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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je ne suis pas friand de récits de science-fiction, mais comme celui-ci se trouvait dans le top de l'année de lecteurs qui affectionnent également d'autres genres, je me suis laissé tenter par ce roman qui alterne deux lieux/temporalités, « Ici » et « Là-bas ».

« Ici », un beau matin, le monde de la petite Sarah et de sa maman se retrouve totalement chamboulé. C'est d'ailleurs la planète entière qui semble être affecté par ce phénomène étrange qui a subitement rétréci la vision périphérique de tout le monde, tout en causant des pertes d'équilibre inexplicables. Apparemment, une nouvelle dimension vient de faire son apparition sur Terre, bousculant du coup les quatre autres. Une fois habituée à l'émergence de cette cinquième dimension, celle de l'imagination, la petite Sarah montre des capacités incroyables à matérialiser n'importe quelle créature issue de son imagination… un pouvoir qui fait certes peur, mais qui attise également les convoitises.

« Là-bas », dans le futur, Sara travaille comme technicienne de la Cimqa et utilise son imagination afin de matérialiser les décors et les créatures de grandes productions cinématographiques. Malgré sa créativité débordante et son amour du métier, la quinquagénaire a beaucoup de mal à laisser libre cours à son talent au coeur de cette industrie du divertissement qui veut surtout générer du profit en essayant de plaire au plus grand nombre, au détriment de l'émerveillement et de la créativité.

En alternant constamment ces deux récits au fil des chapitres, « Cimqa » propose une réflexion intéressante sur la place de l'art dans notre société de consommation. Auriane Velten montre d'une part les possibilités incroyables du talent de la petite Sara, qui ne pose aucune limite à son inventivité, et de l'autre cette femme proche du burn-out, exploitée par une industrie du divertissement totalement aseptisée par une surproduction visant uniquement à générer du chiffre. Que reste-t-il de l'art quand tout le monde finit par produire les mêmes films, quand la standardisation finit par détruire la créativité ?

Outre le contraste entre cette petite fille pétillante et lumineuse et cette adulte sombre et lessivée, qui invite à réfléchir sur la place de l'art et sur les dérives de notre société capitaliste, le lecteur s'interroge également sur le lien qui pourrait unir ces deux personnages aux prénoms homonymes. du coup, malgré quelques longueurs et une Sara adulte finalement assez déprimante, le lecteur est inévitablement entraîné vers la conclusion de ce récit d'anticipation original et intelligent.
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J'ai souvent du mal avec les romans qui célèbrent « le pouvoir/l'importance de l'imagination » : j'ai tendance à les trouver, paradoxalement, assez convenus et dépourvus d'imagination. C'est donc avec une légère réserve que j'ai abordé Cimqa – réserve compensée par un pitch prometteur, un a priori favorable pour l'autrice (jamais lue, mais déjà entendue en entrevue), et l'excellente critique de @Lenocherdeslivres. Il n'en fallait pas plus pour que je craque quand l'ouvrage est passé entre mes mains.

On alterne à chaque chapitre entre deux mondes et/ou deux époques différentes, Ici et Là-bas : dans l'un, l'une des trois dimensions spatiales se replie légèrement et laisse la place à une nouvelle dimension, celle de l'imagination. Sarah, six ans, découvre qu'elle peut matérialiser des créatures fantastiques durant quelques secondes. Émerveillée, elle explore les possibilités de ce nouveau pouvoir… Dans l'autre, la cinquième dimension est très règlementée et très codifiée, avec une mainmise presque totale de l'industrie du divertissement. Sara, cinquante ans, est une créatrice de « cimqa » et enchaîne les contrats, avec une liberté créative très réduite. Malgré le soutien de sa compagne Eva, l'anxiété et le burn-out la gagnent…

Évidemment, l'on se demande quel est le lien entre Sarah et Sara, mis à part leurs prénoms et leur aptitude à utiliser la cinquième dimension… Est-ce la même personne à deux moments de sa vie? Des doubles parallèles dont les univers sont reliés par la cinquième dimension? Même si vous devinez ce qu'il en est vraiment avant la fin (ce qui a été mon cas), ça n'en reste pas moins élégant. Certains éléments restent toutefois nébuleux, à moins que j'aie raté quelque chose

