Sarah Waters a le merveilleux don de nous immerger dans l'ambiance de ses romans au point de faire de nous des personnages de ces romans, spectateurs privilégiés bien démunis lorsque la dernière page est tournée. On se retrouve seules, perdues en plein Londres, sans savoir où aller puisque l'histoire est finie sur le papier et ne peut continuer que dans notre pauvre imagination où elle ne survit malheureusement pas très longtemps si ce n'est sous forme de souvenirs de lecture ressassés encore et encore. le choix de la prochaine lecture est alors cruciale car on a toujours un peu l'esprit avec
Sarah Waters.
S'il ne possède pas l'enchantement permanent de "
Caresser le velours", l'enrôlement du lecteur marche bien mieux dans "
Derrière la porte" qu'avec "
Ronde de nuit" dont j'avais su me détacher assez vite. Bien sûr, pour créer cette ambiance, cette familiarité, il faut du temps et des pages qui se lisent néanmoins très facilement. L'écriture de
Sarah Waters est très classique que ce soit dans la tournure des phrases ou dans la narration. On s'attache ici à Frances et on suit l'histoire linéairement avec elle. Je ne saurais pas qualifier le style de
Sarah Waters. Très agréable sans être flamboyant, il n'est pas non plus au service de réflexions profondes sur la nature humaine (même si des problèmes de société sont évoqués et si les personnages se posent des questions). Je ne me résous pas à considérer "
Derrière la porte" comme une simple romance policière très bien écrite... peut-être parce que je ne serais pas très fière d'adorer ça !
J'ai trouvé beaucoup de points communs entre "
Derrière la porte" et "
Thérèse Raquin" de
Zola. La cohabitation forcée, les rendez-vous secrets, le mari gênant, la culpabilité, les amants qui se déchirent peu à peu, le doute qui s'installe sur la loyauté de l'autre. La troisième partie de
derrière la porte est cependant plus haletante (mais moins psychologique) que la fin du roman de
Zola. La chute, qui devient inévitable au regard du nombre de pages restant à lire, n'est néanmoins pas aussi époustouflante que l'annonce l'éditeur.
Il en reste une magnifique lecture dont je suis toujours empreinte plus d'une journée avec l'avoir terminée.