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J'aime citer ces deux phrases d'Hélène Cixous (L'Amour de loup et autres remords), à propos des textes qui m'ont profondément marquée : « Les livres sont toujours parcourus de ce frisson de survie. Nous serons morts et ils frissonneront encore. » Les deux exergues de ce roman s'y retrouvent. Elles résonnent par-delà la non-existence.

J'aime énormément l'écriture de Véronique Villard : un style très travaillé, méticuleusement ciselé, épuré à l'extrême (« renoncement au superflu ») qui devient, de ce fait, très poétique (phrases très courtes parfois, souvent dépourvues de verbe ou bien à l'infinitif, superbes répétitions qui créent un rythme aussi lancinant qu'un mantra, nombreuses métaphores originales).

Nora Deville, « yeux verts », « chevelure platine », est « une jolie femme mature au seuil de la cinquantaine », qui, « fidèle au corps féminin, […] n'exhibe pas sa différence, elle la ressent. », car « vivre libre est son leitmotiv ».

Elle quitte Paris à destination de Sète, « cette petite Venise du Languedoc ». Dans ses bagages, « un roman de Marguerite Duras, le ravissement de Lol V. Stein ». Son trajet en TGV nous est conté pendant quelques pages, dans le but de faire revenir Lucie Duval, « cette amie du passé », devenue psychologue, celle qui capte la douleur inconditionnellement, ou point d'y sombrer.

Un manuscrit comme seule et unique mise en abyme salutaire de ce « soupir silencieux ». Des citations comme autant de saluts à des auteurs admirés, comme autant de reconnaissances de dettes richement remboursées, par la remémoration.

Ici et maintenant « dehors la vie s'affirme », tandis que je reste encore suspendue à la beauté de cette histoire, de ces moments (« instants ») fugaces (« le temps où l'affect jaillit ») capturés par la romancière.

« Danser pour convoquer le bonheur ».
Lire, pour la même raison !
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Un récit sensible et solaire sur une contre emprise.
Là où le deuil aurait pu provoquer de la pesanteur, la douleur embrasse le souvenir de l'amour et se glisse sagement vers la vie. Poésie des instants, poésie des rencontres ponctuées par des sourires, eux aussi silencieux.
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Un livre attachant où se vivent les occasions manquées, les relations humaines complexes et inachevées, le silence masquent le souvenir, le silence couvrant la souffrance interne, la force morale au secours de la souffrance physique mais jusqu'à quelle limite, la préservation de l'autre, le sacrifice de soi mais pourquoi, la quête d'absolu ….
Un récit profond où l'écriture poétique et vivante permet de faire passer une réflexion sérieuse sur la vie, le lecteur percevant que l'auteure connaît bien ces moments d'intensité douloureuse et empathique à la fois.
Un bon moment de réflexion saine et de plaisir à savourer en une période de trop grands fracas.
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Une recherche d'être. Une réflexion sur les masques et assignations sociales, un cheminement vers l'affranchissement, le dévoilement des "essentiels" sous les voiles du paraître. En ces temps de chaos , « Nous n'avons pas eu le temps » explore une écriture du suspens, une musique de l'évanescence. Veronique Villard propose une danse méditative, une aventure formelle contemplative. Grâce des haïkus. Sédimentations insolites des narrations. La danse de Nora et ses épiphanies Sétoises résonneront tels les volutes nostalgiques de Chet Baker. Surtout ce roman délicat rend un mot palpable, un mot terriblement doux et aérien, un mot qui ressemble à nos existences fragiles et folles, ce mot valse à chaque page: " Fugacité".
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On suit, pas à pas, les mots sur le chemin de ce roman atypique qui navigue entre prose et poésie. "L'écorce des phrases" (je cite) se fait tendre et nous raconte la force des êtres qui voyagent, immobiles, et transmettent par la pensée ce que diffusent "les plis des vagues". J'ai aimé l'humour de l'héroïne qui se demande si elle ne va pas manger "un croque-monsieur" au wagon-bar, elle qui n'aime que les femmes, sa passion n'ayant d'égale que celle éprouvée pour Marguerite Duras. Dont on devine, au cours de l'histoire, le chuchotement bienveillant et entraînant.
Au début du roman, l'homme du train, apparaît comme une tentation possible, le héros d'un univers parallèle, on se demande si Nora ne va pas répondre à son appel... mais l'extravagance vient d'ailleurs, revient à l'origine d'une amitié particulière... On n'a pas envie de le perdre. Il reviendra. Avec son prénom de rouge-gorge qui symbolise la passion.
La force des mots surgit parfois d'une apparente banalité. On voit le mari de l'amie conduire une voiture "d'un gris métallisé" et c'est toute son identité masculine, mentale, physique, qui nous est donnée. Cela n'a l'air de rien mais l'évocation s'impose, il en est ainsi tout au long du roman. Qui pourrait être le scénario d'une pièce de théâtre, avec ses dialogues hors du temps, qui en disent long, eux aussi, avec, parfois, une sensation de choeur antique. Quand Nora envisage la mémoire comme "le seul édifice intérieur", impossible d'oublier combien cet édifice est vulnérable ! C'est sans doute pour en garder les vestiges, si jamais il s'écroulait, que Nora remonte les souvenirs dans la confusion du présent. Ce livre est un voyage en nostalgie, le récit d'une rencontre réelle et impossible. Nora se croise entre toutes les femmes, mères, filles, amies, celles qu'elle aurait pu être et celle qu'elle a été, sans avoir le temps de toutes les consacrer. Roman à lire en été, en hiver, assis paisiblement, au soleil, au coin du feu de bois ou dans tout autre lieu quand on s'accorde le temps de reconnaître, dans l'introspection de l'autre, qu'il est impossible "d'anticiper le temps", tout en l'actualisant, cependant, par les souvenirs, les désirs et les rêves. Il y a, dans ce roman, comme un tableau de Hopper. On imagine la femme figée qui, soudain s'anime, nous emmène dans ses journées et puis revient se poser, une tasse entre les mains, droite, dans un concentré de lumières, le regard lointain, posé sur l'aile de l'avenir.
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J'ai terminé la lecture de ce livre et n'ai pas eu envie de le refermer, pourtant il le fallait bien!