Difficile de rater la critique de l'industrie cinématographique, ainsi que de l'exaspérant penchant du capitalisme à s'approprier les plus belles innovations pour en faire de la bouillie pour chats, des machines à broyer les individus ou des armes de destruction massive. À l'ère des franchises, l'industrialisation de la cimqa rappelle fortement le modèle hollywoodien et notamment Marvel (qui est d'ailleurs quasi-explicitement cité). Mais on pourrait sans doute étendre cette critique à d'autres industries du divertissement populaire, toutes celles considérées comme des usines à saucisses montées pour les actionnaires plutôt que comme de l'art…

Les protagonistes sont touchantes, j'ai beaucoup aimé suivre l'évolution de Sarah et Sara ainsi que de leurs compagnes respectives. À la lecture, les dialogues entre Sara et Eva m'ont d'abord paru poussifs, mais quelques semaines plus tard, leur relation tout en écoute, empathie et compromis divers me reste bien en tête, donc j'en conclus que l'autrice a réussi à toucher quelque chose. La relation entre la jeune Sarah et sa mère aussi m'a parue très réussie, à mille lieues des clichés habituels.

L'ensemble est plutôt bien écrit malgré quelques tics d'écriture qui m'ont fait sourciller (« la technicienne », « la charpentière »…). Je suis aussi perplexe de constater que l'autrice a situé l'action en Angleterre : savoir que les personnages parlent en anglais version originale, ça fiche un peu par terre le jeu de mots du titre et toute la conversation qui y mène.

Mais somme toute, j'ai passé un très chouette moment avec Cimqa. Au point que j'en viens à me dire que même les thèmes les plus éculés peuvent encore être traités d'une manière originale, intéressante et émouvante.
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« … les histoires peuvent devenir vraies. Il suffit de les imaginer assez fort. C'est pas compliqué. »

Après avoir lu et aimé l'univers d'« after® », lauréat du prix Utopiales en 2021, c'est avec beaucoup de curiosité que j'ai accepté de lire le nouveau roman d'Auriane Velten. Je ne peux que remercier très chaleureusement les éditions Mnémos pour leur envoi et leur confiance.

La grande force de cette autrice, c'est ce lacis entre un univers imaginaire déroutant mais parfaitement maîtrisé et une écriture plutôt intimiste, loin des romans classiques de science-fiction.
Ici, l'autrice propose à ses lecteurs un superbe voyage, mais pas de ceux qui, vertigineux, nous font quitter la Terre pour partir à la recherche d'une nouvelle terre d'accueil. C'est une autre forme de voyage qu'elle nous offre, un cheminement dans les replis de nos rêves, dans les pliures du temps, dans les limites toujours repoussées de notre imagination et les possibilités insoupçonnées de notre créativité, de notre sensibilité.

C'est donc un récit plutôt doux, à la limite du contemplatif, avec cette question qui affleure à sa surface des mots : et si l'imagination, les rêves avaient le pouvoir de changer le cours du temps ?

*
Dès les premières pages, le décor est planté.
Le roman met en scène un monde futuriste aux contours très réalistes : il pourrait ressemblait au notre si des objets et des créatures imaginaires n'apparaissaient pendant quelques secondes, sortis de nulle part, ou si, mais je vous laisse le découvrir.

L'histoire commence étrangement : une adolescente, Sarah, et sa mère se réveillent, atteintes toutes les deux, de perte d'équilibre et d'un rétrécissement de la vision périphérique créant la sensation d'un effet tunnel. Il s'avère qu'elles ne sont pas les seules à présenter les mêmes troubles, tous les humains semblent avoir été impactées par ce phénomène au même moment.
Après plusieurs jours, l'effet s'estompe puis disparaît et la vie quotidienne reprend normalement. Néanmoins, des individus sont frappés par de curieuses hallucinations collectives au cours desquelles la fiction devient réalité.

