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EAN : 9782749150888
440 pages
Le Cherche midi (06/10/2016)
4.4/5   47 notes
Résumé :
1999. Le gouvernement jordanien accorde l'amnistie à un groupe de prisonniers politiques. Parmi eux, se trouve Abu Musab al-Zarqaoui, un des maîtres à penser du terrorisme islamiste. En 2003, l'invasion de l'Irak par les États-Unis va lui donner l'occasion de mettre sur pied le vaste mouvement qu'il a conçu. D'abord connu sous le nom d'Al-Qaïda en Irak, celui-ci devient l'État islamique ou Daesh et continue de croître après la disparition d'al-Zarqaoui en 2006. 2016... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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'Sous le drapeau noir' est terrifiant, et passionnant, et terrifiant, et passionnant, et ainsi de suite. Couronnée par le Prix Pulitzer en 2016, cette grande enquête retrace la naissance et la montée en puissance de Daesh.

Elle alterne les portraits des terroristes, les témoignages de ceux qui les ont combattus, les explications du contexte géopolitique en Irak, en Jordanie ou en Syrie, les biographies des intégristes ou des dirigeants de la région. Elle nous montre à quel point nous en savons peu, et à quel point la situation est complexe.

Ainsi des atermoiements de l'administration Bush qui ont laissé la place à l'organisation terroriste de se développer. Ainsi des erreurs des services secrets jordaniens qui ont laissé sortir de leurs geôles puis du pays des hommes radicalisés et prêts à tout. Ainsi des querelles de clochers (si j'osais, je dirais plutôt de minarets extrémistes) entre al Qaïda et Daesh sur les moyens d'action ou la doctrine.

Dommage que je ne puisse pas tout retenir et tout approfondir, tant ce livre est riche et intéressant. Cela dit, comme il est en outre très bien écrit et fluide comme un bon roman, je l'ai repris du début à peine l'avais-je fini... et je le conseille à tous ceux qui veulent comprendre ce qui se passe dans ce coin du monde ou dans la tête des terroristes.

Challenge Multi-Défis 18/52
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Pour la masse critique de septembre, je me suis vue retenue pour lire « Sous le drapeau noir » de Jobby Warrick, reporter du Washington Post, âgé de 56 ans, spécialiste du Moyen-Orient, et des questions de sécurité nationale.
Un grand merci à Babelio et aux éditions Cherche midi, de m'avoir permis de découvrir cette enquête journalistique aussi impressionnante. C'est une mine d'informations. On est tous bien sûr plus ou moins au courant des événements de ces dernières années sur l'ascension de Al-Quaïda en Irak puis de l'évolution vers Daesh.
Ce livre qui vient d'obtenir le prix Pulitzer en 2016 nous plonge dans les méandres de l'esprit de Abu Musab al-Zarqawi, sur son parcours du début en tant que petit délinquant vers le sommet de Al-Quaïda en Irak. En 2003, l'invasion de l'Irak par les États-Unis va lui donner l'occasion de lancer son mouvement, d'abord connu sous le nom d'Al- Qaïda en Irak. Il devient ensuite l'État Islamique (ou Daesh) et continue de croître après la disparition d'Al-Zarqawi en 2006.

Le livre s'articule en trois parties :

- L'ascension de Al-Zarquawi, Jordanien d'origine, il se forge une réputation d'homme violent mais très charismatique qui sait manipuler et amener à lui des hommes en recherche de figures fortes à suivre. On le voit tout d'abord émerger de l'anonymat en devenant le bras droit de Abou Mohammed Al-Maqdisi (imam radical) dont il s'écartera pour évoluer lui-même vers ses propres stratégies d'attentats de plus en plus violente.

« En 1993,Abou Moussad Al-Zarqaoui, et plusieurs centaines d'autres vétérans jordaniens étaient donc de retour dans un pays qu'ils reconnurent à peine. En séjournant quatre ans en Afghanistan pendant qu'Amman et les autres grandes villes de Jordanie s'étaient développées et modernisées, Zarqaoui et ses camarades avaient remonté le temps. Dans pratiquement tous les domaines, le pays contrôlé par les talibans était en retard de plusieurs siècles sur le reste du monde.

L'auteur nous décrit les personnages intervenants autour ou contre Al-Zarquaoui : Officiels de la CIA, figures religieuses et politiques, terroristes, il nous fait entrer dans l'esprit de chacun de ses protagonistes : leurs parcours, leurs missions, leurs caractères, leurs sentiments et pensées sont évoqués comme dans un roman, avec beaucoup de fluidité et suite surtout aux interview qu'il a pu menées.

