Un album sombre, dont le ton est donné dès la première page : des pillards torturent et massacrent les occupants d'une ferme pour faire main basse sur ses réserves cachées, une exaction qui suivra l'ignoble chef de bande Vor jusqu'à la fin de l'album, lui collant à la peau comme une malédiction.
Une fois encore, les Dieux sont avec Thorgal et sa famille, et c'est rien de le dire, car ils n'ont pas à faire à des enfants de choeur avec ces imposteurs sans foi ni loi tuant femmes et enfants.
Aaricia tombe dans un précipice en pleine nuit enceinte jusqu'au cou ? Même pas mal.
Le chien Muff se prend un coup d'épée ? Il est juste blessé.
Thorgal balance son fils inconscient et enveloppé dans une couverture, par dessus un ravin d'au moins trois mètres de large (alors que le gamin n'est plus un lapin de trois semaines, hein... Il a genre 7 ou 8 ans !) ? No problemo, il le retrouve sans souci de l'autre côté.
Le salopard lui tire dessus presque à bout portant avec un arc ? Il le touche juste au bras.
Vor retrouve Thorgal blessé avec Jolan inconscient, les ayant enfin à sa merci ? Thorgal crâne encore, et le Quasimodo du début (un peu caricatural d'ailleurs) leur sauve la mise in extremis.
Combien Thorgal et sa famille ont-ils de vies ? Bien plus que les chats, a priori.
Et pourtant, on se laisse prendre. Parce que l'histoire est toujours incroyablement fluide, les dessins splendides, où
Rosinski se montre aussi à l'aise dans les paysages naturels que dans les combats à mort.
Et puis, il y a bien sûr le point culminant du livre, Aaricia accouchant comme une bête à côté d'une bête en train de mettre bas elle aussi. Tout un symbole, le retour à la Nature d'un homme qui, malgré lui, n'a jamais cessé d'en faire partie, et une ode au monde animal qui après tout, lui aussi, n'aspire qu'à vivre en paix.