En effet, à la suite de cet évènement appelé le Repli, le monde semble en apparence intact mais il a subi en vérité de profondes mutations : les frontières de l'imagination et de la réalité se sont brisées. Pour des raisons inconnues, certaines personnes comme Sarah, ont développé des aptitudes qui leur permettent de comprendre ce Repli, l'exploiter pour faire apparaître des créatures et des objets de la vie courante, réels ou nés de l'imagination.
On est ici très clairement dans un récit de science-fiction, mais Auriane Velten y incruste des pointes de fantastique, deux univers qui m'ont toujours séduite. Ainsi, la jeune fille a trouvé la clé qui ouvre les portes du « Pays imaginaire », faisant apparaître au gré de ses envies, la petite fée Clochette, la panthère Bagheera, les dragons ou les lutins qui peuplent son imaginaire d'enfant.

« Elle ouvre grand le monde des créatures. Pour les laisser entrer, nombreuses et longtemps. Après, il n'y a qu'à relâcher, cesser d'y penser et tout revient en place. Automatiquement, comme le portail de l'école qui se referme quand plus rien ne le retient.
Sarah rouvre les yeux avec un demi-sourire. Elle sait qu'elle a imaginé de la bonne manière. Elle a su, dans une certitude absolue et éphémère, que la vérité vraie était ainsi. »

En parallèle, nous suivons une cinquantenaire vivant à Londres.
Sara travaille comme technicienne Cimqa dans une grande entreprise du divertissement et réalise des grandes productions cinématographiques, des spectacles et des publicités. Elle utilise son imagination et ses capacités de concentration pour réaliser des décors et des créatures qu'elle rend « vivant » un court moment.
C'est une femme passionnée qui s'investit corps et âme dans ce travail, elle y sacrifie sa vie intime et sa santé mentale. Elle est fragile, anxieuse, particulièrement stressée, mais également opiniâtre, volontaire, voulant faire de ses rêves et de ses désirs une réalité.

« Elle s'efforce de croire que les rêves sont inoffensifs. »

J'ai aimé ce personnage, sa vulnérabilité, sa force, la poésie de son imaginaire, la fantaisie de ses créations.

*
Le texte, construit sur l'alternance de ces deux voix, est particulièrement réussi, entretenant le suspense et le mystère autour des personnages.

Piquée par l'énigme autour de l'identité de ces deux personnages au prénom quasi-identique, j'ai été également happée par cette ambiance singulière où tout n'est pas dit, où l'autrice prend garde à nous laisser dans le flou jusqu'aux toutes dernières pages. J'ai bien senti que quelque chose me dépassait, que j'étais proche de trouver une explication simple et logique pour clarifier les liens étroits entre les deux personnages féminins dont les pouvoirs étaient identiques, pour mettre du sens à cette sensation bizarre d'être dans deux mondes ou deux époques différents.

J'ai également aimé me heurter à cette réalité perméable à l'imaginaire, l'explorer et redessiner ses nouveaux contours. Les deux points de vue, celui émerveillé et candide de l'adolescente qui donne vie à ses rêves, celui de l'adulte étouffé et entravé dans sa liberté artistique, se complètent à merveille.

Et puis, cet univers qui paraît doux et merveilleux au départ se teinte de nuances de plus en plus sombres au fil du texte pour laisser au final des effluves doux-amers.

*
« Cimqa » est un roman de science-fiction qui a des résonances avec ce que vit notre monde aujourd'hui. Dans ce monde bouleversé par l'ouverture d'un portail qui laisse les rêves, la magie et l'imaginaire se matérialiser, Auriane Velten explore l'art, la démarche artistique et idéologique, la liberté de création et d'expression, le pouvoir de l'imagination, le bien-être et l'épanouissement dans son travail.
L'autrice aborde aussi, de manière très délicate et subtile, des thématiques plus intimes, notamment les traumatismes de l'enfance, l'adolescence et la fin de l'innocence, les questions liées au genre et à la sexualité.

