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EAN : 9782877302555
170 pages
Editions Picquier (30/11/-1)
3.5/5   1 notes
Résumé :
"Les hommes debout sont comme des prostituées. Nos clients font le tri, ils nous jaugent. Ils nous aiment jeunes et forts, musclés mais l'air inoffensif..." Exploitation, humiliation, racisme, misère morale et physique : un jeune philippin raconte onze mois passés au Japon comme travailleur émigré clandestin. Il décrit le "Japon de l'envers", la vie du quartier des paumés de Yokohama, de ces journaliers recrutés par les yakuzas pour décharger les cargos et travaille... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Rey Ventura est, au début de son témoignage, un étudiant philippin venu dans une université japonaise. Donc en toute légalité. La vie y étant chère et son visa estudiantin périmé, il tombe dans le quartier des clandestins philippins de Yokohama.

Commence une année en tant que "homme debout". Cette expression définit les travailleurs sans papier recrutés chaque matin par des filières yakuzas pour travailler sur des chantiers pénibles et dangereux.
Là, Rey côtoie ses compatriotes mais aussi des Coréens et ceux que les Japonais appellent les "burakumin", des parias, des citoyens de seconde zone quoique nippons. La concurrence est rude pour trouver une journée de plus en tant que manoeuvre.

Le témoignage date des années 1980 mais doit hélas toujours recouvrer une réalité avérée. Rey Ventura dépeint les conditions de vie et de travail de toutes ces personnes en position d'illégalité. Précarité, dangers sur les chantiers comme dans les rues, racisme, violence, ... le texte dérange par cet autre angle d'approche du quotidien au Japon. L'immigration y était et y reste un sujet très épineux. Et les noirs camions des associations d'extrême droite le rappellent fréquemment à grands coups de discours tonitruants et ouvertement racistes.
Bien que sa courbe des âges représente une pyramide à l'envers et que le taux de natalité soit l'un des plus bas au monde, l'archipel se refuse à voir des gaijins fouler leur terre. En particulier certains étrangers, ceux en provenance de pays d'Asie économiquement plus en difficulté, les Philippines par exemple.
A noter qu'avec l'actuelle crise des migrants en Europe, les sursauts identitaires y font également florès. Preuve que les décennies passent mais que partout, les mentalités changent trèèèès lentement...

Après un an de cette vie sur le fil du rasoir, Rey Ventura préféra regagner son pays d'origine, laissant de son expérience nippone ce récit dur, cru et dérangeant. Mais nécessaire pour aborder un autre visage du Japon, loin des cerisiers en fleurs et de la cérémonie du thé.
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Reynald B. Ventura est un étudiant philippin en situation régulière au Japon puisqu'il a officiellement un visa étudiant. Mais à cours d'argent il décide de rejoindre à Yokohama, le quartier de Kotobuki où vit une communauté philippine, et là trouver du travail. Son visa n'étant bientôt plus valable, il sait qu'il va plonger dans une dangereuse clandestinité, et devenir « invisible, comme les dizaines de milliers de Philippins qui vivent dans ce système que nous appelons T.N.T. - tago-ng-tago, la planque permanente ».

Ainsi débute le récit de Rey Ventura : une année de clandestinité, d'humiliation, de peur, jusqu'à son retour volontaire aux Philippines, lassé de cette vie de travail sur les quais ou les chantiers, lassé de la routine et de l'incertitude permanente de cette existence.

Le livre a été rédigé à la fin des années 80, (l'auteur en parallèle filmera le vie de ses compatriotes et réalisera un documentaire « Dekasegi »), soit dans une décennie de croissance économique, et une forte utilisation de main d'oeuvre étrangère bon marché. Aujourd'hui, la situation n'a guère changé, surtout compte tenu de la situation démographique spécifique au Japon, le vieillissement de la population, et donc du manque de main d'oeuvre.

Officiellement le Japon reste fermé à l'immigration… officiellement, et le pays y reste d'ailleurs peu habitué.

Accepté dans sa communauté, Rey commence alors sa vie d' « homme debout », soit comme ses collègues, ouvriers sans travail fixe, se tenir debout à une intersection dès cinq heures de matin et attendre les recruteurs. Attendre debout est important pour montrer que vous en voulez, que vous êtes travailleurs.

Le jeune philippin nous décrit la vie de ces hommes et femmes (Juan, Margie, Miguel, Zaldy, Danny, Romero et les autres), vie de paria et d'exploitation, vie précaire (leurs affaires sont toujours prêtes pour fuir au cas où la police opérerait une descente).
Prostitution, humiliation, racisme les attendent. C'est le sort malheureusement universel des immigré-es.

Rey Ventura est extrêmement lucide et c'est bien sûr ce qui fait de ce livre plus qu'un simple document. Lucide sur ces compatriotes qui voient dans le Japon, une deuxième Amérique. Mais ce n'est qu'un leurre, une course à l'argent, qui finalement ne satisfait personne. On peut gagner de l'argent, mais cela se fait sans cesse en jouant au chat et à la souris. Il n'y a pas de rêve japonais écrit-il : « nous n'imaginons pas nous y installer. Nous savons que nous n'y serons pas acceptés ». Mais il y a aussi la vie ordinaire, les dimanches, entre l'église et le McDo, les disputes de couple, les sorties dans les bars ou les live show...

Il est toujours intéressant et nécessaire d'étudier un pays que l'on aime en faisant des pas de côté, vers les gens d'en bas, vers les marges (les burakumin...), vers les gens qui sortent du système (hikikomori, évaporés...), et ce livre instructif vous le permet très agréablement.

Paru en 1992, qu'est devenu Rey Ventura ?
J'ai trouvé – en anglais – cet article du Japan Times de 2012 : https://www.japantimes.co.jp/community/2012/09/22/our-lives/profiles/filipino-filmmaker-writer-captures-the-stories-of-asians-on-the-fringe/
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