- Ensuite, vient la période d'invasion et de désorganisation de l'Irak et donc de l'émergence du groupe Al-Quaïda en Irak dirigé par Al-Zarqawi. L'auteur nous montre comment par de multiples coïncidences, mauvaises appréciations et décisions, les occidentaux ont pu déclencher un terreau propice à l'évolution rapide de ce nouveau groupe.

« C'est dans cet Irak en pleine réorganisation que Al-Zarqaoui allait trouver à la fois une liberté de manoeuvre et des alliés puissants aussi désireux que capable de soutenir sa cause. Des capitaines et des sergents qui avaient autrefois servis Saddam Hussein s'engageaient à présent dans l'armée du Jordanien, certains accédant à des postes de commandement »

- La troisième partie traite de la naissance et du développement de l'état islamique lors de la crise syrienne sous l'impulsion d'Abou Omar al-Baghdadi qui regroupe différentes factions djihadistes, ainsi que des combattants musulmans venus du monde entier.

« Si les États-Unis n'avait pas envahi l'Irak, le boucher en chef de l'État islamique aurait probablement mené une simple vie de professeur d'université. Jusqu'en 2003, le cours de son existence semblait le destiner à une carrière tranquille consacrer à enseigner la jurisprudence islamique à des étudiants de 20 ans et non à leur scotcher des bombes sur le ventre »

En plus de nous décrire avec minutie tous les intervenants de son livre, Joby Warrick a une belle plume, on pourrait lire ce livre comme une fiction, malheureusement ce n'est pas le cas, et je dois dire que par moment j'avais le coeur au bord des lèvres. Tant de fanatisme, de déterminisme dans l'embrigadement de recrues en kamikazes, de manipulations des uns et des autres. Toutes ces vies sacrifiées aussi bien occidentales que musulmanes au nom d'un idéal datant de plusieurs siècles, a de quoi faire frémir....
A travers ces écrits on voit vraiment l'évolution de plus de dix ans de déstabilisation d'un territoire en un vaste champ de bataille ou rien n'est vraiment établi.
Très bon reportage que je conseille à ceux qui veulent en savoir un peu plus que ce que nous en racontent les médias.
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Saut dans l'inconnu et totale immersion dans une enquête journalistique aussi complète que documentée, avec Sous le drapeau noir de Joby Warrick.

Saut dans l'inconnu car, plutôt habitué aux fictions, c'était je crois bien la première fois que je m'attaquais à une véritable enquête d'investigation journalistique en format papier. le thème, lui, semble malheureusement beaucoup plus familier : Daesh, son origine et son ascension. Mais "semble" seulement, car en lisant ce livre, on se rend vite compte d'à quel point nous sommes peu ou mal informés sur ce sujet.
Zarqaoui, fondateur de L'EI, est le fil rouge de cette enquête, de ses débuts dans les prisons jordaniennes à son ascension comme figure principale du terrorisme islamiste, en passant par la séparation idéologique et les désaccords avec Al-Quaïda et d'autres terroristes ou intégristes. Même avec ses successeurs, parfois encore plus terribles que lui, le spectre de Zarqaoui flotte non loin.

« Comment un être humain doté d'un coeur peut-il faire une chose pareille ? » se demandera l'un des intervenants face à une scène de massacre en début de livre. Cette question, on se la reposera à de (trop) nombreuses reprises au cours de la lecture.
L'enquête se concentre surtout sur la Jordanie, l'Irak et la Syrie : la carte en début de livre sera utile pour cette région géographique et géopolitique où il se passe tellement de choses décisives et d'importances et dont pourtant on est assez peu habitué ; cette investigation de longue haleine nous fait vivre de l'intérieur les événements, avec un point de vue presque nouveau et inédit, tant nous sommes peu au courant de certains éléments pourtant clés ou des efforts des services secrets jordaniens.
Certains réaliseront peut-être alors que, malgré ce que certains politiciens scandent, les premières et bien trop nombreuses victimes de l'EI sont les habitants des régions contrôlées par ou frontalières à ce soi-disant état, puis victimes des conflits qui embrasent la Syrie et les régions alentours et directement liés aux activités terroristes évoquées plus tôt, créant ainsi des millions de réfugiés fuyant de manière bien compréhensible leurs pays.
L'enquête montre aussi magistralement que les terroristes tordent l'islam jusqu'à le dénaturer complètement, pour servir de pseudo justification à des desseins abjectes et des actes d'une cruauté sans nom, qui n'a alors plus rien à voir avec la religion dont ils se réclament et que de très nombreux imams du monde entier n'ont pas hésité à dénoncer. Il est également très intéressant et inattendu de voir le schisme irréparable créé entre l'EI et Al-Quaïda et d'en connaître les raisons.