Par une satire sociale et politique pleine de clairvoyance et de justesse, elle nous parle des maux qui affligent le monde d'aujourd'hui : ceux de nos sociétés capitalistes contemporaines qui, tournée vers le profit, en oublie l'humain ; ceux de l'art détourné de sa vocation première pour devenir un outil de pouvoir, d'oppression, d'asservissement.

*
Pour conclure, j'ai pris plaisir à lire ce roman au charme singulier, les personnages sont attachants et touchants de sincérité, l'univers imaginé par Auriane Velten est incroyablement bien pensé avec des notes poétiques piquetées d'ombres.

A découvrir pour ceux qui aiment les romans de l'imaginaire et veulent découvrir une nouvelle voix particulièrement originale.
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Il était une fois… une ouverture dans le monde, un gauchissement d'une porte qu'on ignorait et qui permet d'accéder à une autre dimension. Comme si, d'un coup, sans raison apparente, la largeur avait été raccourcie. Ainsi, certaines personnes se trouveraient capable de faire apparaître, dans notre monde de tous les jours, des êtres issus de leur imagination, même la plus folle, la plus débridée. Quelles possibilités ? Quelles conséquences ?

Dans les premières pages du roman, le monde tel que nous le connaissons subit un bouleversement terrible. Les gens ne peuvent même plus marcher, car ils sont déséquilibrés. On comprend rapidement qu'une dimension a été modifiée. La largeur n'a plus la même taille. du coup, toutes les perceptions sont modifiées. Mais après quelques jours, les femmes et les hommes s'habituent et tout revient à la normale. Enfin, pas tout à fait. Car Sarah, et d'autres, parviennent à donner vie, pendant onze secondes au maximum, à des créatures totalement imaginaires : dragons, fées, tous ces êtres qui peuplent les esprits des enfants (et des adultes) prennent vie, brièvement, devant les yeux médusés de leur entourage. Ce beau conte de fée peut-il rester dans le domaine du merveilleux ? Quand les adultes et les sociétés vont s'en emparer, que restera-t-il ?

En effet, Cimqa est un roman sur l'enfance, ses rêves, ses espérances et ce que le monde adulte, les sociétés corsetées en font. Une histoire qui veut tenter de croire, encore, à l'émerveillement de la jeunesse face aux compromissions, aux haines, aux bassesses des grands. le récit suit les pas de Sarah et d'Ada, deux jeunes filles capables de créer des personnages saisissants. Deux jeunes filles qui ont totalement intégré les possibilités de cette nouvelle dimension, la Cinquième, qu'elles préfèrent appeler entre elles le « Pays ». Là encore, on sent bien qu'on est dans l'univers des contes, au pays merveilleux où tout est possible, où seule l'imagination imprime ses limites. C'est à dire aucune, car, surtout à cette âge, elle est débridée, fantasque, infinie.

Mais, comme je l'écrivais plus haut, Cimqa est le récit d'une lutte entre deux visions du monde. On le découvre tout au long de l'histoire de Sarah et d'Ada. Mais aussi en lisant l'axe parallèle. Car un chapitre sur deux nous projette dans un monde : de « Là-bas (Ici) », on passe à « Ici (Là-bas) ». Ce dernier semble être l'avenir, mais on n'en est pas sûr, du moins au début. D'ailleurs le lien entre les deux histoires ne se montrera de façon certaine que sur la fin du roman (même si, bien évidemment, de nombreux indices – voire des faux – parsèment les pages et font sens au fur et à mesure). Sara (sans « h ») et Eva forment un couple solide malgré les différences énormes de passions entre elles : la première vit du et pour le cimqa, le spectacle vivant modelé grâce à l'imagination des artistes. C'est devenu une industrie de masse, avec gros budgets et obligation de réussite. La seconde est ouvrière, solide, syndicaliste engagée dans la lutte contre les inégalités. La première ne s'intéresse que peu aux réalités sociétales, vivant dans son monde imaginaire. La seconde a comme une phobie du cimqa : elle peut paniquer devant certaines apparitions et s'en tient donc éloigné. Par des concessions et beaucoup d'empathie et d'amour, elles vivent bien.

