- Que faudra-t-il donc apprendre à mon fils ? disait-il.
- À être aimable, répondit l'ami que l'on consultait ; et s'il sait les moyens de plaire, il saura tout.
(JEANNOT ET COLIN).
- Je n'ose plus ni croire ni nier, dit le nain ; je n'ai plus d'opinion. Il faut tâcher d'examiner ces insectes, nous raisonnerons après.
- C'est fort bien dit, repris Micromégas.
(N. B. : Ceci ne vous rappelle pas un certain passage de Candide ?)
Vous devez passer votre vie à aimer et à penser ; c'est la véritable vie des esprits.
Si l'on excepte un petit nombre d'habitants fort peu considérés ( 1 ), tout le reste est un assemblage de fous, de méchants ( 2 ), et de malheureux ( 3 ).
( 1 ) les philosophes.
(2 ) portés vers le mal.
( 3 ) touchés par le mal.
Jeannot était fils d'un marchand de mulets très renommé, et Colin devait le jour à un brave laboureur des environs, qui cultivait la terre avec quatre mulets, et qui, après avoir payé la taille, le taillon, les aides et gabelles, le sou pour livre, la capitation et les vingtièmes, ne se trouvait pas puissamment riche au bout de l'année.
JEANNOT ET COLIN.
- Puisque vous êtes du petit nombre des sages, dit-il à ces messieurs, et qu'apparemment vous ne tuez personne pour de l'argent, dites-moi, je vous en prie, à quoi vous vous occupez.
- Nous disséquons les mouches, dit le philosophe, nous mesurons des lignes, nous assemblons des nombres ; nous sommes d'accord sur deux ou trois points que nous entendons, et nous disputons sur deux ou trois mille que nous n'entendons pas.
Toutes les grandeurs de ce monde ne valent pas un bon ami.
(JEANNOT ET COLIN).
Nous avons plus de matière qu'il ne nous en faut, dit-il, pour faire beaucoup de mal, si le mal vient de la matière ; et trop d'esprit, si le mal vient de l'esprit. Savez-vous bien, par exemple, qu'à l'heure que je vous parle, il y a cent mille fous de notre espèce, couverts de chapeaux, qui tuent cent mille autres animaux couverts d'un turban, ou qui sont massacrés par eux, et que, presque par toute la terre, c'est ainsi qu'on en use de temps immémorial ?
Mais vous savez trop bien que quand il faut rendre son corps aux éléments, et ranimer la nature sous une autre forme, ce qui s'appelle mourir ; quand ce moment de métamorphose est venu, avoir vécu une éternité, ou avoir vécu un jour, c'est précisément la même chose.
J'ai un peu voyagé ; j'ai vu des mortels fort au-dessous de nous ; j'en ai vu de fort supérieurs ; mais je n'en ai vu aucuns qui n'aient plus de désirs que de vrais besoins, et plus de besoins que de satisfaction.