leur notoriété publique vont voir leur monde s'écrouler lorsque leur fils Antoine est accusé de viol.
Un monde où le pouvoir est roi,où se remettre en question relève de l'utopie ,chose impensabledans ce milieu journalistique et audiovisuel et un jour la vitrine vole en éclats ,tout s'écroule.
Si j'ai bien aimé la forme, le style direct,nerveux de l'auteure,en revanche ,j'ai moins apprécié l'histoire qui somme toute est banale.j'ai zappé sur les minutes du procès trop de longueurs ,tout comme la 1ère partie où tous les personnages sont décortiqués savamment, bien analysés, mais la mayonnaise en ce qui me concerne n'a pas pris.
En conclusion ,un roman intéressant mais un manque d'originalité et un pessimisme latent,d'où mes trois étoiles.
J'ai de loin préféré le monde de J.P.Dubois où lemot luminosité côtoie la bienveillance et espoir dans l'espece humaine a chacun son ressenti.⭐⭐⭐
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