Cependant, tout n'est pas rose. Ici, la découverte de Sarah est devenue monnaie courante. Mais elle est contrôlée par les autorités. On ne peut, sauf à de rares occasions, petits moments de liberté, exposer en public ses créations. Si on veut vraiment créer pour les autres, il faut travailler pour une société de cimqa et participer à de grands spectacles. le cinéma en vraies 3D. Magique, non ? Sauf que des limites sont imposées aux créateurs. Ils ne peuvent imaginer exactement ce qu'ils veulent. Les goûts présumés des spectateurs, formatés à base de sondage, prévalent sur l'originalité. Et tout cela devient une soupe homogène, sans accroc. Tout le côté rugueux, poil à gratter de certaines idées doit disparaître. Tout ce qui ne correspond pas çà la norme doit s'effacer. Des critiques que l'on peut appliquer à la production publique audiovisuelle actuelle qui n'ose pas souvent et flatte dans le sens du poil un public présumé amorphe et hésitant devant le moindre changement. Et tout cela mine Sara, qui ne supporte plus ce carcan.

Comment Auriane Velten parvient-elle à lier ces deux trames ? Pour le savoir, une seule solution, se plonger dans ce roman prenant, qui sait nous ramener en enfance sans nous prendre pour des gosses. Qui sait jouer avec nos rêves tout en nous faisant réfléchir au monde dans lequel nous vivons. Une belle histoire aux doux accents de rêves enfantins qui tentent de jouer leur mélodie dans la partition plus normée des adultes.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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Merveilleux. Voilà un qualificatif qui sied parfaitement au deuxième roman d'Auriane Velten, dans tous les sens du terme. Cimqa, derrière ce nom étrange se cache un bijou de la littérature dite de genre, qui mérite que tous les yeux s'y posent.

Savez-vous ce qu'est la cinquième ? Non pas l'ancienne chaîne de télévision française, mais une nouvelle dimension qui apparaît subitement un jour. le monde en est chamboulé, et se doit de rechercher son nouvel équilibre avec cette faille qui bouscule les quatre premières, longueur, largeur, hauteur et temps.

Deux points de vue dans ce roman, celui d'une jeune fille qui trouve rapidement sa place dans ce nouvel espace et celui d'une femme dans la cinquantaine qui peine à trouver la sienne. Deux époques ? Deux branes ? le mystère sera levé petit à petit.

Le récit va développer une histoire d'espace et de temps, en jouant avec poésie sur leurs déformations. Pour mettre en avant cette dimension qui vient prendre sa place en poussant les autres du coude : l'imagination.

L'idée est particulièrement originale, sa manière de la mettre en scène habillement pensée et son développement magnifiquement abouti. Pour parler d'imagination, pour la mettre ainsi au centre de tout, il fallait être capable d'en faire preuve.

L'autrice éblouit le lecteur, illumine de son talent chaque chapitre pour un des romans les plus singuliers et les plus maîtrisés que j'ai pu lire ces derniers temps.

Nous sommes aux alentours de l'an 2050 quand le merveilleux s'incruste subitement dans le quotidien. A une place laissée en partie libre par la largeur. Dit comme ça, on pourrait penser à un concept fumeux, mais l'idée est au contraire aussi étonnante que bien réfléchie.

Je ne peux concevoir plus belle ode à l'imagination, à son pouvoir, à ses bienfaits, que ce roman. Une lecture fascinante qui crée elle-même des images mentales fortes, aussi parlantes que des dialogues.

Un roman tout en finesse, pas le genre à mettre l'action en avant, mais au contraire à développer le récit en émotions. Et pourtant, les surprises s'accumulent, croyez-moi, s'en est fascinant.

La puissance de ce texte est encore décuplée grâce à de nombreuses thématiques qui le traversent, toujours amenées avec subtilité et sensibilité.