Le contrepoint des USA et de leur politique, aussi bien intérieure qu'étrangère, est également traité sans concession aucune, nous permettant de comprendre que les bourdes successives des gouvernements américains ont grandement permis une telle ascension et ampleur à ce mouvement terroriste.
Le livre aborde principalement la naissance et l'ascension de Daesh, de 1999 à 2014, mais n'évoque que rapidement 2015 et pas du tout 2016. Les lecteurs espérant le traitement des tragiques événements récents en France ou aux USA ne trouveront pas leur compte, même s'ils comprendront comment on en est arrivé là, ce qui a toute son importance.

Le livre se lit presque d'une traite tant on est fasciné, effrayé, scandalisé, en colère ou ému par les événements. Loin d'être froid et une simple succession de faits, le style sait se faire fluide, immersif, on a l'impression de revivre réellement les événements.
On repose parfois le livre pour souffler, les larmes aux yeux soit à cause de l'horreur déployé, soit à cause de ces élans d'humanité qui redonnent foi en l'être humain, quel que soit son origine, son sexe ou sa religion.

Un livre à mettre entre les mains de ceux qui veulent mieux comprendre ce qu'est l'État Islamique, de ceux qui s'intéressent à ce qui se passe dans un Moyen Orient pas si loin de chez nous et qui n'a que quelques secondes d'alloués dans nos journaux télévisés. Mais aussi, et peut-être surtout, à ceux qui mettent sans la moindre réflexion ni empathie les musulmans et terroristes dans un seul et même panier...
À mettre à peu près dans toutes les mains, en fait.

Cette enquête s'avère au final digne des plus grands et meilleurs documentaires ou autres enquêtes journalistiques de qualité.
Élu meilleurs livre de l'année par le New York Times et le Washington Post, également Pulitzer 2016, on se dit en refermant ce livre que prix et éloges sont amplement mérités.
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Merci à Babelio et aux éditions du Cherche Midi de m'avoir offert l'opportunité de découvrir cet essai.
En 440 pages Joby Warrick nous propose une plongée dans l'histoire très récente d'une partie du Moyen Orient, qui a vu la naissance et la montée en puissance d'un mouvement islamiste ultra radical autoproclamé Etat. Sur 25 années environ, il nous dresse le portrait des leaders de ce mouvement, et de ceux qui ont voulu le combattre sur le terrain.
Il nous explique que c'est la conjonction de l'opportunisme de certains, du manque de vision à long terme d'autres, de l'impuissance de quelques uns à se faire entendre , et de l'incompétence de pas mal d'intervenants, qui a mené à la situation que nous connaissons depuis quelques années en Irak et en Syrie. L'administration Bush, notamment, est pointée du doigt, pour sa morgue, son autoritarisme, son arrogance, et une méconnaissance totale du fonctionnement de ces pays.
Cet essai particulièrement bien documenté nous présente quelques uns des principaux protagonistes : al Zarkaoui, un petit délinquant Jordanien à moitié illettré devenu le dirigeant ultra violent d'al Quaida en Irak ; al Baghdadi , son successeur, un Irakien dévot et tout aussi violent ; le roi Abdallah de Jordanie, qui tente de préserver son pays de l'embrasement ; des militaires et diplomates américains, compétents et connaisseurs de la région, qui essaient de se faire entendre auprès de leur gouvernements, en vain le plus souvent. Il ébauche aussi le portrait d'un Bachar el Hassad, prêt à tout pour conserver le pouvoir en Syrie.
Surtout, en nous traçant de façon particulièrement détaillée certains parcours, Joby Warrick nous laisse à penser que finalement tout ceci est avant tout dû à une chose, et une seule : une inculture crasse (pour ne pas dire totale). Inculture qui pousse le clan Bush à croire (ou faire semblant de croire ?) qu'on peut exporter et imposer en quelques semaines les mode de pensée, d'interactions sociales et d'organisations familiales et sociétales de l'Occident à des pays qui fonctionnent encore beaucoup en modes tribaux. Inculture de ces « paumés » déséquilibrés (qu'ils soient Irakiens, Syriens, Jordaniens, ou Européens !), qui voient dans leur vision totalement dévoyée de la religion musulmane au choix un moyen facile de justifier leurs déviances, d'expliquer et d'excuser leur folie, et pour les moins atteints (quoique !) de disposer d'une sorte de refuge répondant à un besoin d'appartenance à un groupe. le choc de ces 2 incultures a généré une réaction en chaine et crée un monstre : DAESH.
Particulièrement riche et détaillé, ce livre est nécessaire pour comprendre l'actualité, et devrait être lu par tous ceux qui veulent vraiment comprendre. Je lui trouve toutefois 2 défauts : il est très (trop) « américano centré » (ne faisant quasiment jamais référence aux nations européennes ni à la Turquie) et il manque peut-être d'un peu plus de recul historique pour mieux appréhender le sujet dans sa globalité.
Je vous le recommande donc chaudement, mais vous suggère de lire aussi « le piège DAESH » de Pierre Jean Luizard, autre essai sur le sujet et qui le présente avec une vraie vision historique (sur une centaine d'année)


