Londres, 1922. À l'ouverture du roman, Frances Wray et sa mère, deux bourgeoises désargentées, accueillent les Barber, à qui elles vont louer une partie de leur maison, afin d'éviter la pauvreté. La présence de ce jeune couple un peu bohème amuse dans un premier temps Frances, célibataire endurcie et lesbienne assumée, ou du moins autant que faire se peut en Angleterre au début du XXe siècle, avant que Lilian Barber, avec ses robes colorées et ses lèvres fardées aux antipodes de la simplicité un peu poussiéreuse de la jeune femme, ne commence à l'intriguer puis la séduire. Une relation sentimentale se tisse entre les deux femmes, avant qu'un drame ne se produise, remettant tout en cause…
Si je me suis jetée (comme d'habitude avec cet auteur) sur «
Derrière la porte », sixième ouvrage de
Sarah Waters, j'en ai été déçue (c'est d'ailleurs celui de cet auteur qui m'a le moins plu), notamment parce que les trois parties qui le composent sont assez inégales : si le roman commence sur les chapeaux de roue, une belle longueur à la moitié de la première partie (centrée sur le personnage de Frances, mais surtout sur ses états d'âme et ses atermoiements qui, d'intéressants, deviennent rapidement fatigants), et quasiment jusqu'au drame vient un peu doucher l'enthousiasme du lecteur.
Néanmoins, dès que le roman reprend de la vigueur (impossible d'être plus précise sans « spoiler »), «
Derrière la porte » redevient agréable à lire, balloté que l'on est par
Sarah Waters (qui quitte ici pour la première fois l'époque victorienne pour le XXe siècle).
En effet celle-ci, comme à son habitude, joue avec son lecteur tout au long de l'ouvrage, en réussissant à lui faire comprendre que des rebondissements peuvent se cacher derrière chaque situation (ceux-ci étant toutefois moins spectaculaires qu'à l'habitude). C'est ainsi que je me suis retrouvée à échafauder toutes sortes de scénarios plus improbables les uns que les autres, aidée également par une quatrième de couverture assez mal rédigée (qui en dit trop, puis parle d'un rebondissement final inattendu… ce qui est beaucoup dire).
Sarah Waters joue également sur une part de mystère, sur cette part de voyeurisme qui se cache en chacun (ou presque) de nous : que se passe-t-il
derrière la porte (des apparences) ? Derrière celle de Léonard et Lilian Barber, ce couple qui ne va pas aussi bien qu'il en donne l'air ? Ou celle de Frances, derrière laquelle les deux jeunes femmes laissent libre cours à leur passion ? Ou encore celle de la situation dans laquelle elles se retrouvent prisonnières, telle une prison de la passion interdite ?
Ainsi, avec «
Derrière la porte »,
Sarah Waters signe une nouvelle fois un roman qui fait la part belle aux femmes (les hommes étant soit morts - lors de la Première Guerre mondiale -, soit d'une inconsistance et d'une faiblesse parfaites du point de vue du caractère et des agissements).