J'avoue avoir eu un peu de mal à entrer "vraiment" dans le roman, un peu désarçonnée par le style très particulier de l'auteur.
Puis je m'y suis plongée presque sans m'en rendre compte et j'ai vibré au gré des émotions, des paroles, des réflexions.
Nora est nous toutes, assumant à la fois sa cinquantaine et son homosexualité, avec, enfouie à la surface de sa sensibilité, son désir de jeunesse et d'une certaine forme de "normalité". Son regard sur elle-même, sa réceptivité à l'autre, sa recherche d'équilibre en font une amie/miroir lovée dans un coin de mon coeur.
J'aime cette femme qui éprouve, observe, apprécie ou ressent de la déception mais jamais ne juge, laissant à chacun la liberté de ses choix, même si elle les regrette. bref, elle sait rester à sa place.
Lucie, sorte de présence aérienne, conscience ou rappel mnésique, intrigue, questionne, puis s'évade avec ses mystères.

Voilà, un beau roman, écrit avec sensibilité et tendresse, offrant au lecteur une croisière sur les vagues d'une rivière émotionnelle et authentique...

Merci, Véronique, pour cette découverte!
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"Nous n'avons pas eu le temps" est un cri ... Un cri d'autant plus puissant qu'il demeurera silencieux ... Un cri poussé par chacun des protagonistes mais que chacun réfrène pour différentes raisons.
Des retrouvailles fortuites pour un futur fatalement hypothétique ...
Une cessité par rapport à une évidence que l'on a volontairement ou inconsciemment recouverte de multiples voiles pour diverses raisons.
Des êtres qui se côtoient sans vraiment se dire ... jusqu'au jour où leur mutisme deviendra irréversible ...
De l'amour, une infinie délicatesse de sentiments, des monologues intérieurs intensément vécus ...
Le tout exprimé dans un style à la fois très élaboré et très simple.
Un moment délicieux de lecture. Je recommande !
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