On y parle de la place de l'art et de la création, de responsabilité collective, d'un vivre ensemble autrement. Mais aussi de la difficulté de communiquer, d'avidité du système, de déréliction, de traumatisme aussi. Et même, en creux, de la place que prennent les sensibility readers dans ce futur pas si lointain. Espoirs et craintes entremêlés.

Des thématiques à la fois intemporelles et très actuelles, toujours amenées pour nourrir l'histoire, avec une délicatesse vraiment touchante. Des sujets développés de manière très imagée, dans un équilibre parfait.

Merveilleux, fantastique, les qualificatifs s'accumulent, s'envolent, tous les sens en éveil.

Cimqa d'Auriane Velten est, pour moi, l'un des romans les plus enthousiasmants de ces derniers mois, une merveille offerte à tous ceux qui savent à quel point l'imagination est aussi vitale que l'air que l'on respire.
Lien : https://gruznamur.com/2023/1..
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Nous sommes transportés dans une autre dimension, une dimension faite non seulement de paysages et de sons, mais aussi d'esprits. Un voyage dans une contrée sans fin dont les frontières sont notre imagination : la cinquième dimension !

Dès les premières lignes, la catastrophe est là, la grande majorité de population est victime de vertiges, de perte de la notion de distance et de vision altérée. Plutôt que de nous faire des vignettes sur les conséquences mondiales de ces troubles, l'autrice se concentre sur une mère, tentant désespérément de rejoindre la chambre de sa fille. Me voila ferré ! L'histoire se dédouble alors en deux points de vue, l'une Là-bas (ici) et l'autre Ici (Là-bas), avec deux protagonistes Sara et Sarah...

Un roman atypique, loin des codes du genre et qui fait écho à l'histoire où Sarah doit produire des films selon les attentes du public et non pas selon son imaginaire, son art depuis que l'Événement a bousculé l'humanité. Blockbuster contre film indépendant. L'art est-il mort dès que l'argent entre en jeu ? Alors que bien souvent le traitement du sujet de l'art sans la SF m'emmerde profondément, j'ai pris plaisir à parcourir ses pages qui se concentrent sur ces personnages plutôt que de démontrer au forceps son sujet. Et comme j'adore les récits où L Histoire nous est contée par les histoires individuelles, j'ai été comblé.

Même si j'aurai préféré en connaître plus sur ce monde, même si j'aurai préféré un peu plus d'explications scientifiques, il faut bien reconnaître que chaque lecteur a son rôle à jouer dans un roman, imaginer les blancs laissés par l'auteur...

L'idée du "repli" m'a rappelé la SF de jadis, celle du merveilleux avec un traitement contemporain. Pour tout vous avouer, j'avais attaqué ce roman il y a quelques mois et il m'était tombé des mains. Cependant, l'histoire continue de faire son chemin dans ma tête, alors... Chaque roman doit être lu au bon moment !

Après son premier roman after®, Auriane Velten me confirme son talent, ainsi que sa vision personnelle de la science-fiction. Vivement son prochain texte.
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Cimqa propose une narration alternée entre deux personnages, un chapitre sur deux. La première ligne nous fait suivre Sarah, une jeune fille britannique de sa petite enfance jusqu'à son adolescence : en effet, quand elle était petite, un évènement extraordinaire va chambouler la vie des Terriens, et elle va donc évoluer avec les conséquences de cet évènement, tout en vivant une vie « normale », avec ses affres amicaux et amoureux. J'avoue avoir eu un peu de mal avec cet arc sur sa première partie, puisque la narration en focale interne adopte une écriture enfantine pour coller au personnage. Ca contribue à l'immersion et c'est un procédé logique, mais les goûts et les couleurs, toussa.

La seconde ligne m'a davantage intéressée, peut-être parce que je m'y suis davantage retrouvée d'un point de vue personnel. Elle nous fait suivre Sara, une femme adulte qui travaille dans un domaine qui la passionne… mais en même temps, les conditions de ce travail engendrent un désenchantement et un stress intense, au point de parasiter sa relation avec sa passion, mais aussi avec sa compagne, qui la voit s'éteindre à petit feu sans pouvoir l'aider. Comme je le disais, cette ligne m'a bien parlé, ayant souffert de plusieurs burn-out malgré des domaines qui me plaisaient, et ayant une relation un peu amour-haine avec l'écriture.