Lien : http://desmotssurunepage.ekl..
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Une excellente leçon de géopolitique qui mène au terrorisme de Daesh, le tout servi comme un véritable roman d'enquête journalistique.
Pas étonnant qu'il ait reçu le prix Pulitzer.
Retour sur les principaux personnages qui se sont construits au fil des événements et qui ont pris de l'ampleur par l'aveuglement et l'obstination de certaines puissances.
Le Moyen-Orient reste une zone fragile dont les secteurs économique et financier restent plus appréciables les uns que les autres.
Heureusement que certains pays gardent la tête froide, comme la Jordanie me semble-t-il, même s'ils doivent en payer le prix.

Ce livre revient sur l'acharnement qu'a démontré Bush fils pour se débarrasser de Saddam Hussein, un temps détesté, un temps apprécié, un temps courtisé, selon ce qu'on voulait obtenir de lui (comme pour tous les autres d'ailleurs tels que Muamar Kadafi).

Il faut que tu nous achètes pour des millions d'armes, il faut séduire l'homme. Il faut que nous protégions le Koweit, il faut combattre l'homme. Il faut que l'intérêt d'une autre nation soit préservée pour un intérêt financier, économique ou autre, il faut convaincre toutes les autres nations que l'homme détient des armes nucléaires. Et bien entendu, on ne se préoccupe pas des dommages collatéraux, ce ne sont que des civils qui en paieront le prix pendant les cinquantes prochaines années (c'est déjà loin ça, demain c'est déjà suffisant), ou alors faudrait-il avouer que certains personnages politiques et leur entourage n'ont pas l'intelligence, l'éthique ou la culture assez développées pour prendre de bonnes décisions... Je crois que se poser la question est y répondre, les exemples ne manquent pas et ils sont nombreux rien que depuis 1900.