Tout le long du roman, on ainsi va s'interroger sur ce qui lie ces deux personnages qui portent quasiment le même prénom, mais aussi ces deux lignes de narration. J'ai compris un peu avant la révélation officielle, mais de peu, je dois bien l'avouer^^ (d'ailleurs, je ne suis pas fan d'un certain aspect de la révélation, j'ai trouvé que cela sortait un peu de nulle part).

Le roman lui-même est assez contemplatif, avec un côté tranche de vie, même si l'évènement est fascinant en soi. Imaginez (haha) que du jour au lendemain, avec assez de volonté et de créativité, vous puissiez faire apparaître des chevaux ailés ou des dragons d'une nouvelle dimension ? Genre, vraiment apparaître. de vrais chevaux qui volent, de vrais dragons avec des écailles et tout. Pour l'adoratrice de créatures imaginaires que je suis, j'avoue que je regrette presque de ne pas pouvoir le faire moi-même T_T (mais c'est aussi pour ça que j'écris et que je fais du crochet, est-ce que ça ne revient pas un peu au même, en fin de compte ?).

Evidemment, en dépit de son aspect enchanteur et même si ça n'apparaît pas aussitôt aux personnages, il y a des dérives. Je regrette d'ailleurs un peu que le roman reste à la surface de certaines d'entre elles, évoquées dans l'arc de Sara, sans que ce ne soit exploré plus que ça. Ce n'était pas la thématique principale de ce roman et elle a un impact important sur les personnages malgré tout, mais j'ai eu l'impression de rester un peu sur ma fin là-dessus.

Il y a quand même une dérive en particulier qui est exploitée, et de façon très pertinente. du côté de Sara, cette faculté est devenue une industrie proche du cinéma, mais qui n'a pas échappé au productivisme : du chiffre, du chiffre, du chiffre, au diable la créativité et la passion, seuls comptent l'audience et les sousous, à coup de statistiques et de prédictions savamment étudiées. Il faut donner aux gens ce que les gens veulent, même si c'est du multi-réchauffé sans saveur (ça vous rappelle rien ?). Et les passionné'es n'ont qu'à rentrer dans le moule s'iels ne veulent pas perdre leur boulot, même si ça doit les faire souffrir d'anxiété chronique voire de dépression.

(Au passage, c'est un peu dommage que les personnages soient anglophones, parce que le titre repose sur un « jeu de mots » qui ne fonctionne qu'en français).

Les thématiques proposées par ce roman sont ainsi très intéressantes, et surtout très actuelles : découverte de son identité, vie professionnelle parfois destructrice, émerveillement de la jeunesse VS désenchantement adulte, rapport entre vie pro et vie perso, la passion qui finit par nous bouffer, imagination et créativité VS les impératifs de la vie, progrès et dérives des nouvelles technologies etc. Oui, il y a de quoi faire.

Bilan

Beaucoup apprécié ce roman malgré quelques bémols qui se révèlent anecdotiques. J'ai beaucoup aimé le contraste entre les deux personnages principaux, leur évolution, ainsi que toutes les thématiques explorées qui sont ô combien actuelles, d'autant que le roman a aussi résonné d'un point de vue personnel.
Lien : https://limaginaerumdesympho..
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Si la dimension des songes existe, la cinquième doit lui offrir la porte qui y mène. Alors tirez avec la main gauche, poussez avec la main droite, et dépliez celle-ci avant de l'ouvrir et de contempler la magie de l'imagination prendre une forme tangible entre les mains d'Auriane Velten.

 
S'éloignant des sentiers battus de la science-fiction, ses mots nous guident à travers la cinquième dimension où les rêves prennent vie, les créatures imaginées reposent et les cauchemars veillent quand ils ne hantent pas le sommeil des dormeurs.