Il s'agit d'un livre accessible à un public novice mais au contenu consistant qui peut vous mener vers d'autres ouvrages qui viendront compléter le sujet.
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critiques presse (1)
LeJournaldeQuebec
09 janvier 2017
Joby Warrick s’est interrogé sur les objectifs de Daesh, sur les responsabilités des États occidentaux et fait un portrait saisissant de cette organisation.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
Nada Bakos se demandait si la principale réussite de Zarqaoui n’était pas de s’être ainsi élevé au rang de cible prioritaire, et pas seulement pour les Américains. « Zarqaoui a dévié du scénario, a-t-elle estimé plus tard. Même Al-Qaïda essayait de respecter certains principes, en s’en remettant à ses théologiens pour interpréter la charia. Zarqaoui, lui, interprète la loi comme il l’entend. Il invente ses propres règles, comme dans une secte, a-t-elle expliqué. Il est en train de devenir une méga-église7. » Il allait y avoir un retour de bâton, c’était évident. Les grands prêtres d’Al-Qaïda et des autres réseaux djihadistes bien établis n’allaient pas voir d’un bon œil un comportement aussi démesurément hétérodoxe, surtout s’il heurtait les sensibilités des Arabes fortunés et pieux qui fournissaient à l’organisation l’essentiel de son argent. Mais de nombreux musulmans ordinaires étaient sur les rangs pour rejoindre la congrégation en perpétuel essor de Zarqaoui. En Irak et ailleurs, des admirateurs commencèrent à désigner le Jordanien par un nouveau surnom, apparu les jours suivant la première diffusion de la vidéo de Berg. Ben Laden demeurait la figure de proue que l’on respectait, l’homme qui, des années auparavant, avait combattu les Soviétiques et conçu les attentats contre New York et Washington. Mais Zarqaoui était maintenant salué comme le « cheikh des égorgeurs », le terroriste d’un nouvel âge, brutal, où la diffusion d’actes de boucherie sur Internet tenait lieu de tactique pour gagner le soutien des djihadistes les plus endurcis et semer la peur chez tous les autres.
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Alors qu’à Hama la tension était à son comble, Assad introduisit un nouveau thème dans ses discours et ses déclarations publiques pour dénoncer le soulèvement. Les manifestants n’étaient plus des « vandales » ou des « criminels ». Le dirigeant syrien parlait désormais d’un combat contre les « takfiri » – les islamistes radicaux. « Cette idéologie est tapie dans l’ombre pour se révéler au grand jour dès que l’occasion se présente, déclara-t-il dans un discours télévisé adressé à la nation. Elle tue au nom de la religion, détruit au nom de la réforme et sème le chaos au nom de la liberté12. » Assimiler les manifestants de Hama et Deraa à des extrémistes religieux était totalement absurde. Les premières manifestations avaient été de remarquables démonstrations d’unité, agrégeant sunnites, chiites, chrétiens, Kurdes et même certains représentants du courant alaouite, celui d’Assad. Mais ce dernier allait continuer à affirmer avec insistance que la Syrie était prise au piège d’une lutte à mort contre des djihadistes qui voulaient déclencher une guerre religieuse et ramener le pays au Moyen Âge. L’absence de toute revendication islamiste visible au sein du soulèvement sembla, dans un premier temps, battre en brèche les déclarations du président. Mais au cours des mois qui suivirent, deux groupes distincts – l’un au cœur du régime, l’autre basé à l’étranger – allaient faire en sorte d’introduire de vrais takfiri dans le conflit, transformant la crise intérieure syrienne en une catastrophe internationale.
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Les premiers califes, tenus pour les successeurs du prophète Mahomet, régnèrent depuis Damas et Bagdad. Ils furent ensuite supplantés par les Turcs ottomans, qui agrandirent l’empire islamique et créèrent un califat dirigé par de puissants sultans installés à Istanbul. Les conquérants turcs accordèrent une autonomie limitée à La Mecque, permettant aux Hachémites de conserver le contrôle des sites de la ville sainte conformément à une tradition qui remontait au Xe siècle. Puis, au début du XXe, vint un Hachémite dont l’ambition et l’audace allaient changer le destin de la famille et redessiner les frontières du Moyen-Orient.
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Les jeunes islamistes nés à l’étranger qui répondaient à l’appel au djihad de Zarqaoui finissaient le plus souvent dans une école pour kamikazes. Certains recevaient l’injonction de sacrifier leur propre vie pour détruire des cibles ; seul bénéfice de leur acte : le meurtre de quelques Irakiens innocents qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment. En recrutant des candidats pour des attentats-suicides, Zarqaoui bravait en toute connaissance de cause une règle coranique qui interdit formellement aux musulmans de s’ôter eux-mêmes la vie. Certains érudits islamiques ont soutenu que les missions-suicides à caractère militaire étaient autorisées dans certaines circonstances extrêmes, et les djihadistes ont débattu des décennies entières pour décider d’où se situait la frontière. Zarqaoui s’était jeté sur une petite faille de la loi islamique et l’avait agrandie dans des proportions absurdes, faisant appel à des imams sélectionnés avec soin pour légitimer le recours à des « opérations martyres » répondant à ses objectifs. La conséquence fut, selon plusieurs chercheurs, un déferlement d’attentats-suicides sans précédent dans l’histoire du mouvement djihadiste.
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Hors des services de renseignement, rares étaient ceux qui avaient entendu parler de Zarqaoui lorsque, en 2003, Washington l’avait transformé en superstar du terrorisme en proclamant au monde entier que ce Jordanien inconnu était le maillon entre la dictature irakienne et ceux qui étaient derrière les attentats du 11 septembre 2001. Proclamation erronée, mais quand, quelques semaines plus tard, les troupes américaines avaient envahi l’Irak, le terroriste nouvellement célèbre et bien financé y avait gagné un champ de bataille, une cause et, très vite, des disciples par milliers.
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