 
Dans un récit à la saveur de futur proche, l'histoire débute par un Evènement, une heure à laquelle toute la planète a perdu l'équilibre, et oscille entre deux alter-egos harmonieux, Sarah et Sara, souhaitant changer la réalité à leur manière et apportant chacune leur complexité au récit ainsi que les questions que cela soulève : l'étendue illimitée de la créativité, l'exploitation commerciale de ces rêves inoffensifs et la transformation de tout un art en machine de guerre.

Quand imaginer dans l'espace public est interdit et que l'espace est trop petit, à peine la place de faire un seul voeu, alors ne reste plus qu'à l'agrandir.

Appuyer en bas, à gauche. Pivoter la largeur vers l'arrière, loin. Briser les lois de la physique comme on le ferait d'une allumette. Voir les secondes défiler jusqu'à onze et plus loin encore avant d'entrer dans le Pays : un espace avec sa nature, ses limites, ses potentialités. Et tous ses dangers...

Quand ce palais mental de l'imaginaire aurait pu être beau mais ne leur appartenait plus.

Quand ce besoin vital et merveilleux d'imaginer se transformait en arme.

Avec ses subtils rebondissements, "Cimqa" nous garde captivé jusqu'au bout et célèbre les merveilles de l'imagination tout en offrant une critique sociale de notre temps, mêlant la douceur de l'enfance aux dures réalités du monde adulte. L'autrice nous invite ainsi, nous lecteurs, à explorer notre cinquième dimension, à se perdre dans les méandres de notre imagination et à réfléchir sur les complexités de notre propre réalité.
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Cimqa est une formidable ode à la création et à la beauté de l'imagination. Avec son univers très original et son propos engagé, c'est un roman qui dénonce les manques de liberté dans les domaines artistiques. J'ai malheureusement eu quelques peines à m'accrocher aux personnages et l'intrigue, comme l'écriture, souffre un peu de la comparaison avec le premier roman d'Auriane Velten pour moi. Cela reste une lecture agréable mais pour laquelle j'avais trop d'attentes.

Critique complète sur Yuyine.be!
Lien : https://yuyine.be/review/boo..
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Avant toute chose, je tiens à remercier les éditions Mnémos pour m'avoir envoyé ce roman.

J'ai découvert Auriane Velten grâce à mes camarades de la Garde de Nuit, avec son premier roman after®, que j'ai tout simplement adoré. C'est donc les yeux fermés que je me suis plongé dans son nouveau roman.

La première chose que j'ai pu constater, avec plaisir, c'est la capacité de l'autrice à se renouveler, à créer un nouvel univers, à raconter autre chose.

Ici, l'on va suivre en parallèle Sarah et Sara, une enfant et une femme cinquantenaire, chacune ayant ses chapitres dédiés, et leur lien avec avec un pouvoir permettant de matérialiser les choses qu'elles imaginent. Je pourrai développer un peu plus le résumé mais je préfère en dire le moins possible.

Les sujets de ce roman sont très intéressants, on y trouve ainsi des réflexions sur l'art, sur l'imagination, la marchandisation de l'art aussi, certaines dérives ... Certains thèmes plus intimes sont également abordés, avec des traumatismes liés à l'enfance, mais aussi des questions de genre et sexualité.

Le tout étant très bien écrit, mais celles et ceux qui ont lu after® ne devraient pas être surpris.

Quelques points qui m'ont moins plu, j'ai trouvé certains éléments un peu prévisibles, notamment une révélation à la fin, ainsi qu'une partie de l'intrigue liée à Sarah, j'avais des impressions de déjà-vu. Globalement j'ai eu une impression moins forte que le premier roman de l'autrice.

Tout cela n'empêche pas que je conseille cette lecture, nul doute que cela vous plaira.

J'en ai discuté longuement avec mes comparses de la Garde de Nuit, le replay est en lien si cela vous intéresse.
Lien : https://youtu.be/q5xPOqcK3T0..
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